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AUTOINSIDE Édition 1 – Janvier 2023

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POLITIQUE & DROIT<br />

Trafic routier<br />

« La nouvelle loi sur le CO 2 doit coûter<br />

moins cher que le projet de 2021 »<br />

L’un des plus grands défis politiques de ces prochaines années sera d’assurer un financement durable de<br />

l’infrastructure routière, explique Olivier Fantino, directeur de Routesuisse, l’association faîtière du trafic routier suisse.<br />

Et il montre les progrès réalisés par la branche dans la lutte contre le réchauffement climatique. Reinhard Kronenberg<br />

Monsieur Fantino, où Routesuisse voit-elle les plus grands défis<br />

politiques pour les trois à cinq prochaines années ?<br />

Olivier Fantino : Le trafic routier privé connaît une évolution rapide<br />

et fait face à de nombreux défis à plus ou moins long terme. De nombreuses<br />

décisions politiques seront prises au cours de la prochaine<br />

décennie, qui seront déterminantes pour les 50 prochaines années<br />

en matière de mobilité. Parmi les principaux défis politiques pour<br />

nous dans les trois à cinq prochaines années, on peut notamment<br />

citer les suivants : trouver une nouvelle solution pour assurer le financement<br />

durable de l’infrastructure routière, faire un premier pas<br />

vers la multimodalité notamment en autorisant la vente de billets<br />

de transports publics par des tiers, et mettre en place une nouvelle<br />

politique climatique avec désormais pour objectif de garantir la sécurité<br />

de notre approvisionnement énergétique et la neutralité technologique<br />

de l’État.<br />

Avec l’essor de la mobilité électrique, la Confédération perdra<br />

à long terme une grande partie des recettes de l’impôt sur les<br />

huiles minérales. À quoi Routesuisse attache-t-elle de l’importance<br />

dans la solution de remplacement prévue ?<br />

La solution de remplacement consiste en une taxe kilométrique sur<br />

les véhicules hybrides et électriques. Nous souhaiterions néanmoins<br />

que la Confédération étudie une taxe sur la source d’énergie, fonctionnant<br />

de manière analogue aux taxes sur les carburants. En effet,<br />

il est essentiel que la nouvelle taxe ne permette pas à l’État de<br />

géolocaliser les usagers, qu’elle n’augmente pas la charge fiscale et<br />

qu’elle ne génère pas de charge administrative exorbitante. Enfin, il<br />

est essentiel que les projets-pilotes en matière de mobility pricing<br />

<strong>–</strong> c’est-à-dire l’introduction de péages urbains dans le but de réduire<br />

le trafic routier <strong>–</strong> ne soient pas poursuivis parallèlement à l’introduction<br />

de la solution de remplacement pour éviter de mélanger les<br />

objets et ne pas se heurter à un rejet massif de la population.<br />

L’Office fédéral de l’énergie estime que d’ici 2040, près de 57 %<br />

de l’ensemble du parc automobile sera équipé de technologies<br />

alternatives. Pensez-vous que cela soit réaliste ?<br />

Oui, à condition d’avoir suffisamment d’électricité.<br />

Dans sa réponse à la consultation sur la révision de la loi sur le<br />

CO 2 , Routesuisse écrit : « Nous voulons nous aussi apporter notre<br />

contribution à la lutte contre le réchauffement climatique ». Comment<br />

se présente concrètement cette contribution ?<br />

Contrairement à ce que l’on peut régulièrement lire dans les médias,<br />

notre secteur a réalisé d’incroyables progrès en matière d’émissions<br />

de CO 2 : les émissions moyennes par kilomètre parcouru, tous véhicules<br />

confondus, motos, voitures et camions, ont diminué d’environ<br />

un tiers depuis vingt ans. C’est énorme, et la tendance s’accentue<br />

chaque année avec l’électrification du parc de nouveaux véhicules.<br />

En parallèle, le trafic routier réalise d’importantes mesures de compensations<br />

des émissions dues aux carburants. Pour <strong>2023</strong>, la loi fixe<br />

le taux de compensation à vingt pour cent. Le problème, c’est que ces<br />

mesures de compensation ne sont pas, mis à part les biocarburants,<br />

comptabilisées au bénéfice du secteur qui les finance. Concrètement,<br />

nous contribuons donc déjà grandement à l’atteinte des objectifs de<br />

la politique climatique. Mais il y a un important potentiel d’amélioration<br />

dans le domaine de l’aménagement du territoire qui traduit<br />

une volonté de décroissance dans son application au niveau fédéral,<br />

et qui bloque ou du moins freine tout projet d’innovation en Suisse.<br />

Au lieu de tout bloquer, il faut absolument encourager les projets<br />

innovants grâce à des procédures simples, claires et identiques dans<br />

tous les cantons pour les infrastructures durables ainsi que les installations<br />

nécessaires au développement des nouvelles technologies,<br />

notamment l’hydrogène et les carburants synthétiques.<br />

La révision de la loi sur le CO 2 sera vraisemblablement soumise<br />

au Parlement au printemps. Où Routesuisse trace-t-elle la ligne<br />

rouge ?<br />

Je n’aime pas parler de ligne rouge, ce n’est pas constructif. Un élément<br />

déterminant pour nous est biensûr le coût : la nouvelle loi<br />

devra être moins coûteuse que le projet rejeté en votation en 2021.<br />

L’objectif zéro net de la loi sur le CO 2 est controversé. Quelle est<br />

la position de Routesuisse à ce sujet ?<br />

L’objectif zéro net ne figure pas dans la loi sur le CO 2 , mais une loicadre<br />

contenant des objectifs mais pas véritablement de mesure<br />

ni de plan pour les atteindre dans notre secteur. Selon celle-ci, le<br />

secteur des transports, dont le rail, l’aviation et la navigation, devra<br />

atteindre la neutralité carbone en 2050, sans prendre en compte les<br />

mesures de compensation. Malheureusement, cela me semble irréaliste<br />

car la loi prévoit une forte accélération de la décarbonisation<br />

entre 2040 et 2050 alors que paradoxalement, le coût de celle-ci augmentera<br />

aussi. Personne n’a de boule de cristal, mais il est certain<br />

que pour espérer atteindre un jour cet objectif « zéro net », nous<br />

aurons besoin de beaucoup plus d’électricité, d’hydrogène et de carburants<br />

synthétiques, et ce à des prix raisonnables. <<br />

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<strong>Janvier</strong> <strong>2023</strong> | <strong>AUTOINSIDE</strong>

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