CAUSERIES FRANÇAISES - World eBook Library

. nous
LE MOUVEMENT LITTÉRAIRE CONTEMPORAIN 34i
Béarn a Francis Jammes que j'aurais dû mentionner précédemment avec la com-
tesse de Noailles parmi les poètes naturistes, etc.
A ce propos, je me permettrai d'ouvrir ici une petite parenthèse et puisque jr
me ti"ouve au Cercle de la Librairie, de rappeler une idée qui m'est chère et que
j'ai déjà exix>sée à diverses reprises dans les journaux. Elle consisterait à établir
un catalogue de la littérature française par province, catalogue qu'on tiendrait
à jour chaque année et qui paraîtrait un peu avant l'époque des vacances comme
le catalogue de livres d'étrennes paraît un peu avant la fin de l'année. Ce serait
évidemment un gros travail à fournir une fois pour toutes; mais qui, une fois fait,
donnerait, j'en suis persuadé, les résultats les plus intéressants en raison du dévc
loppement intense pris par le tourisme et de la difQc/iilté qu'éprouvent presque to;i-
jours les voyageurs à se procurer les ouvrages relatifs à la région qu'ils ont l'in-
tention de visiter. Je n'insiste pas sur cette idée, ma conférence étant déjà beau-
coup trop longue, mais je la recommande instamment à l'examen des dirigeants
du Cercle de la Librairie.
Le roman féminin a, depuis vingt ans, produit un nombre d'ouvrages cousi
«lérable. La littérature a été pour les femmes, depuis vingt ans. une véritable mala-
die; en tout cas, une véritable contagion, cfui commence, dirait-on, à diminuer
un peu. J'entends par là que les femmes semblent se rendre compte que leurs
petites histoires sentimentales et autres n'intéressent personne. Le roman féminin,
le roman spécifiquement féminin, est essentiellement un roman personnel, une
confession, et, quatre-vingt-dix-neuf fois sur cent, une confession d'amour mal-
heureux. On peut Y mettre beaucoup de talent, mais il est difficile d'y mettre
beaucoup de variété.
J'ai dit plus haut que Mme Colette avait été la créatrice du roman féminin
ainsi conçu. Près de son nom, nous placerons celui de Aîme Gérard d'Houville et
nommerons ensuite, Mme Marcelle Tinayrr, Marguerite Audoux, etc. Car,
d'autres femmes de lettres, certes, écrivent des romans qui ne sont pas féminins
à la manière étroite que je viens de dire, qui ne sont pas des confessions trop évi-
dentes, qui même ne .sont pas des confessions du tout; Mme Rachilde, entre autres,
se contente de nous raeonter de romanesques et parfois perversCv^^ histoires écrites
dans un style flamboyant et mouvementé qui rappelle parfois Barbey d'Aurevilly.
Enfin, d'autres femmes écrivains cultivent l'exotisme, telles, par exemple, Judith
Gauthier; Myriam Harry, Isabelle Eberhardt, Elissa Rhaïs, ce qui nou,*' conduit au
roman exotique qui, depuis Loti, n'a fait que se développer dans notre littérature,
de même que notre empire colonial n'a fait que se développer dans le monde.
Nos romanciers exotiques les plus en renom vous les connaissez, ce sont Claude
Farrère, Pierre Mille, Louis Bertrand et les frères Tharaud.
Claude Farrère est un romantique à qui nous devons de très belles pages, mais
à qui une idéologie poétique et sociale un peu trop ambitieuse, semble avoir fait
perdre quelques-uns de ses agréments les plus sûrs.
Pierre Milje est un conteur très nettement classique chez qui se fait sentir dt-
temps à autre l'influence d'Anatole France et qui, par d'autres côtés, rappelle,
toutes proportions gardées, le grand écrivain anglais Kipling.
Louis Bertrand a voulu être l'apôtre de l'impérialisme français dans le bassin
méditerranéen. A cette grande tâche, il a consacré toute sa foi et toute sa volonté.