Delta intérieur Du fleuve niger
Delta intérieur Du fleuve niger
Delta intérieur Du fleuve niger
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
142 Niveaux de crue, oiseaux d’eau et ressources alimentaires disponibles<br />
1 Impact de la crue: les<br />
niveaux d’eau et la présence<br />
d’oiseaux d’eau en Debo<br />
Introduction<br />
La performance de la crue annuelle détermine le<br />
moment calendrier où l’eau commence à descendre.<br />
Sur l’échelle d’Akka situé au bord du Lac Debo le<br />
début de la décrue se fait sentir entre la mi-octobre et<br />
la mi-novembre, étant donné que lors des fortes crues<br />
des années 1950 et 1960 la descente d’eau ne fut pas<br />
signalée, en général, avant le mois de décembre. Sous<br />
ce rapport la récente reprise de crues plus performantes<br />
- mais toujours modestes, comparativement -<br />
après une longue période de sécheresse (1972-1993)<br />
fait penser un peu au passé (cf. chapitre 3).<br />
La présence d’oiseaux d’eau dans la partie centrale<br />
du <strong>Delta</strong> montre des rythmes intra-annuels pour<br />
lesquels il existe plusieurs explications possibles.<br />
Dans la saison de nidification, par exemple, les<br />
oiseaux sont peu visibles -ou même pas- par leur<br />
comportement discret à ce moment-là. Ensuite leur<br />
reproduction peut avoir lieu en dehors de notre zone<br />
de recensement, et cela au différents plans géographiques:<br />
ailleurs dans le <strong>Delta</strong>, en dehors du <strong>Delta</strong>,<br />
ailleurs en Afrique et, dans le cas des migrateurs<br />
paléarctiques, en Eurasie. Cependant, la reproduction<br />
n’est pas la seule raison pour leur (apparente) disparition<br />
temporaire.<br />
Figure 5.4 fait voir l’évolution des grands totaux<br />
recensés dans le complexe Debo, au cours d’un cycle<br />
de crue défini entre juillet et juin. Les premiers<br />
migrateurs paléarctiques s’observent en juillet, et le<br />
mois de juin montre les grands rassemblements des<br />
espèces afrotropicales (par exemple l’Oie de Gambie<br />
Plectropterus gambensis) après leurs saisons de reproduc-<br />
tion et juste avant que la nouvelle crue se fasse sentir.<br />
En plus, cette nouvelle crue s’annonce dans la période<br />
marquant le début de (l’essentiel de) la saison<br />
des pluies, et cela fait disperser les oiseaux d’eau<br />
afrotropicaux pour une nouvelle saison de reproduction.<br />
L’image met en évidence que les grands effectifs<br />
d’oiseaux d’eau apparaissent peu après le passage<br />
de la crête de la crue; le Héron pourpré Ardea purpurea<br />
figure parmi les premières espèces donnant acte de<br />
présence dans la végétation émergeante du complexe.<br />
Le moment où les berges, bancs de sable et<br />
autres hauts-fonds se découvrent au cours de la<br />
décrue, et la période dans laquelle les oiseaux ont<br />
accès aux diverses ressources alimentaires, sont<br />
déterminés par la hauteur et la côte de la crue (voir<br />
chapitre 6.2).<br />
Ci-après sont présentés les résultats d’une étude sur<br />
la présence d’oiseaux d’eau dans le complexe Debo<br />
en relation avec les niveaux d’eau au cours de la<br />
phase de décrue, de la mi-décembre à la mi-mars.<br />
Cette étude est initiée en décembre 1991 (van der<br />
Kamp & Zwarts 1992, van der Kamp 1994, 1995,<br />
1996) et comprend les résultats des recensements<br />
mensuels du projet WI en 1998-2001 (van der<br />
Kamp & Zwarts 1998, van der Kamp & Diallo 1999,<br />
Diallo et al. 2002). Les résultats sont présentés pour<br />
douze espèces exploitant trois différentes ressources<br />
alimentaires dans le complexe Debo: poissons, mollusques<br />
et (larves d’) insectes. Il s’agit d’espèces<br />
d’origine bio-géographique différente, et de tailles et<br />
techniques de fourrage variées; à base de l’ensemble<br />
de leurs techniques de fourrage et régimes alimentaires<br />
elles sont souvent classées en groupes écologiques<br />
(Piersma & Ntiamoa-Baidu 1995):<br />
oiseaux piscivores: Cormoran africain Phalacrocorax africanus,<br />
Héron pourpré, Aigrette garzette Egretta garzetta,<br />
Chevalier arlequin Tringa erythropus, Guifette moustac<br />
Chlidonias hybridus, Guifette leucoptère Chlidonias leucopterus,<br />
Sterne caspienne Sterna caspia. Les sept espèces<br />
sont piscivores, chacune avec sa propre façon de<br />
fourrager. Le Cormoran africain est un pêcheur à la<br />
nage, le Héron pourpré et l’Aigrette garzette sont des<br />
pêcheurs pêchant les poissons à l’affût, et le Chevalier<br />
arlequin est un limicole qui pêche de façon pélagique,<br />
en exploitant les eaux de faible profondeur.<br />
Les Sternidae -les guifettes et la Sterne caspienne-<br />
pêchent au vol, en étant remarqué que les guifettes<br />
peuvent prendre des insectes aussi.<br />
oiseaux benthivores: Echasse blanche Himantopus himantopus,<br />
Barge à queue noire Limosa limosa, Combattant<br />
varié Philomachus pugnax. Trois espèces de limicole dont<br />
deux décrites comme des oiseaux exploitant des<br />
surfaces exondées de façon tactile, le troisième étant<br />
un pêcheur pélagique. Au Debo ils s’avèrent exploiter<br />
une ressource en commun (mollusques), dans une<br />
profondeur d’eau inférieure à 15 cm environ, et<br />
même à sec (Combattant varié). L’Echasse blanche<br />
pêche aussi (comme le Chevalier arlequin), et la<br />
Barge à queue noire et le Combattant varié peuvent<br />
prendre recours à des larves d’insectes, dans la boue<br />
ou dans les failles de terre. En dehors des Debos les<br />
barges et combattants exploitent également les zones<br />
de riziculture en prenant les graines de riz tombées<br />
lors de la récolte.<br />
oiseaux insectivores: Pluvier grand-gravelot Charadrius<br />
hiaticula, Pluvier pâtre Charadrius pecuarius. Deux espèces<br />
exploitant des surfaces exondées de façon visuelle, et<br />
habituellement présentes dans les parties les plus<br />
arides de la zone émergée. Occupant le même niche,<br />
une différence entre le Pluvier grand-gravelot et le<br />
Pluvier pâtre pourrait être que le premier, de provenance<br />
paléarctique, est moins résistant aux conditions<br />
climatiques en Afrique, en permettant ainsi un<br />
certain décalage temporel dans leur activité fourragère.<br />
Protocole d’étude<br />
Les recensements systématiques d’oiseaux d’eau dans<br />
une zone où le niveau d’eau est soumis à des fluctuations<br />
de l’ordre de 5 m, nécessitent une approcheamphibie.<br />
Dans les mois ciblés les recensements de<br />
décembre et janvier ont été effectués par pirogue<br />
Impact de la crue: les niveaux d’eau et la présence d’oiseaux d’eau en Debo 143<br />
Pêche collective par des Cormorans africains<br />
motorisée, et ceux de février et mars -Lac Debo- se<br />
déroulaient généralement à pied, le niveau d’eau<br />
permettant. Walado Debo a toujours été fait par pirogue,<br />
dans l’intervalle calendrier de cette étude. La<br />
zone est sous-divisée en parties dans lesquelles les<br />
parcours suivis peuvent varier selon les niveaux<br />
d’eau, sans pour autant affecter la couverture des différentes<br />
parties (cf. figure 5.1). Les comptages<br />
s’effectuent à perte de vue; en réalité il s’agit d’une<br />
distance d’observation de quelque 3-4 km, parfois<br />
moins par le profil du terrain, ou en tenant compte<br />
des angles dans le trajet limitant l’étendue de la zone<br />
y comprise.<br />
L’étude se focalise sur la période décembre-mars, et<br />
les images présentées ci-après donnent les résultats<br />
-en nuages de points - de 28 recensements effectués<br />
dans cette période, entre décembre 1991 et mars<br />
2001 (tableau 6.1). Au fil de ces années a été constaté<br />
que la migration de certaines espèces paléarctiques<br />
peut commencer en mars; des écarts numériques<br />
clairement dûs aux départs transsahariens des<br />
oiseaux ont ainsi été éliminés des images (mais voir<br />
aussi Héron pourpré, ci-après).