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Le livre de Georges Demartial au format PDF (Acrobat Reader)

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<strong>Georges</strong> <strong>Demartial</strong>, <strong>Le</strong> mythe <strong>de</strong>s guerres <strong>de</strong> légitime défense (1931) 53<br />

« Ce qui caractérise la guerre <strong>de</strong> 1914, ce n'est pas tant son étendue ; les<br />

guerres <strong>de</strong> coalition du XVIII e siècle, les guerres napoléonniennes ont mis<br />

<strong>au</strong>tant et plus d’États en ligne, et on se battit alors plus loin encore, jusques<br />

dans le Nouve<strong>au</strong>-Mon<strong>de</strong>. Ce n'est pas non plus la quantité <strong>de</strong> sang versé ; les<br />

dix mille victimes d'une petite guerre sont <strong>au</strong>tant à plaindre que les dix<br />

millions d'une gran<strong>de</strong>. Ce n'est pas non plus son atrocité ; les guerres où on<br />

passait régulièrement les prisonniers <strong>au</strong> fil <strong>de</strong> l'épée et les villes <strong>au</strong> pillage<br />

étaient plus atroces encore. Non, ce qui fait <strong>au</strong>x guerres <strong>de</strong> 1914-1918 une<br />

place à part dans l'histoire <strong>de</strong>s folies humaines, c'est le cynisme et la facilité<br />

avec lesquels les gouvernements ont fait accepter la guerre par les peuples en<br />

jouant <strong>de</strong> la légitime défense. Théoriquement maîtresses du droit <strong>de</strong> guerre<br />

puisque l'argent pour la faire ne peut être voté que par leurs députés, les<br />

masses sont en fait, sur cette question vitale entre toutes, esclaves <strong>de</strong>s gouvernements<br />

qui, pour obtenir cet argent, n'ont qu'à se présenter comme victimes<br />

d'une agression <strong>de</strong> l'adversaire. Qui pourrait contredire les gouvernements,<br />

puisque seuls ils disposent <strong>de</strong>s moyens d'in<strong>format</strong>ion et mettent la presse dans<br />

leur poche, puisque leur ordre <strong>de</strong> mobilisation n'admet pas <strong>de</strong> réplique,<br />

puisqu'ils ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt les crédits <strong>de</strong> guerre <strong>au</strong>x parlements que lorsque la<br />

guerre est déjà engagée ? Chaque gouvernement qui joue <strong>de</strong> l'argument <strong>de</strong> la<br />

guerre défensive fait ainsi <strong>de</strong>ux victimes : le peuple adverse qu'il accuse à tort,<br />

le sien qu'il trompe. Que <strong>de</strong>vient alors, ô peuples, notre prétendue souveraineté<br />

? Que signifient toutes les phrases sur la liberté, la démocratie, dont on<br />

nous assourdit, s'il suffit <strong>de</strong> la volonté d'un Ministre éphémère pour nous<br />

envoyer à la mort la plus injurieuse, celle <strong>de</strong> l'homme qui croit sacrifier sa vie<br />

à une c<strong>au</strong>se et qui tombe pour une <strong>au</strong>tre, quand ce n'est pas celle <strong>de</strong> l'homme<br />

qui sait qu'on le trompe et qui doit tomber tout <strong>de</strong> même. Dix millions sont<br />

tombés ainsi.<br />

Or, après dix années <strong>de</strong> palabres contre la guerre, que nous proposent les<br />

gouvernements pour nous en préserver ? De ne faire la guerre que s'ils sont<br />

attaqués. Vit-on jamais dérision plus cruelle ! Comprenons donc enfin que la<br />

véritable protection contre le flé<strong>au</strong> <strong>de</strong> la guerre est en nous. On ne cesse <strong>de</strong><br />

nous flagorner en nous disant que nous sommes les maîtres. Eh bien, montrons<br />

qu'effectivement nous le sommes. Dans chaque pays, ne votons <strong>au</strong>x<br />

prochaines élections que pour les candidats qui s'engageront à introduire dans<br />

la Constitution cet article : La mobilisation ne peut être ordonnée qu'après un<br />

vote <strong>au</strong> suffrage universel, signé, et à la majorité <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux tiers ».<br />

Qu'y <strong>au</strong>rait-il à répondre ? L'Assemblée Constituante française proclama,<br />

le 22 mai 1790, que le droit <strong>de</strong> guerre appartenait à la nation, non <strong>au</strong> roi. Dans<br />

son Essai sur la paix perpétuelle, cinq ans après, Kant estimait que si tous les<br />

peuples étaient en république, il n'y <strong>au</strong>rait plus <strong>de</strong> guerre, car « chaque citoyen<br />

<strong>de</strong>vrait concourir, par son assentiment, à déci<strong>de</strong>r si l'on fera la guerre ou non,<br />

et <strong>au</strong>cun n'irait <strong>de</strong> propos délibéré s'en infliger la charge et les souffrances ».<br />

Or jamais <strong>au</strong>cun peuple, en république ou non, n'a été appelé à voter une

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