Quel sens donner au Graphisme ethniQue ? - graphic design

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Mémoire professionnel - Bachelor Graphic Design 2
que le maître se sente plus inspiré que l’héritier naturel de la civilisation
noire et amérindienne. Et pourtant si paradoxale que pourrait paraître cette
remarque, c’est ici que nous voulons en venir ; comment se fait-il que l’on
surnomme Wilfredo Lam, le « Picasso Cubain » alors que les ressemblances
ne restent que formelles et qu’elles ne représentent qu’une partie de l’oeuvre
de Picasso ? Et d’ailleurs pourquoi les productions de Lam se distinguent tant,
malgré tout, des travaux de Picasso 35 . Parce que les forces et les esprits qui
les animent ne seront jamais les mêmes. Parce que même-si Picasso a très bien
réussi son acculturation, dans son for intérieur il reste un artiste européen, de
formation classique, d’éducation espagnole, ayant été témoin des deux guerres
mondiales, et de la guerre civile espagnole. C’est peut-être par ce biais que se
construit et évolue une écriture graphique ; plus les influences seront diverses
et distinctes, et plus l’écriture se verra singulière.
La notion d’héritage culturel est assez complexe ; il faudrait que l’on puisse
définir clairement ce que l’on entend par héritage culturel : est-ce la tradition
que l’on pourrait assimiler à Wilfredo ou les diverses influences sociétaires
qu’a subi Picasso? Une réponse clairement définie est difficile à poser mais
ce que nous appelons héritage sera effectivement déterminant quel que soit sa
nature.
b) au delà du folklorique:
«...Ne sommes nous pas tous convaincus que toute création prend place dans
un contexte spécifique, un terrain d’origine, tout en se développant de manière
autonome. Si l’art n’a pas de frontière, les artistes qui le produisent sont ancrés
dans une réalité sociale, politique et économique, qui influe nécessairement
sur leur production. » 36
La découverte de la raison d’être de l’art africain et des sculptures, en particulier
comme étant des fétiches, va donner naissance à ce que l’on va nommer
en occident l’art moderne. C’est un nouveau tournant pour l’art européen. Si
Picasso n’avait pas fait cette visite au musée du Trocadéro, personne ne sait
ce que l’art de l’occident serait devenu. Personne ne sait ce que l’art contemporain
serait devenu, car l’art moderne européen est le fondement de l’art
contemporain international. Puisque ce sont bien des européens tels que Paul
Klee, Picasso, Juan Gris, Fernand Léger, Mondrian, Kandinsky et d’autres
(tous des européens) qui ont importé ou ouvert le champ de l’abstraction, du
cubisme et l’art moderne plus largement, en Amérique.
Il en va sans dire que si l’art africain a eu un impact sur l’art, il a également
fortement conditionné le Graphisme tel que nous le connaissons.
Saki Mafundikwa 37 par le biais de son œuvre et de la fondation de l’école
ZIVA, veut créer un nouveau langage. Un langage qui sera libéré du formatage
européen, un langage qui découlera des riches inspirations qui proviennent
de l’Afrique. Il veut casser l’hégémonie des standards suisses. « Comment
se fait-il que le travail de designers mozambicains ressemble à celui d’un designer
suisse ? » Le designer doit répondre à ses propres inspirations et aspirations et
non à celles des autres. Le designer ethnique, et africain en particulier devra
créer son propre langage en associant la technique apprise lors de ses études
occidentales et sa sensibilité particulière qu’il aura établie à partir de sa propre
35. extrait du catalogue Africa Remix - avant-propos
36. juxtaposition de deux œuvres majeures des maîtres en annexe (p.61)
37. Interview de Saki Mafundikwa en annexe (p.62)
Elodie Molia - Juin 2011