CAUSERIES FRANÇAISES - World eBook Library

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liste cl qui lia pas à s'en lepoiitir puisqu'elle lui a permis crécrire d«i( 1res beaux
livres.
Par cette liste, vous avez une idée de ce qu'on appelle le roman social. Le
roman social, c'est le l'oman qui étudie l'homme par rapiX)i1, à la société. C'est le
roman de mœurs dont il se distingue parfois, mais avec lequel le plus souvent il
ne fait qu'un. Marcel Proust a été à sa manière un romancier social, bien que
cette partie de son œuvre ne soit pas celle qui intéresse le plus se« admirateurs. Le
roman social est souvent satirique, tout au moins tendancieux, il a quelquefois
iino allure lyrique, selon le tempérament du roinancior. Voyez, par exemple, les
deux derniers romans de Roland Dorgelès, l'auteur des Croix de bois, voyez Saint
Magloirc et le Réveil des morts qui, par certaines page&^, rappellent Zola. Dorgelès,
et cela est un bel éloge à faire de lui, est à ]>eu près le seul des nouveaux roman-
ciers à montrer un pareil souffle, une pareille envolée lyrique, et c'est peut-être
parce qu'il est le seul à mettre son talent au service d'une conviction aus.si ardente.
Dorgelès a foi et dans son art et dans l'humanité. Il croit que c'est ari'ivé, comme
on dit vulgairement, et il a bien raison de le croire; il vibre, il ne perd pas de
temps à raffiner sur ses sensations et à couper des cheveux en quatre. Et parce
fju'il est ému lui-même, il nous émeut; il sera, quand il le voudra, un romancier
populaire de la lignée d'Erckmann-Chatrian. C'est là qu'est sa voie et je le félicite
de s'y engager carrément.
Le roman décoratif a deux représentants éminents : MM. Marcel Boulenger et
Jeau;Louis Vaudoyer, dont la préoccupation capitale semble être de nous donner
de la vie une représentation harmonieuse et ornée. Chez eux, le cadre oii se déroule
raclicn de leurs récits a une im])orlancc prépondérante, aussi le choisissent-ils
toujours avec beaucoup de soin, et de préférence conforme au gont de la société
élégante à l'intention de laquelle ils écrivent. Chantilly, Versailles, Aix-en-Prc^
vence, l'Italie, voilà leurs sites de prédilection. Leur langue, en, général, est fort
châtiée, légèrement archaïsante, car la mode est, à l'heure actuelle, au grand siècle,
et nous voici amenés tout naturellement à parler du roman archaïque, qu'on peut
désigner aussi sous le nom de roman pastiche et qui a été cultivé avec bonheur
par Anatole France dans Jérôme Coignard et ,dans la Rôtisserie de la reine
Pédaiique, ainsi que par Henri de Régnier dans le Bon Plaisir, dans les Amants
singuliers, dans la Pécheresse, etc. Le roman archaïqiue est évid'emment très secon-
daii"te, mais on peut y faire tenir beaucoup d'idées et beaucoup de talent ainsi que
le prouve l'exemple des deux romanciers illustres que je viens de citer. Ils ont eu
nombre d'imitateurs entre lesquels je .distinguerai particulièrement M. Emile
îleririot.
Le roman régionaliste n'est qu'une dépendance du ixDman social ou roman de
mœurs. Le régionalisme, et j'ai le regret de le dire, car je risque de chagriner de
fort bons esprits, ne saurait co'Ustituer en aucune façon une esthétique. Il se rat-
tache suivant le point de vue où on le considère, soit à la politique, soit à l'économie
politique, soit à la morale, soit au tourisme, etc. Il n'intervient en littérature
qu'à titre d'ingrédient, d'assaisonnement, mais c'est un assaisoiinement parfois
bien savoureux et qui neuf relever des plats bien médiocres. Chaque province de
France a aujourd'hui ses romanciers attitrés que nous avons déjà rencontrés tout
à l'heure dans les autres catégories romanescjues. La Rretaune a Charles Le Goffic,
Anatole Le Braz, Charles Géniaux, Auguste Dupouv; le Berry a Hugues Lapaire:
le Morvan a Henri Rachelin; le Poitou a Ernest Perrochon; la Normandie a Jean
Rcvel et Lucie Delarue-Mardrus; l'Auvergne a Henri Pourrat et Jean Ajalbert: le