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xvi noti<strong>ce</strong> sur le père justin<br />

xvii<br />

le p. justin ne partageait pas, à <strong>ce</strong> qu’il parait, la fan<strong>au</strong>- que<br />

répulsion qu’inspiraient encore de son temps les parias du ghetto,<br />

et dont plusieurs prélats se montraient animés, contrairement <strong>au</strong><br />

pré<strong>ce</strong>pte fondamental de la charité.<br />

En 412, Saint Cyrille, patriarche d’Alexandrie, avait chassé<br />

les juifs et avait <strong>au</strong>torisé le rapt de leurs propriétés. dans le XI e<br />

siècle, le moine Raoul prêcha, <strong>au</strong> nom de dieu, l’égorgement de<br />

la postérité d’Abraham. dans le Xv e , le bienheureux Bernardin,<br />

frère mineur, né à Feltri, composa contre <strong>ce</strong>lle-ci des sermons<br />

pétris de haine et de fiel. Toutefois, lorsque la multitude égarée<br />

persécuta les Israélites jusqu’à répandre leur sang, la pap<strong>au</strong>té<br />

intervint pour les couvrir de son égide. l’indignation qu’exhala<br />

contre eux le cardinal Sadolet, évêque de Carpentras, fut justifiée,<br />

en quelque sorte, par le spectacle des chrétiens qui, ayant<br />

emprunté-de l’argent <strong>au</strong>x usuriers de la synagogue, étaient tombés<br />

dans une déplorable situation de fortune. Mais le mal, dont<br />

les supplications <strong>au</strong> pape et <strong>au</strong>x magistrats demandaient la suppression,<br />

<strong>au</strong>rait été bien plus effica<strong>ce</strong>ment éteint, si, <strong>au</strong> lieu de<br />

continuer à river les chaînes du peuple d’Israël, le souverain du<br />

Comtat, en rendant les juifs à la liberté et <strong>au</strong> sentiment de leur<br />

propre dignité, leur eût permis de se vouer à d’honorables professions<br />

et de posséder des immeubles rur<strong>au</strong>x, comme les <strong>au</strong>tres<br />

citoyens dont ils n’<strong>au</strong>raient pas dû être distingués par des couleurs<br />

infamantes. Il est vrai que Sadolet, qu’on ne s<strong>au</strong>rait accuser<br />

de méchan<strong>ce</strong>té ni d’intoléran<strong>ce</strong>, s’exprime ainsi dans une de ses<br />

lettres relatives <strong>au</strong>x Israélites : non enim hominibus infensus sum,<br />

sed hominum illorum vitiis. Or, d’où venaient <strong>ce</strong>s vi<strong>ce</strong>s? n’est-<strong>ce</strong> pas<br />

de l’état d’abjection où avaient été réduits <strong>ce</strong>s infortunés, de la<br />

position précaire que leur avait faite les gouvernants eux-mêmes,<br />

des humilia- tions dont la ra<strong>ce</strong> juive était chaque jour abreuvée<br />

impunément par les chrétiens, <strong>ce</strong> qui n’<strong>au</strong>rait dû être officiellement<br />

toléré en <strong>au</strong>cun temps?<br />

le p. justin ne faisait <strong>au</strong>cune difficulté d’avoir un tailleur<br />

d’habits de <strong>ce</strong>tte religion, et de c<strong>au</strong>ser souvent en hébreu avec<br />

lui. je suis sûr que, s’il n’eût dépendu que de notre bon religieux,<br />

il <strong>au</strong>rait affranchi bien volontiers toute la des<strong>ce</strong>ndan<strong>ce</strong> de jacob<br />

de <strong>ce</strong>s vexations in<strong>ce</strong>ssantes et de <strong>ce</strong>s extorsions légales,<br />

qui ne pouvaient que perpétuer l’exaspération con<strong>ce</strong>ntrée et<br />

l’abaissement moral de <strong>ce</strong>lle-ci. Il <strong>au</strong>rait bien <strong>ce</strong>rtainement,<br />

s’il avait pu, suivi, à l’égard des juifs, l’exemple du chanoine<br />

p<strong>au</strong>l d’Andrée, qui parvint à rallier <strong>au</strong> bercail du christianisme<br />

quelques-uns de leur croyan<strong>ce</strong>, non pas tant par la voie de la discussion<br />

dogmatique, que par l’éloquen<strong>ce</strong> tout <strong>au</strong>trement entrainante<br />

d’une assistan<strong>ce</strong> matérielle portée <strong>au</strong> lit de la douleur et<br />

sous la mansarde de l’indigen<strong>ce</strong>.<br />

l’obligation expresse où étaient les Israélites de se trouver <strong>au</strong>x<br />

discours ou leçons dont l’<strong>au</strong>dition leur avait été imposée par la<br />

cour de Rome (1), si elle n’aboutit pas à les enrôler sous l’étendard<br />

de la croix, était de nature, <strong>ce</strong> me semble, à faire sentir à leurs<br />

conducteurs spirituels la né<strong>ce</strong>ssité de fortifier leurs frères dans<br />

leur foi, en leur donnant les moyens de combattre, à leur point de<br />

vue, les arguments qui, chaque semaine et contre leur gré, retentissaient<br />

à leurs oreilles. Aussi je ne doute pas que <strong>ce</strong> durent être<br />

principalement <strong>ce</strong>s conféren<strong>ce</strong>s ou sermons catholiques qui leur<br />

suggérèrent l’idée de fonder, dans leur commun<strong>au</strong>té, de petites<br />

académies, telles que <strong>ce</strong>lle qui f leurit à Carpentras pendant les<br />

cinq ou six années qui précédèrent l’émancipation de 1789, et qui,<br />

composée de jeunes rabbins ou aspirants <strong>au</strong>x fonctions du sanctuaire,<br />

s’occupa du mouvement à imprimer <strong>au</strong>x études, et même<br />

de l’art de penser avec solidité et de s’exprimer avec goût, nonseulement<br />

dans la langue de la Bible, mais encore en latin et en<br />

français. Carpentras a vu, <strong>au</strong> début du XIXe siècle, notamment<br />

trois Israélites pleins de mérite intellectuel, jassuda-M. Mossé,<br />

poète, concourir avec honneur <strong>au</strong>x jeux f lor<strong>au</strong>x de Toulouse ; son<br />

frère aîné, Abraham-Gabriel, devenir un ingénieur distingué <strong>au</strong><br />

sortir de l’école polytechnique, et Moïse Monteux, instituteur,<br />

riche de connaissan<strong>ce</strong>s variées, écrivain correct et judicieux,<br />

qui s’était signalé déjà par de rapides progrès <strong>au</strong>x classes de latinité<br />

de l’abbé Eysséric. Ces particularités n’étonneront point<br />

les personnes qui, depuis plus de 50 ans, sont témoins des suc-<br />

(1) pendant l’heure déterminée pour <strong>ce</strong>s réunions,les sergents de<br />

ville forçaient les juifs à s’y rendre immédiatement, lorsque <strong>ce</strong>ux-ci<br />

étaient rencontrés sur la voie publique. de fréquentes insultes avaient<br />

lieu contre les Israélites de la part du peuple., surtout lorsqu’ils allaient<br />

ensemble à la prédication du samedi, <strong>au</strong> point que le vi<strong>ce</strong>-légat<br />

niccolini se décida à promulguer, en date d’Avignon le 9 dé<strong>ce</strong>mbre<br />

1679, un règlement assez sévère, avec mena<strong>ce</strong> de procéder par inquisition<br />

contre les chrétiens qui se permetraient de molester ou d’offenser<br />

les juifs ou juives, de nuit ou de jour, et eu quelque circonstan<strong>ce</strong> que <strong>ce</strong><br />

fût. Ce qui n’empêchait pas le préjugé anti-judaïque de faire explosion<br />

de temps à <strong>au</strong>tre impunément.

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