Kunstbulletin März 2021
Unsere April Ausgabe 2021, mit Beiträgen zu Eva & Franco Mattes, Dias & Riedweg, Markus Weggenmann, David Knuckey, uvm.
Unsere April Ausgabe 2021, mit Beiträgen zu Eva & Franco Mattes, Dias & Riedweg, Markus Weggenmann, David Knuckey, uvm.
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les traits de crayons préliminaires, les taches. Parfois l’écrit devient sujet de la peinture<br />
et n’est pas héroïque comme chez Cy Twombly mais plutôt terre-à-terre (une<br />
plaque d’immatriculation ou un numéro de téléphone rose).<br />
Emblématique de sa démarche, sa relation avec une sculpture monumentale<br />
d’Henri Presset (Figure XII A, 1975), installée sur le quai du Mont-Blanc à Genève,<br />
a connu plusieurs développements. Fréquentant cette statue quotidiennement lors<br />
des promenades avec son chien, David Knuckey se met à l’apprécier, à la photographier.<br />
De dos, elle devient un motif pour une longue série de peintures, plus de vingt<br />
toiles dont émergeront une petite série de trois. L’édition réalisée pour l’exposition<br />
de la salle Crosnier reprend deux photographies de cette sculpture réalisées au portable,<br />
un peu de guingois, un relevé vite fait. Déclinées en série, témoignant du mode<br />
de réflexion de l’artiste, elles sont complétées par des dessins – tags, formes, gribouillages<br />
– réalisés directement sur son téléphone.<br />
Traces, confort et sueur<br />
Dans un autre aspect de sa pratique, David Knuckey explore les potentialités physiques<br />
des matériaux, leurs effets, leurs combinaisons et leurs transformations. Objets<br />
sculpturaux, tenant du tableau 2D en expansion, ces volumes sont assez monumentaux<br />
(1,5–2 m) ; appuyés au mur ou couchés au sol, ils sont à la fois massifs et<br />
témoignent d’une certaine fragilité. Revisitant la tradition du shaped canvas, l’artiste<br />
réalise volontiers des formes trouées, où une ou plusieurs dépressions affectent la<br />
surface. Châssis ou structures en carton, parfois augmentées d’une couche de ouate,<br />
sont ainsi tendus de simili cuir, puis trempés dans de la résine transparente. Quand<br />
celle-ci est sèche, l’artiste choisit de laisser tout ou partie de la bâche ayant servi au<br />
processus, ou non. Au cours des manipulations, la résine craquelle ou fuit, des plis se<br />
forment, des bulles apparaissent – l’artiste joue avec ces accidents, les interprète, les<br />
provoque parfois tout en ne souhaitant pas les maîtriser intégralement.<br />
Imposantes, certaines de ces pièces intriguent par leur physicalité ainsi que par<br />
une certaine sensualité – rapport sans doute à leurs courbes, leurs plis, au moelleux<br />
évoquant un canapé en cuir, et bien sûr à la texture même du simili cuir, souvent<br />
noir, qui appelle l’imaginaire fétichiste. Comme l’humour et la dérision, le corps n’est<br />
jamais loin dans les œuvres de David Knuckey, qu’il s’agisse de l’univers du sport<br />
ou de la sexualité – talc, latex ou couleur chair apparaissent aussi régulièrement et<br />
contribuent à connoter l’atmosphère générale du travail. Cette impression est toutefois<br />
largement contrebalancée par des formes souvent sèches, parfois presque de<br />
l’ordre du chantier de construction, formats en planches allongées ou en tasseaux.<br />
Soufflant le chaud et le froid, peu bavardes mais foisonnantes de détails, les pièces<br />
de David Knuckey captivent et déstabilisent pour autant que l’on s’y attarde un peu.<br />
Isaline Vuille, historienne d’art et commissaire d’expositions. isalinevuille@gmail.com<br />
→ ‹David Knuckey›, Salle Crosnier, Genève, 5.3.–3.4.<br />
↗ www.societedesarts.ch<br />
FOKUS // DAVID KNUCKEY<br />
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