LES MAFIAS MILITAIRES DU KREMLIN

et des dizaines de milliers de gens qui exercent cette activité à leurs risques et périls
dans la rue).
L’extrémisme étrange du Kremlin se manifeste également dans le fait que, pour la
première fois depuis 1987, les représentants de la Croix-Rouge internationale n’ont pas
été admis auprès des partisans du Soviet Suprême arrêtés au terme du putsch d’octobre
1993.
— Quel prix accorde-t-on à la vie humaine en Russie ?
— Aujourd’hui, elle vaut moins que jamais, et elle s’abrège même considérablement
: un garçon né en 1993 a une espérance de vie égale à 59 ans, en raison surtout de l’aggravation
des conditions socio-économiques et écologiques. Et la vodka moins chère que
la viande ne fait qu’augmenter le nombre des alcooliques.
Il est apparu en novembre 1993 que 2 000 tonnes d’alcool technique, toxique, ont
été introduites en Russie sous le label du Royal allemand (alcool à 96°). Les étiquettes
et les bouteilles sont les bonnes, mais il suffit d’absorber une petite dose du contenu
pour devenir aveugle ou passer de vie à trépas. Il va de soi que la milice ne peut rien faire
contre ceux qui, dans les ateliers clandestins, vont diluer cet alcool et le verser dans des
bouteilles de vodka aux étiquettes prestigieuses.
En 1993, la population de Russie a diminué de 670 000 personnes.
Un Russe sur dix (il s’agit de la population active) est désormais un chômeur en
puissance. Et une étude réalisée dans 43 grandes entreprises d’Ekaterinbourg a montré
que sur 110 000 ouvriers et employés, la moitié a été contrainte, en 1993, de prendre
un congé forcé ou de travailler à mi-temps (Troud, 6 janvier 1994).
Les autorités ont « oublié », sur une bonne moitié du territoire de Russie, les centaines
de milliers de familles qui vivaient et travaillaient dans les rudes conditions du
Grand Nord et qui se sont retrouvées dans la misère en un tournemain. Ceux qui,
durant des années, avaient économisé pour rentrer sur le « continent », ne peuvent plus
même s’acheter un billet d’avion ou un conteneur.
— Comment 18 000 tonnes d’or ont-elles été dilapidées ?
— En 1953, l’URSS avait employé 5,2 tonnes d’or pour les « besoins de l’économie
nationale », et 130 tonnes en 1990. L’or est allé, à vil prix, entre les mains des entreprises
du complexe militaro-industriel qui l’ont dilapidé ou simplement volé.
En 1990, on avait en outre vendu à l’étranger 475 tonnes d’or à 7 $ le gramme (alors
que le prix mondial était de 12-13 $) ; 245 tonnes en 1989 et 319 tonnes en 1991, toujours
à bas prix.
Rien que sous Gorbatchev, notre État a perdu entre 20 et 30 milliards de dollars en
cassant les prix de l’or, alors qu’à l’époque de ce même Gorbatchev, la dette extérieure
de l’URSS est passée de 20 à 80 milliards de dollars.
Au total, sous le pouvoir soviétique, les caves de l’État ont vu passer 18 000 tonnes
d’or, dont une grande partie fut extraite par les détenus dans les vallées de la Kolyma et
de la Lena. Fin 1991, la réserve d’État de l’URSS n’était plus que de… 240 tonnes.
— Peut-on mettre en circulation des valeurs dont le montant global s’élève à 150 milliards
de dollars ?
— La série récente d’assassinats de banquiers russes a été qualifiée par le journal
Obchtchaa gazéta (24 décembre 1993) comme une tentative d’effacer les traces d’un
aime immense.
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