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toute philo espère devenir musique et toute musique est philo.”<br />
<strong>Le</strong>s choses avaient évolué et de nombreux petits programmes de génération<br />
musicale tels que CellSynth ou Nodal apparaissaient sur le marché, très limités<br />
quant à la qualité du rendu final mais répondant tous à cette recherche croissante<br />
d’une ADN musicale, d’un groupe de structures sonores pouvant évoluer<br />
à l’infini.<br />
Des Ombres ne voyait pas de différence entre ses activités de chef et de compositeur<br />
classique et celle de chercheur en musique électronique. L’orchestre<br />
symphonique lui apportait une beauté instantanée, faite du savoir d’un grand ensemble<br />
de musiciens et de la somme de leurs micro-erreurs ! On avait démontré<br />
que ce qui fait le charme d’une section de seize premiers violons réside dans les<br />
infimes différences d’intonation, de vibré, de justesse et de timbre. Faire parler<br />
une foule d’instruments est magique, si l’on pouvait faire en politique que les<br />
gens s’accordent comme dans un orchestre symphonique ce serait l’utopie, la fin<br />
peut-être de toute dynamique sociale.<br />
<strong>Le</strong> programme UC (Universal Composer) était une idée qu’il avait eue pour le<br />
prodigieux instrument créé par son ami Di Giugno 145 à Paris. Il avait été totalement<br />
surpris que l’ingénieur le programme en Fortran, un des premiers langages<br />
informatiques, totalement inadéquat pour servir les besoins d’un compositeur.<br />
Il fallait unir le langage du corps avec celui de la logique. Des Ombres dirigeait<br />
un orchestre et jouait du piano avec ses mains et ses bras, l’accès à la puissance<br />
informatique devait nécessairement passer par le corps, en partie du moins car il<br />
devait y avoir un organigramme de composition, une règle de base, un principe<br />
d’évolution pensé par le créateur. <strong>Le</strong>s musiciens ont une fâcheuse tendance à se<br />
prendre pour Dieu mais, quand il pensait aux mondes de Bach ou de Mozart,<br />
il ne trouvait pas cette idée aussi sotte que ça. Dans un contexte moderne il y<br />
avait une nouvelle lutherie, instable, elle changeait souvent et il fallait trouver<br />
la manière d’en jouer. Il était très simple de générer des torrents de sons avec<br />
les nouveaux instruments. Ce qui apparaissait le plus facilement dans les improvisations<br />
ou les programmations qu’il réalisait était un phénomène de flux<br />
sonore. Un monde particulaire qu’il avait exploré il y avait déjà longtemps dans<br />
une œuvre, Monades II, en notant un chaos sonore très agité, une turbulence,<br />
surmontée d’une parole supérieure la contredisant, dominant le bruit de fond de<br />
cet univers musical. <strong>Le</strong> verbe et le chaos. On n’avait rien inventé de neuf depuis<br />
145 Guiseppe di Giugno, physicien des particules passé à la recherche musicale, c’est lui<br />
qui donne à l’IRCAM de Boulez ses lettres de noblesse en concevant le synthé 4a(b, c) premier<br />
instrument musical virtuel au monde. Très amoureux aussi d’Arielle Dombasle qui fait ses<br />
débuts dans le showbize.<br />
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