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PERSPECTIVES<br />

L’ampleur de la crise énergétique implique des bouleversements<br />

géopolitiques inattendus : en Méditerranée, Israël et le Liban<br />

cherchent à exploiter le gisement off-shore de Karish, situé sur<br />

leur frontière maritime contestée. Début septembre, l’envoyé<br />

spécial américain Amos Hochstein était à Beyrouth afin de<br />

trouver un compromis entre les deux voisins, théoriquement en<br />

guerre depuis 1948 ! Mais nécessité fait loi : selon les experts,<br />

même le Hezbollah – le parti et groupe islamiste chiite libanais –<br />

aurait tout intérêt à parvenir à un accord avec l’État hébreu.<br />

PROFITER AU CONTINENT<br />

« Près de la moitié des pays du continent disposent de<br />

réserves prouvées de gaz naturel », pour un total d’environ<br />

22 650 milliards de m 3 , estime la plate-forme d’investissement<br />

sud- africaine Energy Capital and Power. Elle évalue qu’elles sont<br />

de 3 400 milliards de m 3 au Sénégal, ce qui en fait les troisièmes<br />

en volume du continent, derrière celles du Nigeria et de l’Algérie.<br />

Dakar est même en discussion pour rejoindre le Forum des<br />

pays exportateurs de gaz. L’exploitation conjointe du gisement<br />

off-shore de Grand-Tortue Ahmeyim (GTA) et de celui de Sangomar<br />

par le Sénégal et la Mauritanie devrait démarrer dès le<br />

second semestre 2023. Et celle du gisement de Yakaar-Teranga<br />

(situé un peu au sud de GTA) en 2025. Petrosen, la SMHPM,<br />

leur partenaire BP et l’américain Kosmos Energy estiment les<br />

réserves à 1 400 milliards de m 3 . Ce qui pourrait générer 90 milliards<br />

de dollars de recettes pour les deux États, selon BP. Environ<br />

2,5 millions de tonnes de GNL devraient en être extraites<br />

chaque année, et jusqu’à 10 millions de tonnes à l’horizon 2030-<br />

2032, a promis Macky Sall lors d’un sommet consacré au secteur<br />

des hydrocarbures à Dakar, les 1 er et 2 septembre derniers.<br />

Le Sénégal bénéficie d’une position géographique avantageuse<br />

pour ses futurs clients européens : un navire méthanier<br />

Macky Sall au sommet sur l’adaptation<br />

climatique, à Rotterdam, en mai 2022.<br />

« Les Africains<br />

sont les moins<br />

pollueurs de la<br />

planète ! » rappelle<br />

régulièrement le<br />

président sénégalais<br />

Macky Sall.<br />

ne mettra que quatre à cinq jours pour rallier le golfe de Guinée,<br />

contre une douzaine depuis les États-Unis. Qui plus est,<br />

le gaz sénégalais serait moins polluant que ses concurrents :<br />

« Son intensité carbone est 40 % plus faible que le gaz de schiste<br />

américain et 25 % que celui du Qatar », twittait en juin dernier<br />

Mamadou Fall Kane, conseiller de Macky Sall en matière d’énergie.<br />

Fort de ses atouts, le pays entend donc « devenir un géant »<br />

du secteur, confirme Adama Diallo, président de Petrosen. La<br />

production sera « destinée en priorité à la consommation locale,<br />

notamment d’électricité », précisait-il dans une interview à Jeune<br />

Afrique le 19 septembre. L’objectif est que 100 % des Sénégalais<br />

aient accès à l’électricité en 2025, contre 65 % aujourd’hui.<br />

La manne du GNL doit profiter au continent, et non être<br />

simplement exportée : pas question de réitérer les erreurs trop<br />

souvent commises avec le pétrole. « L’Afrique ne peut pas être un<br />

objet de la géopolitique internationale. Elle doit être un acteur<br />

conscient, un concurrent et un collaborateur avec des partenariats<br />

gagnant-gagnant qui font avancer le secteur », a insisté<br />

le chef d’État sénégalais, également président en exercice de<br />

l’Union africaine. D’où « la nécessité pour les Africains d’être unis<br />

et l’importance de créer des partenariats solides sur le continent<br />

et dans le monde », a-t-il ajouté. « Le marché le plus sûr pour<br />

l’Afrique est l’Afrique », a fait remarquer Rita Madeira, responsable<br />

du programme Afrique à l’AIE, lors du sommet à Dakar.<br />

Le poids lourd industriel du continent, l’Afrique du Sud, embarrassée<br />

par sa dépendance envers ses vieilles centrales à charbon<br />

(polluantes et peu fiables), pourrait ainsi se tourner vers les producteurs<br />

africains de GNL. La Guinée, l’un des principaux producteurs<br />

mondiaux de bauxite, cherche, elle, à améliorer sa mise<br />

en valeur du minerai au moyen du gaz naturel liquéfié : en août,<br />

la société américaine West Africa LNG Group a annoncé avoir<br />

obtenu de la part d’investisseurs des financements pour installer<br />

un complexe de transformation de GNL dans le pays, au bénéfice<br />

des usines d’extraction de bauxite de Boké, Bel Air et Boffa,<br />

AFP FORUM/ANP MAG/ANP VIA AFP<br />

54 AFRIQUE MAGAZINE I 433 – OCTOBRE 2022

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