Quel sens donner au Graphisme ethniQue ? - graphic design
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Mémoire professionnel - Bachelor Graphic Design 2<br />
des influences inconscientes. Et d’<strong>au</strong>tre part, nous ne pouvons omettre le fait<br />
que l’étoile soit un symbole presque universel ; en effet on le retrouve chez les<br />
indiens du Sud-Ouest, dans le Judaïsme, chez les britanniques, chez les sumériens,<br />
chez les catholiques et dans le monde de l’occulte. Elle revêt toujours<br />
une part spirituelle, mystique, céleste ; en bref quelque chose qui se place<br />
<strong>au</strong>-dessus de nous, quelque chose que l’on ne contrôle pas mais que l’on subit<br />
et qui nous domine. Les collections d’Isabel Marant tout comme son logo lui<br />
ont été en partie imposés par sa propre expérience.<br />
b.2: Serge Mouangue : la confusion des frontières<br />
Nous avons be<strong>au</strong>coup parlé de l’art ethnique vu par les européens, mais le<br />
graphisme ethnique <strong>au</strong> sein du graphisme contemporain ne se résume par<br />
à la réinterprétation des signes ethniques par les occident<strong>au</strong>x. Il existe des<br />
échanges trans-ethniques étonnants qui apportent un nouve<strong>au</strong> questionnement<br />
dans notre problématique ; celle de la notion paradoxale des frontières, celle<br />
du métissage, celle de la trans-culturalité.<br />
Quand Serge Mouangue, conçoit des kimonos 32 sur des tissus typiquement<br />
africains,(motifs géométriques, très colorés, clairement folkloriques et<br />
souvent symboliques), il fait fusionner deux cultures graphiques complètement<br />
opposées : celle de l’exubérance camerounaise et celle de la sobriété du<br />
japon. La rencontre de ces deux écritures si singulières donnent un résultat<br />
qui reste assez perturbant : malgré le fait qu’elles soient mêlées en un seul<br />
objet, les deux apports restent toute fois clairement distincts. Cet exemple<br />
reste toujours très significatif et important pour notre exploration car il montre<br />
que l’échange peut se faire dans les deux <strong>sens</strong> et surtout mutuellement. Il n’est<br />
pas étonnant de croiser ce genre de fusion car ce n’est pas l’Europe occidentale<br />
qui a engendré l’échange entre culture. Cette pratique se faisait bien avant<br />
son apogée vers 1760 avec la révolution industrielle. Les échanges culturels<br />
ont favorisé la création et la diversification des écritures graphiques et de l’art<br />
en général. Ce que Jean-Pierre Warnier appelle le « système-monde », était<br />
un espace marchand, culturel, religieux et idéologique qui avait pour centre<br />
l’Asie. De nombreux grands concepts tels que le Jaïnisme, le Bouddhisme ou<br />
l’Humanisme ont trouvé naissance dans ce bassin fertile qui englobait l’Asie,<br />
l’Inde, la Mésopotamie, l’Egypte, l’Empire ottoman... excluant l’Europe.<br />
Ces cultures que l’on dit orientales ont donc pratiqué l’échange et se sont<br />
influencées mutuellement des siècles durant avant l’invasion de l’Europe sur<br />
le marché. La particularité de cette époque est que ces échanges étaient équitables,<br />
équivalents et respectaient la part de non aliénable de certains faits<br />
culturels.<br />
Mais les kimonos de Mouangue montrent que malgré le mélange des genres,<br />
la tentative de brouillage des frontières, chaque signe culturel ôté de son<br />
contexte symbolique originel y demeure tout de même profondément ancré<br />
et clairement identifiable. L’acculturation ne sera toujours qu’un voile, ou une<br />
utopie. Tôt ou tard le naturel revient <strong>au</strong> galop. Ces kimonos ne sont pas issus<br />
d’une culture afro-asiatique, mais c’est bien la fusion (version salad-bowl) du<br />
Cameroun et du Japon traditionnel.<br />
32. voir les kimonos en annexe (p.57)<br />
Elodie Molia - Juin 2011