Le 12ème Evangile - Margelle

et regarde vers l’avant. Reste souple !
- Mais que sais-tu du douzième évangile ?
- Rien ! Si ce n’est que je devais l’écrire chez Dominik’s, avec Dieu, dans le
New York des années 1960…
- Tu n’as pas d’autres indices ?
- Une masse, fis-je tout en enroulant vivement ma jambe gauche autour de la
droite et en effectuant quelques-unes de ces figures de voltige sexe fatal typiques
du tango. Ah ! ces Porteños ! Ça raviva nettement attention.
- Énumère, me dit-il soudain autoritaire et, ce faisant, il me plia en deux dans
le plus pur style argentin. Je pris soin de faire monter ma jambe près de son soudain
viril visage.
- Je suis, je serai un beau proton et tu vas me faire…
- Un enfant ?
- Pas du tout, une soupe primordiale.
- Je vois, tu veux tomber avec moi dans la lumière ! Je suis d’accord, Mélissa.
Mais pour ça il faut que je retourne dans mon studio et que je joue à nouveau
cette musique terriblement précise. Des quintes et peut-être le thème du Nom.
- Tu retardes, mon grand amour. Ça, c’était avant-hier. Je t’ai choisi la meilleure
musique pour arriver à Las Estrellas, Dieu le sait. Et là, tout peut arriver…
Il me tenait fermement par la taille et suivit mon jeu de jambes avec le plus vif
intérêt. Je me sentais redevenir moi-même, Mélissa%Mélissa, c’est incalculable.
Et soudain, je vis par les grandes fenêtres s’opérer une magique transformation.
En face de nous, les arbres de la promenade devenaient lentement transparents
des lumières couraient dans les murs de pierre. Aucun doute, c’était le signe du
passage vers Los Tres Picos ! J’en fus si émue que c’est moi qui marchai sur le
pied de Jacques, lequel protesta vigoureusement.
- Aoutch ! fit-il.
- Tu n’es pas une fille américaine, remarquai-je très contrariée.
Inutile de vous dire que ce début de translation s’était interrompu, on était
de nouveau en Suisse, même si Genève a son charme particulier. Je n’étais pas
sérieuse et mon grand amour était un boulet ! Il me vint une idée. Des Ombres,
par nature, n’était plus stable. Il avait digéré sa chute dans la lumière mais depuis
que Dieu s’était manifesté sur Denfert et m’avait envoyée le rencontrer à Stuttgart
il était clair que tout tendait à se mélanger. Je devais déséquilibrer Jacques
et débusquer Dieu. Ça ne devait pas être trop difficile, les mecs, quel que soit
leur niveau, ont tous une chose en commun : une faiblesse devant le féminin. Il
ne me restait qu’à choisir laquelle. Et la pratiquer.
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