september-2011
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n’est-il pas ironique, pour un projet baptisé<br />
Silencio, de générer un tel buzz, sur le web et ailleurs ?<br />
Depuis des mois, cinéphiles et blogueurs guettent,<br />
fébriles, la moindre information susceptible de nourrir<br />
leurs fantasmes (souvent erronés) sur ce fameux club<br />
inspiré par David Lynch, qui devrait ouvrir bientôt à Paris.<br />
Forcément, devant un tel phénomène, l’heureux invité<br />
qui découvre en avant-première ce lieu mystérieux (dont<br />
le nom sibyllin est fi nalement le seul emprunt au club du<br />
« David Lynch a conçu la<br />
scénographie générale à<br />
partir d’un plan en 3D »<br />
Photography: Alexandre Guirkinger<br />
thriller psychologique Mulholland Drive) s’attend au pire :<br />
un club prétentieux, échouant magistralement à recréer<br />
l’attrait étrange de Twin Peaks ou Blue Velvet.<br />
Craintes balayées à la vue du jovial duo composé du<br />
propriétaire Arnaud Frisch, 37 ans (aussi directeur du<br />
label techno new wave Savoir-Faire), et du designer<br />
Raphaël Navot, 34 ans. Les deux hommes ont mis<br />
tout leur cœur dans ce projet ambitieux (budget :<br />
3,3 millions d’euros), à un moment où nombreux sont<br />
ceux qui sonnent le glas des nuits parisiennes.<br />
Dans ce labyrinthe de pièces aux ambiances aussi<br />
distinctes que les scènes d’un fi lm (salle de concert/danse,<br />
bibliothèque d’art ou cinéma 24 places, dans une déco<br />
théâtrale de rouge, de noir et d’or), le visiteur remarque<br />
quelques clins d’œil « lynchiens » : forêt surréaliste (un<br />
fumoir), miroirs dont les illusions optiques confèrent au<br />
lieu une atmosphère rêveuse un peu voyeuse ou cette<br />
gravure du maître reprise dans le motif de la moquette.<br />
Comme souvent dans les fi lms de Lynch, l’époque<br />
est incertaine. « J’aime décrire le style comme “futur<br />
nostalgique” », explique le designer israélien. En a-t-il profi té<br />
pour placer ses pions en vue d’une future collaboration<br />
au cinéma ? Sa voix douce éclate pour l’occasion d’un rire<br />
sonore : « J’adorerais ! Au moins on n’y passerait pas trois<br />
ans et il n’y aurait pas à composer avec la réalité ! »<br />
La réalité, pour le Silencio, fut surtout le passé de<br />
ce 142 rue Montmartre dans le sous-sol duquel le<br />
club a élu domicile, juste en dessous du Social Club,<br />
autre établissement de Frisch. C’est de cette ancienne<br />
imprimerie que sortit en 1898, le J’accuse de Zola à<br />
la une du journal L’Aurore. Le chantier fut intense<br />
avec un gros travail d’excavation avant de pouvoir<br />
commencer à y transposer la vision de Lynch.<br />
« Lynch a conçu la scénographie générale à partir d’un<br />
plan en 3D de l’espace. Je l’ai ensuite interprétée en une<br />
réalité physique. Plusieurs esquisses ont été échangées<br />
dans le plus grand secret. À partir de cela, j’ai travaillé avec<br />
de nombreux architectes et artisans pour voir ce qui était<br />
réalisable. Il y a eu des milliers d’ e-mails, des centaines de<br />
réunions. Nous sommes allés à LA ou Lynch venait à Paris.