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COUPE<br />
DU MONDE<br />
2022<br />
C’est ici, dans quelques<br />
semaines, dans cette<br />
petite presqu’île<br />
accrochée à la péninsule<br />
arabique, à la<br />
frontière de l’Arabie<br />
saoudite, que se<br />
jouera la 22 e Coupe<br />
du monde de football. Une première<br />
pour le monde arabe, une première<br />
dans le monde musulman. Une Coupe<br />
du monde dans un pays de 11 000 km 2 ,<br />
un peu plus « grand » que le Liban ou que<br />
la Gambie. Une Coupe du monde qui se<br />
jouera du 20 novembre au 18 décembre,<br />
avec une finale une semaine avant Noël,<br />
et le jour de la fête nationale du Qatar.<br />
Le résultat d’une politique délibérée de<br />
la FIFA de faire « tourner » la plus prestigieuse<br />
des compétitions aux quatre coins<br />
du monde, hors de ses territoires de prédilection<br />
naturelle, comme l’Europe ou<br />
l’Amérique du Sud. On se rappelle ainsi<br />
avec une certaine émotion la Coupe du<br />
monde 2010 en Afrique du Sud, avec<br />
cette image inoubliable, émouvante d’un<br />
Nelson Mandela frêle, emmitouflé, arrivant<br />
en voiturette sur la pelouse, le jour<br />
du match d’ouverture…<br />
Le Qatar, un choix tout de même particulier,<br />
osé, acté il y a douze ans (aux<br />
dépens des États-Unis) et qui aura donné<br />
lieu à une litanie de procès, d’enquêtes<br />
pour corruption, de polémiques, à l’implication<br />
de personnalités politiques de<br />
haut rang (comme l’ex-président français<br />
Nicolas Sarkozy)… Une compétition qui<br />
se jouera pour la première fois en hiver<br />
occidental, l’été étant injouable avec les<br />
chaleurs du golfe Persique… Une compétition<br />
à 32 équipes, qui devrait attirer<br />
plus de 3 milliards de téléspectateurs, le<br />
Qatar étant relativement bien placé, à<br />
« équidistance », sur la carte des fuseaux<br />
horaires du globe.<br />
Une Coupe du monde dans un micro-<br />
État, richissime, sans grande tradition de<br />
football, qui sera marquée par la menace<br />
du Covid-19, cette pandémie qui n’en finit<br />
pas de finir. Une Coupe du monde dans<br />
un pays stratégique, premier exportateur<br />
– avec l’Australie – de gaz naturel liquéfié<br />
(GNL) au monde, qui prend un relief tout<br />
à fait particulier avec la guerre entre la<br />
Russie et l’Ukraine. Une Coupe du monde<br />
en pleine tourmente climatique, géopolitique,<br />
militaire, économique, avec une<br />
inflation record, des pénuries de blé et<br />
de gaz, une tension sociale à l’échelle de<br />
l’humanité, une grande fête au moment<br />
où n’importe quelle étincelle pourrait<br />
mettre le feu aux poudres…<br />
LE MONDIAL DE LA HONTE ?<br />
À cette ambiance particulièrement<br />
lourde de menaces s’ajoute un véritable<br />
procès en légitimité. Une vague de critiques<br />
en coupe réglée. Et en particulier<br />
l’apparition d’une campagne active de<br />
boycott. Essentiellement en Europe, en<br />
France, dans les pays nordiques, via les<br />
ONG aussi, des éléments de la société<br />
civile, on incite fortement les politiques,<br />
les joueurs à ne pas faire le voyage à Doha,<br />
ou à protester d’une manière ou d’une<br />
autre, les téléspectateurs à ne pas allumer<br />
leur TV… Quelques médias annoncent<br />
qu’ils ne couvriront pas, d’autres parlent<br />
sans nuances d’un « Mondial de la honte ».<br />
Le « dossier d’accusation » est lourd.<br />
Il y a d’abord le coût écologique, environnemental,<br />
énergétique, après un été<br />
particulièrement difficile dans l’hémisphère<br />
Nord, de grandes chaleurs, une<br />
multiplication des incendies. Une Coupe<br />
du monde « carbonée » en cette période<br />
soudaine de grande sobriété, avec<br />
32 AFRIQUE MAGAZINE I 433 – OCTOBRE 2022