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CAUSERIES FRANÇAISES - World eBook Library

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SG <strong>CAUSERIES</strong> <strong>FRANÇAISES</strong><br />

Remarquez la signature de cette lettre. C'est une plaisanterie qui dépeint bien son<br />

état d ame. Mais il faut noter à ce propos que nul écrivain sans doute ne lit autant<br />

que lui abus des faux noms. Pour son compte il a amplement dépassé les 160 pseudonymes<br />

que, paraît-il, on connaît de Voltaire. Cette manie le prit de bonne heure : il<br />

n'avait que dix-huit ans quand il commence à voiler sa personnalité de signatures<br />

supposées. Il ne pouvait avoir déjà cet effroi de i'es[)ionnage qu'il montra plus lard,<br />

mais il avait le goût de l'intrigue et du romanesque. Et sans doute cet amour de<br />

l'incognito le poussait à jouer avec ces doubles de lui-même, comme avec de nouveaux<br />

personnages de romans, et lui permettait de mieux s'isoler dans sa « rêverie tendre ».<br />

Après cinq ans d'Italie, Beyie demande un congé et revient en France. Il y va<br />

demeurer trois ans, grâce à l'influence du comte Mole, devenu ministre des Affaires<br />

Étrangères et président du Conseil, et qui, jusqu'à sa chute en 1889, lui permettra de<br />

prolonger indéflniment son séjour à Paris.<br />

Une autre fois cependant, Stendhal avait eu, c'était en i833, la possibilité de venir<br />

passer environ deux mois sur les bords de la Seine. Et c'est lorsqu'il s'en retournait<br />

vers son consulat qu'il rencontra à Lyon deux jeunes amoureux qui partaient pour<br />

Venise. Vous avez reconnu George Sand et Alfred de Musset. Ils firent route ensemble<br />

jusqu'à Marseille. Au début de ce court voyage Stendhal les avait amusés par sa verve<br />

bouffonne, mais il n'avait pas lardé à choquer George Sand par des propos que cette<br />

dame délicate trouvait grossiers et surtout par son athéisme affiché. Musset, en retour<br />

garda de lui d'amusants croquis sur son album et l'évoquait plus tard dans ses vers, à<br />

son frère revenant d'Italie :<br />

Ainsi, moncher, tu t'en reviens<br />

Du pays dont je me souviens<br />

Comme d'un rêve<br />

De ces beaux lieux où l'oranger<br />

Naquit pour nous dédommager<br />

Du péché d'Eve,<br />

Tu l'as vu, ce ciel enchanté<br />

Qui montre avec tant de clarté<br />

Le grand mystère :<br />

Si pur qu'un soupir rtionte à Dieu<br />

Plus librement qu'en aucun lieu<br />

(,)ui soit sur terre.<br />

Tu l'as vu, cet antique port,<br />

Où, dans son grand langage mort.<br />

Le flot murmure.<br />

Où Stendhal, cet esprit charmant,<br />

Remplissait si dévotement<br />

Sa sinécure.<br />

Maintenant Stendhal a repris durant ce nouveau séjour à Paris cette vie qui<br />

toujours lui plaît tant. Il dîne au Café anglais; au théâtre, il applaudit Uachel ; et il<br />

fréquente des amis fidèles. Il fut présenté par Mérimée à une dame espagnole qui<br />

séjournait à Paris avec ses deux filles. Il devint un familier de la maison, et asseyant<br />

les fillettes chacune sur un de ses genoux il leur racontait des histoires. Il leur disait :<br />

« Je vous aime parce que vous êles des enfants. Quand vous serez des femmes, vous<br />

serez fausses comme toutes les femmes et je ne vous aimerai plus. » Puis il leur<br />

parlait surtout de l'Empereur Napoléon. Plus lard une de ces enfants avait eu le sort

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