LES MAFIAS MILITAIRES DU KREMLIN
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venus de toute la CEI. La première assemblée, une année plus tôt, avait<br />
failli s’achever par l’exigence de la démission du maréchal Chapochnikov,<br />
alors ministre de la Défense. En janvier 1992, l’armée faisait « front<br />
unique » et mettait sérieusement en garde les autorités : « Si vous détruisez<br />
l’armée, vous devez vous attendre à de grands désagréments. »<br />
Aujourd’hui, en 1994, l’effervescence dans une armée mécontente de sa<br />
situation matérielle, de l’absence de logements, des nombreuses mises à la<br />
retraite et du retour des troupes de l’étranger dans des régions de Russie mal<br />
aménagées, apparat bien plus dangereuse que la rapine et la corruption<br />
généralisées, la violence et le crime devenus banals parmi les militaires.<br />
Savez-vous ce qu’est une armée pauvre, où l’on ne paie pratiquement<br />
pas les militaires ? Voyons-en le résultat en prenant pour exemple le<br />
Caucase où régnent anarchie et arbitraire. Le génocide de la population<br />
civile, organisé à l’avantage de nombreux hommes d’affaires véreux de<br />
Moscou et de cette région, est mené à bien par des soldats russes et avec des<br />
armes russes. Les combattants autochtones manquent tout bonnement de<br />
professionnels pour manier un matériel sophistiqué. Sur les deux flancs de<br />
la Grande chane du Caucase, ce sont aujourd’hui des officiers russes mercenaires<br />
qui se battent les uns contre les autres et contre les habitants,<br />
moyennant une rétribution importante (selon nos critères).<br />
Peu avant la mutinerie armée à Moscou, le Commerçant daily (19 août<br />
1993) mettait en garde par la bouche du colonel général Valéri Mironov,<br />
vice-ministre de la Défense, contre une « catastrophe imminente ». En<br />
février 1993 a été adoptée une loi « Sur le statut des militaires » qui n’a pas<br />
fait l’objet du moindre financement. D’après les calculs du ministère de la<br />
Défense, le ministère des Finances devait quelque chose comme 2 000<br />
milliards de roubles à l’armée (soit 2 milliards de dollars à l’époque). Or,<br />
les avantages suivants avaient été promis : « Un militaire ne peut pas être<br />
démobilisé sans avoir droit à un logement conforme aux normes requises<br />
» (non appliqué) ; « en cas de démobilisation, il sera versé une allocation<br />
exceptionnelle allant de 5 à 20 soldes en fonction de la durée du service »<br />
(cette clause n’a commencé à être appliquée qu’après le 4 octobre 1993,<br />
au lendemain du putsch raté) ; « une prime de congé annuelle » (non<br />
appliqué) ; l’attribution de parcelles de 0,10 à 0,25 ha en propriété » (réalisé<br />
partiellement).<br />
Les officiers restent des mois sans toucher leur solde ; plus de 70 % des<br />
avantages prévus par la loi précitée ne sont toujours pas accordés ; les militaires<br />
de carrière n’ont nulle part où se soigner, se reposer, vivre, trouver<br />
du travail pour les membres de leur famille, pas de place non plus pour<br />
leurs enfants dans les garderies et les crèches, dit Mironov. Quelles que<br />
soient les affirmations des démocrates au sujet du niveau de vie après leur<br />
arrivée au pouvoir, il est flagrant que le pouvoir d’achat de la population<br />
(salaires, pensions de retraite, épargne) a brutalement chuté. Mais si l’on<br />
peut faire omission du Russe moyen, il est plus difficile de se débarrasser<br />
des militaires. Ils ne comprennent guère la plaisanterie car, il y a dix ans à<br />
peine, ils faisaient encore partie des couches moyennes et même éli-taires<br />
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