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Politique<br />
“<br />
‘Schengen’<br />
aura eu pour effet de<br />
rendre l’accès plus difficile<br />
àl’Union européenne<br />
”<br />
Pour finir, pour parer à d’éventuelles situations<br />
de crise telles que celle que nous<br />
connaissons actuellement, la convention de<br />
Schengen prévoit une suspension temporaire<br />
de la libre circulation, mesure adoptée par<br />
plusieurs pays ces dernières semaines. Inutile<br />
donc de dire que les populistes livrent un faux<br />
procès d’intention aux artisans de cet accord<br />
majeur en Europe, «envié dans le monde<br />
entier», pour reprendre les termes exacts<br />
émis par Jean Asselborn, ministre des Affaires<br />
étrangères, lors de la conférence European<br />
Migration Network (EMN) 2015, qui s’est<br />
tenue à Esch/Belval le 7 octobre dernier.<br />
Pour autant, le «système» Schengen a ses<br />
limites. Selon Laurent Muschel, directeur à<br />
l’immigration et à l’asile à la direction générale<br />
des Affaires intérieures de la Commission<br />
européenne, «Si le système ne fonctionne<br />
plus, c’est parce qu’il est sous pression, et<br />
que la question de confiance (NDLR: entre<br />
Etats membres) se pose», avant d’ajouter<br />
que «Cette question de confiance il ne faut<br />
pas la reconstruire, il faut la construire».<br />
Eugenio Ambrosi, directeur régional de<br />
l’Organisation internationale pour les migrations,<br />
ne dit rien d’autre lorsqu’il affirme que<br />
«Les mécanismes et les politiques menées<br />
jusqu’à présent en matière d’immigration<br />
présentent une série de lacunes auxquelles<br />
on ne peut remédier que par un retour aux<br />
principes fondamentaux de l’UE: la responsabilité<br />
et la solidarité entre Etats membres».<br />
Et c’est là le nœud du problème. Comme très<br />
souvent, l’UE est incapable de faire bloc<br />
autour d’une problématique de taille qui se<br />
présente à elle, avec pour conséquence une<br />
cacophonie généralisée qui, à chaque fois,<br />
fragilise et remet en cause la laborieuse<br />
construction européenne, tout en portant le<br />
discrédit sur les valeurs que l’UE est sensée<br />
véhiculer.<br />
Dans la gestion de cette crise migratoire,<br />
tout le monde est «coupable». Les Etats<br />
membres sont tous coupables d’avoir laissé<br />
l’Italie et la Grèce, portes d’entrées de l’UE, à<br />
leur propre sort. L’Allemagne est coupable,<br />
pour des intérêts purement personnels,<br />
d’avoir créé un appel d’air… avant de se<br />
raviser, dépassée par les événements. Enfin,<br />
les pays de l’Est sont coupables d’avoir fait la<br />
sourde oreille vis-à-vis des demandes de ses<br />
partenaires européens.<br />
Pourtant, même si endiguer un flux massif<br />
de personnes fuyant la guerre et la misère est<br />
chose difficile, des solutions existent.<br />
Comme le souligne Laurent Muschel,<br />
il convient de s’attaquer frontalement au<br />
problème du trafic d’êtres humains, le cœur<br />
du problème, à travers différentes mesures<br />
telles que l’établissement d’une liste de navires<br />
suspects et la mise en place d’une coopération<br />
étroite avec les grands acteurs<br />
d’Internet, notamment. De surcroît, toujours<br />
selon lui, il faut soutenir activement l’Italie et<br />
la Grèce, envoyer des officiers de liaison dans<br />
les pays de transit, renforcer le dispositif<br />
Frontex et le Système d’information<br />
Schengen tout comme la pression sur les<br />
pays tiers.<br />
Aussi, supprimer «Schengen», l’un des trois<br />
piliers en matière de régulation des frontières<br />
avec Frontex et la politique européenne de<br />
voisinage (PEV), c’est se priver de certains<br />
outils et mécanismes clés de régulation des<br />
frontières de l’UE. Autant dire une aberration.<br />
PhR<br />
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<strong>LG</strong> - Novembre 2015