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Le livre de Georges Demartial au format PDF (Acrobat Reader)

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<strong>Georges</strong> <strong>Demartial</strong>, <strong>Le</strong> mythe <strong>de</strong>s guerres <strong>de</strong> légitime défense (1931) 8<br />

tel <strong>au</strong>tre. La difficulté est encore plus gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> savoir quel État a politiquement<br />

provoqué la guerre, c'est-à-dire lequel <strong>au</strong>rait dû s'incliner <strong>de</strong>vant les<br />

prétentions <strong>de</strong> l'<strong>au</strong>tre, chacun pouvant avoir, <strong>au</strong> point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> ses intérêts,<br />

une excellente raison <strong>de</strong> ne pas cé<strong>de</strong>r. En fait, si on excepte les expéditions<br />

coloniales, on peut se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r s'il n'y a jamais eu, dans les temps mo<strong>de</strong>rnes,<br />

une guerre entre États indépendants dont on ait pu dire qu'elle était purement<br />

défensive, comme celle que Rabelais, dans son Gargantua, fait soutenir par<br />

Grandgousier contre Pichrocole. Mais il a fallu précisément qu'il l'imagine.<br />

Je dis dans les temps mo<strong>de</strong>rnes par pru<strong>de</strong>nce. Dans un article du vaillant<br />

hebdomadaire américain Unity (28 mai 1928), j'ai lu qu'en 1815 un citoyen <strong>de</strong><br />

ce pays, Noah Worcester, qui pensait que seule la guerre défensive peut se<br />

concilier avec les principes du christianisme, fit une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s c<strong>au</strong>ses <strong>de</strong>s<br />

guerres principales <strong>de</strong>puis Constantin, afin <strong>de</strong> voir combien remplissaient<br />

cette condition ; il trouva que sur <strong>de</strong>ux-cent-quatre vingt six guerres, <strong>au</strong>cune<br />

n'était vraiment défensive.<br />

Pour qu'on pût parler <strong>de</strong> guerres agressives et <strong>de</strong> guerres défensives, il<br />

f<strong>au</strong>drait admettre comme un principe hors <strong>de</strong> discussion que l'État qui déclare<br />

une guerre est toujours l'agresseur <strong>de</strong> celui <strong>au</strong>quel il la déclare, et qui serait,<br />

lui, toujours innocent par définition. Mais l'iniquité d'un pareil régime l'a<br />

toujours fait repousser. On lit dans la Gran<strong>de</strong> Encyclopédie, à l'article<br />

Guerre : « Au point <strong>de</strong> vue du droit, la guerre offensive est celle qui est<br />

soutenue par le parti dont les agissements l'ont provoquée et rendue inévitable,<br />

alors même qu'il n'<strong>au</strong>rait pas accompli les premiers actes d'hostilité ». <strong>Le</strong>s<br />

diplomates, les gouvernements, ne pensent pas <strong>au</strong>tre- ment. Dans le traité du<br />

1 er novembre 1902 par lequel la France et l'Italie se garantissaient mutuellement<br />

leur neutralité, la garantie était étendue <strong>au</strong> cas « où l'une d'elles se<br />

trouverait réduite, par suite d'une provocation directe, à prendre l'initiative<br />

d'une déclaration <strong>de</strong> guerre ». Qu'est-ce à dire, sinon que le véritable agresseur<br />

peut très bien être un État qui se fait déclarer la guerre ? Par là même on<br />

reconnaît l'impossibilité <strong>de</strong> distinguer les guerres agressives et les guerres<br />

défensives. Car si l’État qui en a provoqué un <strong>au</strong>tre à l'attaquer est le véritable<br />

agresseur, il reste cependant l'attaqué <strong>de</strong> fait, il est à la fois agresseur et<br />

attaqué, <strong>de</strong> même que son adversaire, bien qu'ayant été provoqué à la guerre,<br />

n'en restera pas moins l'agresseur <strong>de</strong> fait, et sera lui <strong>au</strong>ssi à la fois attaqué et<br />

agresseur.<br />

Observons enfin, et c'est <strong>de</strong> première importance, que l'agression suppose<br />

la clan<strong>de</strong>stinité <strong>de</strong> la préparation chez l'agresseur, la surprise et l'absence <strong>de</strong><br />

toute raison <strong>de</strong> se battre chez l'attaqué. Or, ces conditions sont toujours<br />

absentes d'une guerre mo<strong>de</strong>rne. Où a-t-on vu un gouvernement s'endormir le<br />

soir dans une paix profon<strong>de</strong>, et apprendre en se réveillant qu'il est attaqué par<br />

un <strong>au</strong>tre ? La véritable agression n'existe pas d'État à État. C'est pourquoi,<br />

parlant du droit <strong>de</strong> la guerre, Voltaire a eu raison <strong>de</strong> dire : « Il n'y a certaine-

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