23.04.2014 Views

Luxembourg - Entreprises magazine

Luxembourg - Entreprises magazine

Luxembourg - Entreprises magazine

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

amenagement du territoire<br />

Coûts et gains du tourisme<br />

à la pompe<br />

Si le maintien des accises sur le carburant à un niveau plancher permet de remplir les caisses de<br />

l’Etat, cela n’est pas sans impact sur le taux d’émissions de CO2 du <strong>Luxembourg</strong>.<br />

Le tourisme à la pompe est une<br />

réalité bien ancrée au Grand-Duché<br />

et alentours. Cette réalité est<br />

lucrative pour l’Etat luxembourgeois<br />

si l’on en croit les chiffres<br />

avancés, que ceux-ci proviennent<br />

du Mouvement Ecologique ou<br />

du groupement pétrolier luxembourgeois.<br />

Ce dernier évalue en<br />

effet les recettes des taxes sur les<br />

carburants à 1,05 milliard EUR. En<br />

outre, selon le site du ministère<br />

du Développement durable et des<br />

Infrastructures, 75 % du carburant<br />

vendu au <strong>Luxembourg</strong> serait exporté.<br />

Une estimation qui ne rendrait<br />

pas compte de la réalité. Selon<br />

plusieurs observateurs, l’exportation,<br />

donc la consommation de<br />

carburant par des non-résidents,<br />

serait bien supérieure.<br />

Cette situation est la conséquence<br />

de l’exploitation par l’Etat<br />

luxembourgeois d’une niche fiscale.<br />

Le <strong>Luxembourg</strong>, en effet, maintient<br />

les accises sur le carburant à un<br />

prix plancher, et son taux de TVA<br />

(15 %) reste inférieur à celui des<br />

pays avoisinants. « On estime que le<br />

tourisme à la pompe, en ce compris<br />

l’approvisionnement en carburant<br />

et les ventes annexes comme le<br />

tabac et l’alcool, générerait des<br />

recettes fiscales à hauteur de<br />

1,3 milliard EUR », explique Paul<br />

Polfer, vice-président du Mouvement<br />

Ecologique et coordinateur<br />

national du réseau communal Klima-Bündnis.<br />

« On peut comprendre<br />

dès lors pourquoi le gouvernement<br />

ne souhaite pas abandonner le<br />

système actuel, surtout en temps<br />

de restrictions budgétaires. » Et<br />

ce, malgré les pressions exercées<br />

par les pays voisins, qui voient leur<br />

échapper une importante manne<br />

fiscale.<br />

A leurs complaintes s’ajoutent<br />

aussi des revendications<br />

d’ordre. « Il y a un réel décalage<br />

entre le discours qui veut promouvoir<br />

les transports en commun et<br />

une mobilité plus durable, et la<br />

réalité économique », poursuit<br />

Paul Polfer. « En maintenant des<br />

accises au niveau plancher sur le<br />

carburant, les autorités incitent les<br />

personnes, résidents ou frontaliers,<br />

non seulement à préférer l’usage<br />

de la voiture personnelle, mais également<br />

à acheter des véhicules qui<br />

consomment plus. Les transporteurs<br />

sont incités à faire des détours de<br />

plusieurs dizaines, voire centaines<br />

de kilomètres, pour remplir leurs<br />

réservoirs au <strong>Luxembourg</strong>. Pire, ce<br />

système a pour effet d’encourager<br />

le fret routier aux dépens d’un<br />

transport de marchandises plus écologique,<br />

avec l’encombrement sur<br />

les axes routiers que la présence<br />

des camions peut engendrer. »<br />

Paul Polfer, vice-président du Mouvement<br />

Ecologique et coordinateur<br />

national du réseau communal Klima-<br />

Bündnis.<br />

Photo-Talk2u<br />

Un coût environnemental<br />

non négligeable<br />

C’est le fret routier qui pèse lourdement<br />

dans la balance, et de tout<br />

son tonnage dans les émissions<br />

de CO2 du Grand-Duché. Car, si<br />

le tourisme à la pompe permet de<br />

remplir efficacement les caisses de<br />

l’Etat, il a un coût environnemental<br />

indéniable. « En effet, le transport,<br />

au <strong>Luxembourg</strong>, pèse pour plus<br />

de 40 % dans les émissions de<br />

CO2 comptabilisées au <strong>Luxembourg</strong><br />

», assure Paul Polfer. « A tel<br />

point que le <strong>Luxembourg</strong> n’atteint<br />

pas les objectifs de réduction des<br />

émissions de CO2 qu’il s’était fixés<br />

et qu’il doit désormais acheter<br />

des certificats d’émissions pour<br />

compenser le surplus engendré<br />

notamment par le tourisme à la<br />

pompe. Mais le coût de la tonne de<br />

CO2 sur le marché des émissions<br />

est si faible que le <strong>Luxembourg</strong> est<br />

toujours, de loin, financièrement<br />

gagnant. »<br />

Alors qu’il s’était fixé, au<br />

début des années 90, l’objectif de<br />

réduire de 28 % ses émissions de<br />

CO2, le <strong>Luxembourg</strong> n’est parvenu<br />

à n’en économiser qu’environ 8 %.<br />

« L’Etat comptait sur une réduction<br />

substantielle des émissions au niveau<br />

de la sidérurgie, qui prévoyait<br />

de remplacer ses hauts-fourneaux<br />

traditionnels par de nouveaux modèles<br />

fonctionnant à l’électricité.<br />

Celle-ci, achetée aux producteurs<br />

en dehors de <strong>Luxembourg</strong>, n’est<br />

pas comptabilisée dans les émissions<br />

du pays. Malheureusement,<br />

c’est le développement impressionnant<br />

du tourisme à la pompe,<br />

par le maintien d’accises faibles,<br />

qui a eu pour effet de contrebalancer<br />

négativement le gain d’émissions<br />

comptabilisées enregistré<br />

au niveau de l’industrie », conclut<br />

Paul Polfer. <br />

Sébastien Lambotte<br />

64

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!