Le 12ème Evangile - Margelle

aucun sujet intéressant dans les conversations, la superficialité était de mise,
comme le luxe. C’était extraordinairement nivelé. Comment ces gens-là arrivaient-ils
à survivre ? J’ai interrogé mon sexe : il était au point mort. Pas bon ça,
que va-t-il se passer si Celle qui détient la Vie s’éteint lentement eh ? Il n’y avait
personne ni rien qui le fasse réagir. Normal, la vie ne réagit qu’à la vie et ces
gens-là, comme je viens de vous le dire, étaient morts et asséchés depuis longtemps.
Ce qui retint mon attention fut ce moment quand ils s’éloignèrent de moi
pour former un cercle. Je vis, du coin de l’œil, Hannelore tapoter sur sa télécommande.
Pas de doute, j’allais passer en vedette européenne. Un texte en forme
d’Adieu passa sur mon FemmeTouch…
Libre, fumante, montée de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux dieux absents,
Des lichens de soleil et des morves d’azur ;
Qui courais, taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les juillets faisaient crouler à coups de triques
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;
Moi qui tremblais, sentant geindre très près de moi
Le rut des Béhémots et les pouvoirs infâmes,
Briseurs éternels des immobilités bleues,
Ce n’était peut-être pas la version originale, je modifie tout, c’est plus fort
que moi. Mais ça avait du sens. J’allais, seule, affronter ceux qui déforment nos
vies. Hannelore allait enfin exprimer sa haine et me défaire horriblement à la
plus grande joie de ces vieux pervers. Quel monde effrayant venait donc à moi
et comment avait-il pu si mal tourner ? Qu’était la joie ? La Vie ?
Et toujours sans nouvelles de Dieu.
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