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PERSPECTIVES<br />

consommation domestique. Ce qui pourrait permettre l’accès<br />

à une énergie abordable, avec des conséquences en cascade<br />

pour le bien-être des Africains, ainsi que pour l’environnement<br />

(le ramassage de bois pour cuisiner étant l’une des raisons de<br />

la déforestation). Le continent devrait aussi exporter environ<br />

30 milliards de m 3 chaque année vers l’Europe : en février dernier,<br />

Bruxelles a opportunément labellisé le gaz et le nucléaire<br />

dans sa liste des « énergies vertes » – au grand dam de nombreux<br />

écologistes. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution<br />

du climat (GIEC), lui, met dans le même sac pétrole et<br />

gaz, appelant l’Afrique, en avril dernier, à ne pas exploiter ces<br />

ressources afin de limiter le réchauffement. John Kerry, envoyé<br />

spécial de Washington pour le climat, a déclaré le 18 septembre<br />

qu’elle « ne devait pas trop se reposer sur le gaz » pour faire accéder<br />

sa population à l’énergie. Des commentaires qui exaspèrent<br />

sur le continent : « Les Africains sont les moins pollueurs de la<br />

planète ! » rappelle souvent le président sénégalais Macky Sall.<br />

RÉSOUDRE LA QUESTION DE LA SÉCURITÉ<br />

Reste à exporter ce gaz en Europe… Rappelons que son<br />

transport peut s’effectuer de deux manières : par gazoduc ou<br />

par liquéfaction. Cette dernière permet de convertir pas moins<br />

de 600 litres de gaz en 1 kilo de GNL, beaucoup moins encombrant,<br />

puis de l’exporter par voie maritime. Ce procédé est cependant<br />

fort gourmand en énergie comme en rejets carbonés : cela<br />

implique de refroidir le gaz à une température de -162 C° ! Mais<br />

le GNL permet de s’affranchir de la construction de milliers de<br />

kilomètres de gazoducs. Des ouvrages titanesques, exigeant une<br />

bonne décennie de travaux, et dont la pérennité s’avère soumise<br />

aux aléas géopolitiques. En témoigne la déconvenue de Nord<br />

Stream 2 (1 230 kilomètres entre la Russie et l’Allemagne), dont<br />

la construction s’est achevée quelques mois avant la guerre en<br />

Ukraine et la subséquente glaciation des relations entre Berlin<br />

et le Kremlin. Mi-septembre, l’Office national des hydrocarbures<br />

et des mines du Maroc et la Nigerian National Petroleum Corporation<br />

ont signé un accord avec la sénégalaise Petrosen et<br />

la Société mauritanienne des hydrocarbures et de patrimoine<br />

minier (SMHPM) pour développer le Nigeria Morocco Gas Pipeline,<br />

long de 5 600 kilomètres, qui devrait relier le sud du Nigeria<br />

au nord du Maroc et être connecté au gazoduc Maghreb- Europe.<br />

Gourmand<br />

en énergie, le GNL<br />

permet néanmoins<br />

de s’affranchir de<br />

la construction de<br />

milliers de kilomètres<br />

de gazoducs.<br />

Mais face à la démesure du projet, certains experts se montrent<br />

circonspects : Othmane Anice, du Center for Energy, Petroleum<br />

and Mineral Law and Policy (Écosse), estimait en juin qu’il existe<br />

« davantage de chance de voir naître un gazoduc entre le Sénégal,<br />

la Mauritanie et le sud du Maroc ». L’insécurité engendrée par<br />

les djihadistes au Sahel compromet également la concrétisation<br />

du Trans-Saharan Gas-Pipeline (TSGP) : dans les limbes depuis<br />

2009, cet ouvrage de plus de 4 000 kilomètres devrait acheminer<br />

30 milliards de m 3 par an, depuis les producteurs nigérians<br />

jusqu’aux consommateurs européens en… 2027. En attendant<br />

ces jours lointains, l’Europe a donc tout intérêt à miser sur le<br />

GNL, transportable par bateaux. Les ports du Vieux Continent<br />

développent en urgence des terminaux : l’Allemagne planche sur<br />

pas moins de six projets le long de sa côte pour accueillir notamment<br />

le GNL séné-mauritanien, et en 2023, la France devrait<br />

inaugurer un cinquième terminal gazier au Havre, ainsi que<br />

l’Espagne rénover un septième complexe à Gijón.<br />

Le comble est qu’à l’origine, les exportations de GNL africain<br />

étaient destinées au marché asiatique, l’européen étant, jusqu’au<br />

24 février dernier, la chasse gardée du gaz russe… Principal<br />

importateur de GNL à travers le monde, la Chine a cependant<br />

revendu ces derniers mois plusieurs millions de tonnes aux Européens.<br />

Jamais les gisements gaziers n’auront été aussi convoités.<br />

LES 5 PRINCIPAUX<br />

PRODUCTEURS<br />

DE GAZ NATUREL EN 2021<br />

(en milliards de m 3 )<br />

ÉTATS-UNIS 934<br />

RUSSIE 702<br />

IRAN 256<br />

CHINE 209<br />

QATAR 177<br />

Source : Statista.com,<br />

août 2022.<br />

LES 5 PRINCIPAUX<br />

EXPORTATEURS<br />

DE GNL EN 2021<br />

(en pourcentage des exportations)<br />

AUSTRALIE 21 %<br />

QATAR 20,7 %<br />

ÉTATS-UNIS 18 %<br />

RUSSIE 7,9 %<br />

MALAISIE 6,7 %<br />

Source : Connaissances<br />

des énergies, mai 2022.<br />

LES 5 PRINCIPAUX<br />

IMPORTATEURS<br />

DE GNL EN 2021<br />

(en pourcentage des importations)<br />

CHINE 21,3 %<br />

JAPON 20 %<br />

CORÉE DU SUD 12,6 %<br />

INDE 6,5 %<br />

TAÏWAN 5,2 %<br />

Source : Connaissances<br />

des énergies, mai 2022.<br />

SHUTTERSTOCK<br />

52 AFRIQUE MAGAZINE I 433 – OCTOBRE 2022

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