Plan Urbain Lettre de commande n°09 Emmanuel Eveno Au début ...
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<strong>de</strong> "château industriel". Sinon, point <strong>de</strong> grâce à la classe ennemie. Les valeurs <strong>de</strong> la ville ne<br />
valent guère face à celles du château. Même si <strong>de</strong> Napoléon à Louis Philippe, tout a été fait en<br />
France pour fusionner les notables entre eux, dans un juste milieu, dont l'objectif <strong>de</strong>vait être<br />
<strong>de</strong> s'enrichir, l'aristocratie légitimiste n'a pas disparue et Ségur défend son espace, (le château<br />
face à la ville), sa morale (la charité chrétienne face à la spéculation commerciale) et son<br />
système éducatif (domestique plutôt que scolaire, sauf pour Gaspart).<br />
Si toute la société est décrite (Diloy est cheminot et les ouvriers, les aubergistes, les multiples<br />
paysans, en particulier le mauvais génie sont <strong>de</strong>s héros <strong>de</strong>s livres), le mon<strong>de</strong> du travail<br />
s'organise pour la comtesse autour <strong>de</strong> trois lieux: un chapitre s'appelle "la ferme, le château,<br />
l'usine". Cadichon et tous les errants se confrontent à ces trois états possibles: le domestique,<br />
l'ouvrier ou le paysan. (cf. sa bibliographe M <strong>de</strong> Hédouville). Secteur primaire, secondaire... et<br />
tertiaire, les classes moyennes ne seraient ils que les domestiques <strong>de</strong>s châteaux? <strong>Au</strong> fait, c'est<br />
qu'ils y habitent aussi. Professeurs, mé<strong>de</strong>cins, aubergistes, sont ils autre chose, pour la<br />
comtesse que <strong>de</strong>s domestiques <strong>de</strong> François le bossu, <strong>de</strong> Dourakine... Enfin, l'idéal politique <strong>de</strong><br />
la comtesse s'exprime en conformité avec l'idéal social. La comtesse est ultramontaine. Dans<br />
les jardins publics <strong>de</strong> Paris, la ban<strong>de</strong> <strong>de</strong>s jeunes "vrais français" (face aux garçons voyous<br />
portant <strong>de</strong>s noms étrangers) se prépare en effet à illustrer la gloire <strong>de</strong>s armes Françaises<br />
(l'auberge <strong>de</strong> l'ange gardien, le mauvais génie) pour défendre l'honneur du pape dans les<br />
zouaves pontificaux, lors <strong>de</strong> l'unification italienne.<br />
Un mon<strong>de</strong> centré sur le château: trois utopies en poupée russes<br />
<strong>Au</strong> <strong>de</strong>ssus, au centre <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, il y a donc l'aristocrate. Le château. Comme chez Hergé,<br />
mais <strong>de</strong> façon plus explicite, plus reliée aussi à une réalité sociale, ou plutôt à un modèle<br />
social, le mon<strong>de</strong> légitime est celui <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> château. Modèle social, bien sûr. Légitimisme<br />
<strong>de</strong> retrait, le centre Versaillais s'est fractionné en châteaux intimes qui doivent organiser le<br />
mon<strong>de</strong>, par la charité, autour d'eux. Mon<strong>de</strong> intime, familial au centre. Domesticité autour.<br />
Puis, plus loin, villageois, ville, moulin ou forge <strong>de</strong>s usines. Le mon<strong>de</strong> périphérique <strong>de</strong>s<br />
étrangers à la famille. Le cercle <strong>de</strong>s pauvres, voleurs, parfois, reconnaissant sinon. Et, au <strong>de</strong>là<br />
<strong>de</strong> ces environs, venant par la route, rendant visite, les égaux d'un autre château, réseau<br />
familial. Ce modèle qu'on peut i<strong>de</strong>ntifier dans les mémoires d'un âne, mais surtout dans<br />
Doukarine, la trilogie Sophie/Petites filles modèles/Les Vacances, dans Diloy, Gizelle/quel<br />
amour d'enfant, les bons enfants, aprés la pluie, soit au moins la moitié <strong>de</strong>s ouvrages <strong>de</strong> la<br />
comtesse doit s'expliquer, se décrire et se décrypter.<br />
Explication première, c'est le rattachement <strong>de</strong> la comtesse à un milieu. Le château, c'est son<br />
origine, son présent et l'avenir <strong>de</strong> sa famille, ses petits enfants, pour lesquels elle écrit (au<br />
moins au <strong>début</strong>). Elle est successivement la fille (maltraitée semble-t-il) <strong>de</strong> Rostopchine au<br />
domaine <strong>de</strong> Woronowo, entouré par les loups; la femme (trompée) <strong>de</strong> Ségur, en son domaine<br />
<strong>de</strong>s Nouettes en Normandie; la mère <strong>de</strong> Mgr Ségur, et <strong>de</strong> filles bien mariées, châtelaine<br />
acariâtre (immobilisée après sa <strong>de</strong>rnière grossesse pendant sept ans, migraineuse, ayant une<br />
laryngite à force <strong>de</strong> tonner contre son mari); enfin la grand mère, convertie par son fils à la<br />
religion <strong>de</strong> sa propre mère, écrivant à ses petites filles les contes <strong>de</strong> fée qu'elle ne pouvait plus<br />
leur conter, puisque les Malaret étaient en Angleterre. Elle ne perd son château qu'avec l'âge<br />
(en 1871). Chacun <strong>de</strong> ces château est un lieu réel et donne l'inspiration d'un roman. Dourakine<br />
est à Woronowo, les petites filles modèles sont en leur domaine. Le château ou la maison <strong>de</strong><br />
maître est donc le lieu d'évi<strong>de</strong>nce. Ainsi, dans les malheur <strong>de</strong> Sophie, la "maison" n'est pas<br />
même décrite, et n'est château que par les illustrations, et quelques rares mentions du texte;<br />
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