Le 12ème Evangile - Margelle

je vis ce chef inspiré, il me parut éclairé par une lumière venant d’en dessous les
yeux vides, en transe, je le vis littéralement descendre vers les Profondeurs de la
Terre telles qu’il les concevait, alors qu’une autre partie de l’orchestre entreprenait
une ascension vers la clarté la plus intolérable possible. C’était une analyse
de son âme, du monde, qu’il réalisait à partir de ses savoirs et il nous embarquait
avec lui. Heureusement il devait y avoir des imperfections dans l’exécution car
sinon, seul le Diable sait sur quoi nous aurions débouché. Je me sentis littéralement
écartelée entre ces deux pôles, illuminée par ces galaxies lumineuses
suraiguës et aspirée vers le temps obscur que son inconscient projetait, vers sa
matière noire, je n’aurais jamais cru qu’une musique puisse être aussi fatigante,
j’étais aussi éreintée que fascinée.
Je ne sais pourquoi je m’imaginai, un court instant, nue, en string, au centre de
cet orchestre et, pour la première fois je me trouvai stupide, ça ne m’excita pas.
Je n’étais qu’une étrangère à ce monde, une fille qui ne connaissait pas les mots
indispensables pour décrire cette expérience.
La pause est venue et les musiciens se sont changés en personnes banales.
Quelques éclats de rire fusaient, des groupes se formaient, l’orchestre symphonique
d’avant Evène est un instrument dont nous avons perdu la pratique mais
c’est quelque chose de réellement sorcier. Ou était-ce cette musique ?
Je n’avais pas la réponse à cette question et, prétextant un rendez-vous de
travail, j’ai pris congé, un peu embarrassée, pas du tout dans mon style habituel.
Une chose était certaine, je ne mouillais pas, si je portais mon string je ne
le sentais pas, ce mec m’avait changée en pur esprit éthérique et bien qu’il ne
manque pas de charme je n’avais aucune intention de le sauter. Un comble ce
Des Ombres. Je me suis demandé pourquoi je l’avais classé dans mon top2. Et
pourquoi Dieu m’avait balancé là, vers lui. Il y avait évidemment une explication
rationnelle mais je fus incapable de la trouver.
J’ai filé dans les toilettes du bâtiment pour appuyer sur le pavé bleu. En espérant
que personne ne s’aperçoive de la disparition de Mélissa. Dans cette
séquence je n’avais pas été moi-même, non seulement je n’avais pas joui (ça
allait faire un foutu décompte !) mais je n’avais pas envisagé de fusion sexuelle
avec qui que ce soit. Sauf avec cette musique envoûtante que je me mis à détester
de tout mon cœur, sans pouvoir l’oublier. Une seule chose me paraissait
certaine et frustrante.
Je n’avais pas modifié le futur par mon inconduite !
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