L'appétit d'un géant - ccifc
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Actualité juridique<br />
La première loi chinoise sur la propriété privée<br />
Par Aurélie Manet, Avocat à la Cour, cabinet DS Avocats<br />
La Chine s’est dotée le 16 mars 2007 (entrée en vigueur le 1er octobre 2007) d’une loi visant à<br />
mettre en œuvre le droit à la propriété privée, inscrite en 2004 dans la Constitution chinoise.<br />
Cette loi était en gestation depuis 1993.<br />
Les droits de propriété privée détenus par les citoyens chinois<br />
ou étrangers sont désormais placés sur un pied d’égalité avec<br />
ceux appartenant à l’Etat et la loi garantit leur protection.<br />
Toutefois, la propriété publique continue à jouer un rôle<br />
prépondérant dans le système économique chinois et on<br />
constate une survivance de cette notion floue de propriété<br />
collective.<br />
La loi établit que le terme « droit réel » renvoie aux droits<br />
suivants : droit de propriété, droit d’usage, sûretés réelles,<br />
possession.<br />
1. Droit de propriété – Le détenteur d’un bien immeuble<br />
ou meuble a le droit de posséder, utiliser, tirer des profits/<br />
bénéfices et de disposer de l’immeuble ou meuble.<br />
En conséquence, toute expropriation doit faire l’objet d’une<br />
indemnisation permettant un relogement dans les mêmes<br />
conditions.<br />
Il est, par ailleurs, possible d’être plusieurs à détenir un droit de<br />
propriété sur un bien (co-propriété, indivision).<br />
2. Droit d’usage – Le détenteur d’un droit d’usage sur un bien<br />
immeuble ou meuble a le droit de posséder, utiliser, tirer des<br />
profits/ bénéfices du bien propriété de quelqu’un d’autre. Le<br />
droit d’usage est susceptible d’être consenti dans différentes<br />
situations et notamment le droit attaché à l’utilisation d’un<br />
terrain constructible et en cas d’existence de servitudes réelles<br />
(elles peuvent être transférées en même temps que le droit<br />
d’usage du terrain sur lequel elles s’exercent).<br />
Le sol est toujours insusceptible d’appropriation ; seul un<br />
droit d’usage peut être consenti. Toutefois, il convient de noter<br />
une évolution d’importance du droit chinois : désormais, les<br />
propriétaires de maison d’habitation bénéficient d’un droit<br />
automatique au renouvellement du droit d’usage du terrain où<br />
est construit leur maison. La loi ne précise malheureusement<br />
pas les conditions d’application de ce droit. Cette disposition<br />
vise sans nul doute à renforcer le sentiment de sécurité juridique<br />
des propriétaires de bien immeuble et à freiner la spéculation<br />
immobilière.<br />
3. Sûretés réelles – Une sûreté réelle est une garantie<br />
consentie par un débiteur à un créancier sur un bien propriété<br />
du débiteur.<br />
La loi détaille trois types de sûretés - hypothèque,<br />
nantissement et privilège – permettant à leur détenteur de<br />
recevoir en priorité le paiement de leur dette. La mise en œuvre<br />
de ces sûretés réelles suppose l’existence d’un contrat écrit avec<br />
un certain nombre de mentions obligatoires précisées dans la<br />
loi.<br />
Hypothèque – Tout bien immeuble est susceptible d’être<br />
hypothéqué dans les conditions décrites par la Loi, et le<br />
droit d’usage du terrain où est situé l’immeuble hypothéqué,<br />
est hypothéqué en même temps. L’immeuble, objet de<br />
l’hypothèque, ne peut alors être transféré.<br />
Nantissement – On peut tout à la fois nantir des biens<br />
meubles ou des droits. Dans l’hypothèse d’un nantissement<br />
de meubles, ces derniers sont transférés et le titulaire du<br />
nantissement peut récolter les fruits du bien nanti.<br />
4. Conclusion – Si la nouvelle loi a le mérite de poser les bases<br />
du droit immobilier à l’occidentale, elle reste malgré tout une<br />
ébauche de cadre juridique pour la propriété privée.<br />
De nombreux sujets sont « évoqués » sans précisions (elles<br />
doivent être apportées par décret mais quand…) tel le droit<br />
automatique au renouvellement du droit d’usage du terrain<br />
sur lequel est construit une maison d’habitation. Enfin, les<br />
agriculteurs sont les grands oubliés de cette loi : leurs droits<br />
resteront donc encore, pour longtemps sans doute, régis par la<br />
coutume et la tolérance.<br />
On peut en tout cas espérer que sa mise en œuvre contribuera<br />
à éviter des situations comme le « clou de Chongqing ». •<br />
Le « clou de Chongqing »<br />
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