La Déesse de Grattavache - Margelle

Elles acceptaient d’être des objets de désir, d’êtres vendues par les marchands,
elles faisaient tout pour cela et les conséquences étaient horribles. Il pleura.
Dans son désir de se purifier il travailla avec des enfants à nettoyer les rivières
du pays. Les jeunes avaient toujours leur d’âme vivace et joyeuse, c’était bon.
Il vit qu’on la leur volait vite. Où allait cette énergie de vie ? Qui la dérobait ?
Anciennement c’était le privilège du diable. Y avait-il un diable dans ce présent ?
À quoi ressemblait-t-il ?
Il poursuivit vers l’Est. Pas vers le Levant, vers l’Est, s’éloignant des bords
d’un grand lac. Il se sentait de plus en plus incapable de porter un jugement sur
ce monde. Il en connaissait les bases mais il ne savait rien de ce qui s’était mis en
place. Il marcha vers l’Est, le Nord-Est, quelque chose l’attirait là-bas, il suivait
sa musique intérieure. Le pays romand est un beau pays. Il n’était pas habitué à
son climat. Une femme dont il avait nettoyé la demeure lui donna des vêtements.
Ils avaient appartenu à son fils, mort sur la route. Les filles regardèrent de plus
belle cet homme en jean et blouson de cuir qui était si beau, si calme. À leurs
yeux il eut été un candidat parfait pour Star Académie. Jésus était gentil avec
elles. Tendre et attentionné. Il savait combler leurs besoins. Il les rendit plus
belles, plus naturelles, plus désirables. Des générations durant on parlerait de
ces filles vaudoises renées à la vie. Un docteur était passé par là, le plus grand.
Celui qui savait le principe de lenteur et de sûreté. Il n’aurait eu aucun problème
à s’installer dans ce pays, on l’aimait. Seul le voile noir le craignait et le tuerait
s’il en avait la possibilité. Mais les gens faisaient barrière. Jésus était, très
simplement dit, la dimension des miracles. Pas un Dieu. Juste un homme avec
un grand pouvoir de faire le bien.
Il resta quelque temps dans la région de Cossonay et d’Echallens. Puis se
remit en route vers l’Est. Pas vers Jérusalem, vers l’Est.
Une image se précisait dans son esprit, un ensemble de maisons tranquilles,
dans une sorte de cuvette. Quelques bosquets d’arbres aux alentours. Il ne suivait
pas toujours les routes, il coupait à travers champs. Sur la route d’Oron il
croisa un vieil homme illuminé qui parlait électriquement avec le monde. Un
fou, un merveilleux fou comme il en avait connu dans le désert. Il avait un beau
nom, il se nommait Berger. Jésus écouta longuement ce prophète et lui suggéra
de se détourner du futur un instant. C’était presque inutile. Berger vivait aussi
le présent, il avait une passion pour les animaux, il les comprenait, il savait leur
parler. Sa présence fit du bien à notre pèlerin et la musique en lui se répandit,
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