LES MAFIAS MILITAIRES DU KREMLIN
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En 1992, il y avait encore dans l’active un peu moins de 6 000<br />
généraux, après toutes les grandes réductions d’effectifs…, et, parmi eux,<br />
assez peu de généraux honnêtes et intelligents. Pour mémoire, le général<br />
P. Grigorenko, défenseur des droits de l’homme, fut enfermé dans un<br />
hôpital psychiatrique. (Il y a eu et il y a par contre des colonels sensés,<br />
comme l’espion O. Penkovski que le GRU brûla vivant dans un four crématoire<br />
et qui, dit-on aujourd’hui, sauva notre pays.) Autre nom à citer :<br />
le général D. Volkogonov, conseiller militaire du président Eltsine, qui,<br />
lors du dernier congrès du PCUS au Kremlin, proposa de s’engager dans<br />
la voie de la social-démocratie. On le chassa à grands cris de la tribune. En<br />
1993, dans une interview à Fédératsia (n° 51), Volkogonov déplorait le<br />
degré de militarisation de l’URSS : « Cette redoutable armada offensive<br />
aurait existé pour assurer l’édification pacifique de notre avenir radieux ?<br />
Nous avions extrait assez d’uranium pour alimenter durant des décennies<br />
toutes les centrales nucléaires du globe. Pourquoi ? Pendant ce temps, le<br />
pays mangeait des dizaines de milliards de pétrodollars, dépensait ses<br />
réserves stratégiques avec une incroyable légèreté et pillait en fait nos<br />
descendants. »<br />
Volkogonov évoque dans ce même entretien ce qui est à ses yeux le<br />
principal problème de l’armée. En 1991 l’armée soviétique avait obtenu 41<br />
000 logements pour les militaires. En 1992, l’armée russe réduite d’un<br />
tiers en obtint 61 000. Or il en faudrait au minimum 200 000 autres pour<br />
les familles des militaires.<br />
L’absence d’armée — bien sûr, hypothétique dans le cas de la Russie —<br />
serait beaucoup moins dangereuse que le rôle déstabilisateur joué par les<br />
actuelles structures hypertrophiées, par ailleurs entranées dans la politique<br />
de « coups fourrés ». Les généraux et amiraux irresponsables qui,<br />
jusqu’à octobre 1993, faisaient scintiller leurs galons dorés dans dix-huit<br />
sièges au parlement de Russie, avaient obligé Eltsine… à racheter à<br />
l’Ukraine la flotte de la mer Noire avec toutes ses bases de Crimée.<br />
Qu’avons-nous besoin de ses gros bâtiments dont l’entrée en<br />
Méditerranée dépend de l’autorisation de la Turquie ? Peut-être nous faudra-t-il<br />
aussi combattre l’Ukraine pour la Crimée ? Selon les renseignements<br />
américains (Spiegel, n° 36, 1992), une telle guerre entre deux États<br />
puissants nés de l’URSS coûterait 200 000 morts et jetterait sur les routes<br />
près de dix millions de réfugiés. Sans compter 40 millions de personnes<br />
touchées par la famine et deux millions d’autres victimes des épidémies.<br />
La démence d’une partie de l’establishment militaire et politique s’est<br />
également manifestée dans les attaques contre le projet de Fondements de<br />
la politique de défense de la Fédération de Russie, dont les idées sont<br />
entièrement attribués à Kokochine. Il est loin d’être une « colombe »,<br />
mais il s’est néanmoins attiré les foudres du « parti de la guerre »<br />
(Litératournaa Rossia, 11 décembre 1992) en invitant à limiter par voie<br />
législative à 2 ou 3 % du PNB la part du budget militaire, à exercer un contrôle<br />
civil sur la sphère militaire et à créer un ministère civil de la Défense.<br />
Si Kokochine avait aussi osé proposer aux responsables des ministères de<br />
la Défense, de la Sécurité et de l’Intérieur de retirer les centaines de mil-<br />
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