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ÉQUIPEMENTS PUBLICS<br />
Concevoir une institution<br />
de grande échelle comme<br />
un morceau de ville<br />
4–5 <strong>et</strong> 7<br />
Les différents <strong>espaces</strong><br />
s’entremêlent <strong>et</strong> créent<br />
un véritable paysage<br />
urbain.<br />
6<br />
Plan du niveau -1.<br />
7<br />
Face au programme gigantesque du<br />
concours, <strong>et</strong> à la taille limitée de la<br />
parcelle dans un contexte très urbain,<br />
quel a été votre point de départ ?<br />
Shelley MacNamara Notre équipe se<br />
demandait comment ériger un bâtiment à<br />
Milan. En soi, cela représente déjà un défi,<br />
car c’est une métropole solide, robuste.<br />
Lorsque nous étions en train de réaliser<br />
ce proj<strong>et</strong>, nous pensions à ces endroits<br />
fantastiques que compte la ville, comme<br />
la Stazione Centrale ou la Galleria Vittorio<br />
Emanuele II. Des lieux immenses. Nous<br />
ne voulions pas seulement que l’université<br />
Bocconi soit un bâtiment. Nous voulions<br />
qu’elle devienne une partie de la ville,<br />
une pièce du puzzle. Inconsciemment, il<br />
fallait se connecter avec c<strong>et</strong>te grandeur des<br />
bâtiments milanais. Nous avons intégré<br />
c<strong>et</strong>te spécificité de la ville comme un paramètre<br />
important dans notre réalisation.<br />
Nous avons réfléchi à la structure de la ville<br />
<strong>et</strong> pas seulement à l’architecture.<br />
Contrairement à ce que son aspect<br />
quelque peu massif pourrait suggérer,<br />
le bâtiment que vous avez conçu exprime<br />
une volonté extrême d’intégration<br />
dans la ville. Quels sont les outils qui ont<br />
permis ce résultat ?<br />
SM Nous voulions créer un paysage<br />
urbain. On a creusé dans le sol, on a réalisé<br />
des rampes, des places, des jardins suspendus…<br />
Nous avons conçu des bureaux qui<br />
« flottent » au-dessus du sol. Une manière<br />
de faire entrer la ville, de faire en sorte<br />
qu’elle s’insère entre ce grand toit <strong>et</strong> le sol.<br />
Afin de créer une continuité entre la ville<br />
<strong>et</strong> le bâtiment, nous avons utilisé, aussi bien<br />
pour la façade que pour le sol, une pierre<br />
milanaise très présente localement.<br />
Quelle est la fonction du grand vide<br />
central dans le bâtiment ?<br />
SM C<strong>et</strong> espace est le cœur du bâtiment.<br />
C’est l’endroit où il devient lisible. Selon<br />
moi, c’est un espace public. Ce n’est pas<br />
très grand. Environ 18 m sur 30. Mais tout<br />
le monde entre par ici. Lorsque l’université<br />
est en activité, c’est formidable. Il y a un<br />
flux permanent. Les gens entrent, sortent,<br />
passent en vélo, s’asseyent, boivent un<br />
verre… Il y a parfois des fêtes, des<br />
dîners. Des œuvres d’artistes y sont régulièrement<br />
exposées. Ce lieu reste ouvert la<br />
plupart du temps, afin de conserver<br />
c<strong>et</strong> esprit d’espace public. La raison d’être<br />
de c<strong>et</strong> endroit était vraiment de faire pénétrer<br />
la vie de la ville à l’intérieur du bâtiment.<br />
Le soir, la vitre tend à disparaître <strong>et</strong><br />
on a l’impression que la rue pénètre<br />
dans le bâtiment.<br />
Pourquoi avoir opté pour une façade<br />
constituée de larges baies vitrées ?<br />
SM Nous voulions laisser pénétrer la<br />
lumière naturelle. Ainsi même les locaux<br />
situés à 9 m en dessous du niveau du<br />
sol sont éclairés comme en plein jour. Cela<br />
procure un sentiment de transparence<br />
<strong>et</strong> c’est aussi une manière de créer une<br />
connexion avec la ville. Le bâtiment<br />
supprime les frontières entre l’intérieur<br />
<strong>et</strong> l’extérieur. On est exposés à la vie de<br />
l’immeuble avant d’y pénétrer. Le bâtiment<br />
se révèle visuellement.<br />
Les volumes suspendus exposent de<br />
manière assez spectaculaire les locaux<br />
de bureaux. Pourquoi avoir opté pour<br />
ce langage architectural très expressif ?<br />
SM L’idée était de rompre avec c<strong>et</strong>te tyrannie<br />
du plateau de bureaux. Nous avons<br />
choisi quelque chose de plus volumineux,<br />
des <strong>espaces</strong> qui s’entrechoquent. Nous<br />
voulions trouver une connexion entre les<br />
volumes du haut <strong>et</strong> du bas. Les bureaux<br />
sont suspendus à la toiture. On a l’impression<br />
que les pièces surgissent d’en haut,<br />
qu’elles flottent au-dessus du lobby.<br />
L’ensemble ressemble à un labyrinthe de<br />
bureaux, d’allées, de jardins.<br />
Pourquoi doter une université privée<br />
d’<strong>espaces</strong> publics ?<br />
SM Sans <strong>espaces</strong> publics, il n’y a ni ville,<br />
ni architecture. Si on les supprime, on<br />
ampute la ville d’un endroit où la société<br />
interagit. Je pense que l’architecture<br />
est aussi un outil au service des entreprises<br />
<strong>et</strong> des institutions qui souhaitent interagir<br />
avec les citoyens <strong>et</strong> leur donner quelque<br />
chose. L’espace public est le cadeau le plus<br />
généreux qu’on puisse leur offrir.<br />
« Sans <strong>espaces</strong> publics,<br />
il n’y a ni ville, ni<br />
architecture. Si on les<br />
supprime, on ampute<br />
la ville d’un endroit où<br />
la société interagit . »<br />
— Shelley MacNamara,<br />
Grafton Architects<br />
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