PRÉSENTATIONPrès de 40 ans après l’accession de la Guinée Équatoria<strong>le</strong> à l’indépendance, s’émancipant d’uneEspagne qui était encore, en 1968, soumise à la dictature de Franco, <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> n’a retrouvé ni laliberté ni la démocratie. Il est toujours sous la botte de l’un des gouvernants <strong>le</strong>s plus corrompusd’Afrique: Teodoro Obiang Nguema, qui a succédé à son onc<strong>le</strong>, <strong>le</strong> sanguinaire dictateur MaciasNguema, après l’avoir renversé en 1979.Près de 15 ans après la découverte et la mise en exploitation d’importants gisements de pétro<strong>le</strong>dans <strong>le</strong> sol marin de la plate-forme continenta<strong>le</strong> équato-guinéenne, qui ont multiplié par 20 <strong>le</strong>PIB du pays, la plupart de la population vit dans une pauvreté alarmante. L’espérance de vie àla naissance dépasse à peine 43 ans, la mortalité infanti<strong>le</strong> jusqu’à l’âge de 5 ans est de 146 pourmil<strong>le</strong> et <strong>le</strong>s principa<strong>le</strong>s causes des décès sont encore <strong>le</strong> paludisme et <strong>le</strong>s infections respiratoireset intestina<strong>le</strong>s. Le pays détient <strong>le</strong> record à la fois triste et significatif du plus grand écart entre<strong>le</strong>s classifications mondia<strong>le</strong>s du PIB par habitant et l’indice de développement humain de l’ONU:s’il n’y avait, en 1998 que 4 places de différence, en 2005 la Guinée Équatoria<strong>le</strong> a battu unrecord avec 93 places.Le régime de Macias, autoproclamé marxiste, s’était dispensé de toute espèce de législationdémocratique, il n’était pas entré à l’OIT et sous son mandat, <strong>le</strong> travail forcé était monnaie courante– dans <strong>le</strong>s plantations de cacao et la construction civi<strong>le</strong>, et à travers <strong>le</strong> travail public du samedi -;<strong>le</strong> régime d’Obiang, lui, a prétendu, sous la pression sporadique, variab<strong>le</strong> et toujours trop timide dela <strong>com</strong>munauté internationa<strong>le</strong>, laver l’image de sa dictature, en convoquant des é<strong>le</strong>ctions – pour<strong>le</strong>s manipu<strong>le</strong>r sans se gêner; il a promulgué des lois d’apparence démocratique - qu’il ne développaitpas rég<strong>le</strong>mentairement ou ne respectait tout simp<strong>le</strong>ment pas – et fait adhérer la Guinée à l’OIT,ratifiant au <strong>com</strong>pte-goutte quelques-unes de ses conventions fondamenta<strong>le</strong>s; parmi ces dernièressont à signa<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s numéros 87 et 98, sur la protection de la liberté syndica<strong>le</strong> et des droits de syndicationet négociation col<strong>le</strong>ctive.Les conclusions de l’excel<strong>le</strong>nt travail ici présenté, et qui s’appuient sur une base très solide, sontaccablantes. À titre d’exemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> économique guinéen – <strong>com</strong>mandé par l’exploitation dupétro<strong>le</strong> depuis <strong>le</strong>s années quatre-vingt-dix, et qui génère une proportion non négligeab<strong>le</strong> du PIB(85 %) – a consolidé la dictature et enrichi <strong>le</strong>s maîtres du pays, alors que la grande majorité de lapopulation n’a tiré aucun bénéfice de la croissance exponentiel<strong>le</strong> du revenu national. Tel que <strong>le</strong>relatent <strong>le</strong>s auteurs: “Les bénéfices de la production pétrolière alimentent la corruption massive etne soulagent en rien la situation généra<strong>le</strong> de la population… ils favorisent <strong>le</strong>s dynamiques derépression, d’appauvrissement et de cooptation politique, qui sont <strong>le</strong>s principaux instruments dedomination socia<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> pays”.L’élaboration de ce rapport s’inscrit dans un cadre de coopération entre la Fondation Paix etSolidarité Serafín Aliaga, de CC.OO., dont l’objet est d’appuyer <strong>le</strong> développement du syndicalismedémocratique de Guinée Équatoria<strong>le</strong>, considéré <strong>com</strong>me une partie essentiel<strong>le</strong> de la démocratisationindispensab<strong>le</strong> et pressante du pays. Les auteurs connaissent bien la réalité guinéenne. AliciaCampos est professeur de Sciences politiques à l’Université Autonome de Madrid, experte enaffaires africaines, notamment cel<strong>le</strong>s qui se rapportent à l’ancienne colonie espagno<strong>le</strong>. PlacidoMicó, avocat, est l’un des principaux dirigeants de l’opposition au régime d’Obiang; <strong>le</strong>ader du partiConvergencia para la Democracia Social (CPDS), d’orientation social-démocrate, il a connu <strong>le</strong>sgeô<strong>le</strong>s et d’autres formes de répression de la dictature. Il vit à Malabo depuis sa dernière sortie deprison.L’une des questions auxquel<strong>le</strong>s l’étude de Campos et Micó répond de manière radica<strong>le</strong> est de savoirpourquoi il n’y a pas de syndicats, alors que des lois <strong>le</strong>s autorisant ont été approuvées, et que la7
Guinée a fini par ratifier – en 2001 – <strong>le</strong>s principa<strong>le</strong>s conventions de l’OIT sur la liberté syndica<strong>le</strong> et<strong>le</strong>s droits syndicaux. Les raisons politiques sont simp<strong>le</strong>s: lorsque <strong>le</strong> régime d’Obiang élabore deslois, ce n’est pas pour <strong>le</strong>s respecter, mais uniquement pour se libérer pendant un certain temps dela pression internationa<strong>le</strong>. Dans <strong>le</strong>s cas où, après avoir surmonté à grand peine <strong>le</strong>s difficultésdérivées de l’absence de développement rég<strong>le</strong>mentaire, d’exigences à peu près impossib<strong>le</strong>s àac<strong>com</strong>plir – <strong>com</strong>me <strong>le</strong> nombre minimum exigé de travail<strong>le</strong>urs affiliés dans une entreprise ou unsecteur - une demande d’autorisation de syndicat est présentée aux autorités, ces dernières luiopposent un refus sous un prétexte quelconque, ou simp<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> si<strong>le</strong>nce. Tel est <strong>le</strong> sort qui a étéréservé aux tentatives de légaliser l’Union syndica<strong>le</strong> des Travail<strong>le</strong>urs (UST), <strong>le</strong> Syndicat indépendantdes Services (SIS), l’Association syndica<strong>le</strong> d’Enseignants (ASD) ou l’Organisation des Travail<strong>le</strong>ursdes champs (OTC). La seu<strong>le</strong> à avoir été légalisée, est une organisation de petits producteurs agrico<strong>le</strong>s,l’Organisation syndica<strong>le</strong> des Petits paysans (OSPA), en 2002.Il n’existe aucune organisation patrona<strong>le</strong> digne de ce nom. Pourquoi, au reste, s’il n’y a pas desyndicats? Cédant aux exigences de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centra<strong>le</strong>(CEMAC), <strong>le</strong> gouvernement a constitué en 1997 une patrona<strong>le</strong> à l’échelon national, forméede personnes du parti au pouvoir, <strong>le</strong> Parti démocratique de Guinée Équatoria<strong>le</strong> (PDGE). Le gouvernementd’Obiang a d’ail<strong>le</strong>urs aussi été capab<strong>le</strong> de s’inventer des organisations pour se présentersur <strong>le</strong>s tribunes internationa<strong>le</strong>s, <strong>com</strong>me ce fut <strong>le</strong> cas, rapportent <strong>le</strong>s auteurs, en 2002 à la227ème session du Conseil d’administration de l’OIT, où une inexistante Union généra<strong>le</strong> desEntreprises privées de Guinée Équatoria<strong>le</strong> (UGEPRIGE) présenta un rapport qui assurait, entreautres, qu’en Guinée Équatoria<strong>le</strong>, <strong>le</strong> droit de syndication était respecté.Il existe toutefois d’autres causes économiques et socia<strong>le</strong>s qui aident à <strong>com</strong>prendre <strong>le</strong>s difficultéscolossa<strong>le</strong>s pour organiser des syndicats en Guinée Équatoria<strong>le</strong>. Ces causes trouvent <strong>le</strong>ur explicationdans <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> de production et de travail, ainsi que dans l’étroite relation avec <strong>le</strong>s modes degouverner et avec <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s clans au pouvoir. Campos et Micó l’expliquent très bien dans<strong>le</strong>ur étude.Sur une population d’un peu plus d’un demi-million d’habitants, il n’y a que 30.000 travail<strong>le</strong>urssalariés: 7.000 dans l’industrie pétrolière, 13.000 dans <strong>le</strong>s administrations publiques et 10.000 dans<strong>le</strong> reste des secteurs, dont la partie formel<strong>le</strong> du travail du bois et du cacao. La population nonsalariée – agriculteurs et travail<strong>le</strong>urs informels du <strong>com</strong>merce et service domestique en premier -représente 250.000 personnes.La question clé, c’est que l’accès à cet emploi salarié est fortement dépendant du pouvoiréconomique et politique, fusion parfaite du modè<strong>le</strong> sociopolitique équato-guinéen ; en d’autres termesmais dans <strong>le</strong> même sens, il dépend d’Obiang et de sa famil<strong>le</strong> ainsi que des réseaux de clientélismedu parti du gouvernement. Il faut bien rappe<strong>le</strong>r que parmi <strong>le</strong>s secteurs et entreprises du paysplacés sous <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> du Président, de sa femme et de ses enfants se trouvent la construction, <strong>le</strong>ssupermarchés, l’industrie hôtelière, cel<strong>le</strong> du bois, ainsi que de grandes extensions de terrain qu’ilsvendent aux <strong>com</strong>pagnies étrangères reliées au secteur du pétro<strong>le</strong>.La corruption se fait spécia<strong>le</strong>ment sentir au moment d’accéder à un poste de travail dans <strong>le</strong> secteurpétrolier: à la « re<strong>com</strong>mandation » politique vient s’ajouter la prétention économique des agencesdes marchés, intermédiaires des entreprises multilatéra<strong>le</strong>s, auxquel<strong>le</strong>s <strong>le</strong> poste doit être achetémoyennant un droit d’entrée et une redevance mensuel<strong>le</strong>. Cette redevance peut dépasser de beaucoupce que <strong>le</strong> travail<strong>le</strong>ur perçoit réel<strong>le</strong>ment.Cette étude s’inscrit de façon très précise dans son contexte historique et politique, invitant par là<strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur à se poser des questions sur des sujets qui vont bien au-delà de l’étendue géographiquede la Guinée Équatoria<strong>le</strong>, et qui sont cruciaux dans la politique mondia<strong>le</strong> actuel<strong>le</strong>, entreautres <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des différents types de diplomatie pour favoriser la démocratisation et <strong>le</strong>s droits del’homme; l’influence des intérêts des multinationa<strong>le</strong>s dans la politique internationa<strong>le</strong> des paysdéveloppés.8
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