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Nouveaux Quartiers<br />
Quelle forme donner<br />
à la ville de demain ?<br />
<strong>espaces</strong> publics de plus grande importance.<br />
La place Flagey ou la place Rogier, par<br />
exemple, s’inspirent directement de c<strong>et</strong>te<br />
méthode, sans l’affirmer ouvertement.<br />
C<strong>et</strong>te succession de bons proj<strong>et</strong>s amène<br />
progressivement à considérer ce saut<br />
d’échelle. Mais cela ne s’improvise pas ; ce<br />
saut d’échelle s’est construit dans le temps.<br />
Il faut néanmoins être conscient des<br />
limites liées à l’outil du contrat de quartier,<br />
dont le périmètre correspond à une<br />
dizaine d’îlots <strong>et</strong> non pas à des quartiers ou<br />
des territoires de proj<strong>et</strong>s considérés dans<br />
leur globalité. Les quartiers habités <strong>et</strong> les<br />
nouveaux tissus ou les friches industrielles<br />
y sont par exemple traités séparément<br />
par le biais de dispositifs de proj<strong>et</strong>s<br />
distincts. Pour certaines zones de la ville<br />
(la zone du canal par exemple), il est<br />
nécessaire de penser le développement<br />
de façon globale, dans un périmètre élargi<br />
<strong>et</strong> incluant tous les paramètres <strong>et</strong> les<br />
enjeux sociaux, économiques, culturels,<br />
environnementaux, <strong>et</strong>c.<br />
Pourtant, certains proj<strong>et</strong>s de grande<br />
échelle sont en cours à Bruxelles.<br />
De quelle manière sont-ils menés ?<br />
Bm Étant donné qu’il n’existe pas de cadre<br />
de planification extrêmement bien défini,<br />
il faut s’en sortir à partir d’une approche<br />
qui est celle de la dimension locale. C’est la<br />
spécificité de l’urbanisme bruxellois :<br />
par exemple, pour envisager des transformations<br />
de grands sites ferroviaires,<br />
ou de grandes friches, on ne part pas<br />
d’une approche top down, mais bien d’une<br />
approche bottom up qui essaie de viser la<br />
grande échelle depuis un point de vue très<br />
local. Étant donné la multiplicité d’acteurs,<br />
on est obligés de partir d’éléments concr<strong>et</strong>s<br />
à un niveau local, pour aboutir au grand<br />
proj<strong>et</strong>. Le développement de Tour <strong>et</strong> Taxis<br />
est un exemple de c<strong>et</strong>te stratégie : c’est<br />
un site de 45 ha, avec un grand parc d’une<br />
quinzaine d’hectares. Le proj<strong>et</strong> a été justifié<br />
<strong>et</strong> accepté au regard des besoins locaux,<br />
<strong>et</strong> non sur la base d’arguments qui portaient<br />
sur l’équilibre global de la métropole en<br />
termes de besoins en <strong>espaces</strong> ouverts.<br />
Le site de Tour <strong>et</strong> Taxis appartient au<br />
secteur privé. Comment la Région<br />
parvient-elle à établir une collaboration<br />
public-privé ?<br />
Bm La Région établit les outils de<br />
planification, schémas directeurs <strong>et</strong> plans<br />
particuliers d’affectation du sol (PPAS),<br />
qui ont pour vocation de contrôler <strong>et</strong><br />
cadrer les développements. Ce sont aussi<br />
des messages adressés au secteur privé<br />
pour les inciter à faire des proj<strong>et</strong>s dans ces<br />
zones-là. En France ou aux Pays-Bas, les<br />
autorités publiques vont plus loin dans<br />
le contrôle du foncier, dans le développement<br />
du proj<strong>et</strong>, dans l’organisation<br />
des concours, y compris pour les proj<strong>et</strong>s<br />
du secteur privé.<br />
On place actuellement beaucoup<br />
d’espoir dans le PRDD (plan régional<br />
de Développement durable). Peut-on<br />
espérer qu’il induise un nouveau<br />
système de fabrication de la ville ?<br />
Bm Ces vingt dernières années, la Région a<br />
mis en place des outils, tels que le nouveau<br />
plan régional d’affectation du sol, les<br />
plans de mobilité régionaux Iris 1 <strong>et</strong> Iris 2,<br />
les politiques de logements, <strong>et</strong>c. Il est<br />
maintenant temps de rassembler ces<br />
outils dans un document d’ensemble qui<br />
aborde les différents thèmes de manière<br />
cohérente. Par exemple, les politiques<br />
d’aménagement du territoire <strong>et</strong> de mobilité<br />
font actuellement l’obj<strong>et</strong> de plans séparés.<br />
Il est impératif de superposer ces plans <strong>et</strong><br />
de voir comment on pourrait densifier<br />
certaines zones à partir d’une politique de<br />
mobilité axée sur les transports publics<br />
<strong>urbains</strong>. Le pôle de la gare de l’Ouest,<br />
inaugurée en 2009, illustre ce principe de<br />
fragmentation des outils. Il s’agit d’un des<br />
principaux pôles d’échange entre les<br />
différents modes de transports publics :<br />
métro, RER, tramway, bus… Le site<br />
est bordé par une friche d’une vingtaine<br />
d’hectares, pour laquelle il n’y a actuellement<br />
pas de proj<strong>et</strong> d’urbanisme concr<strong>et</strong>.<br />
La nouvelle accessibilité du site devrait<br />
être liée à un développement urbain qui<br />
utilise ce potentiel.<br />
On sait que la zone du canal est un enjeu<br />
important pour l’avenir de Bruxelles.<br />
Quels seraient les facteurs à m<strong>et</strong>tre<br />
en place pour réussir le développement<br />
de c<strong>et</strong>te zone ?<br />
Bm Si l’on regarde le proj<strong>et</strong> de l’île de<br />
Nantes, il est assez remarquable de<br />
voir comment le caractère industriel <strong>et</strong><br />
portuaire n’a pas été effacé mais mis à<br />
profit pour enrichir le proj<strong>et</strong> urbain. Tel<br />
est l’enjeu de la zone du canal : il faut tenir<br />
compte de l’identité industrielle dans sa<br />
transformation vers une économie tertiaire<br />
caractérisée par la présence de services<br />
<strong>et</strong> d’habitats. Cela n’induit pas forcément<br />
l’effacement de l’identité d’origine ou<br />
la disparition pure <strong>et</strong> simple des activités<br />
économiques. Je crois au contraire qu’il est<br />
possible de combiner les activités économiques<br />
portuaires <strong>et</strong> industrielles à une<br />
implantation progressive de logements,<br />
bureaux, commerces, nouveaux <strong>espaces</strong> <strong>et</strong><br />
équipements publics métropolitains. Mais<br />
bien sûr, pour cela il faut être inventif <strong>et</strong><br />
sortir de la logique de zonage fonctionnel<br />
horizontal à laquelle les mentalités bruxelloises<br />
se sont habituées.<br />
Le portage politique du proj<strong>et</strong> constitue<br />
un autre enjeu essentiel. À Bruxelles,<br />
les acteurs politiques éprouvent beaucoup<br />
de difficultés à s’identifier à des réalisations<br />
concrètes, car il existe toujours<br />
un risque d’échec, comme dans tous les<br />
proj<strong>et</strong>s d’urbanisme. Les acteurs politiques<br />
devraient au contraire s’identifier à ces<br />
vastes proj<strong>et</strong>s d’urbanisme, les assumer, les<br />
porter pour réellement en faire des proj<strong>et</strong>s<br />
de ville, voire des proj<strong>et</strong>s de métropole.<br />
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