La Déesse de Grattavache - Margelle

Paso doble
La langue des banquiers est une langue religieuse
réservée aux prêtres et à leurs acolytes, comme le
latin d’Église ou les symboles du temps chez les
Incas. Elle est précise, flexible, subtile et parfaitement
inintelligible à la populace profane. C’est la preuve
du caractère cyclique de l’Histoire, parce que les
premières banques du monde furent les temples de
Babylone, de la Grèce et de Rome, où l’on pouvait
faire des emprunts, déposer de l’argent, préparer le
crédit et mettre à l’essai nos pièces de monnaie sous
l’œil vigilant de la divinité locale. (Discours du colonel
Matucci dans La Salamandre de Morris West)
- Lequel de ces voyous t’a fait perdre le plus de temps ? s’intéressa Diamant
Noir. Parce que, en fin de compte, tant que tu papotes avec ces abrutis, tu ne
gagnes rien.
- Et même je perds, soupirais-je. La réponse, c’est un coup de maître de
LeFuret le renard rusé et souriant.
- Oh ? Je croyais que l’on avait tout dit de celui-là ?
- Yaein ! fis-je en langage confédéré 1 . Un jour LeFuret passe me voir, la porte à
cette époque lui est grande ouverte, et il me dit qu’il pratique la pêche à la truite.
Je dois ouvrir de grands yeux parce qu’il se marre et m’explique qu’il va rabattre
vers moi un promoteur français de haut vol. Je grimace. Les Frouzes, en affaires,
c’est pas catho. Ni même ano. 2 Après les habituels rendez-vous décommandés
(c’est un rite, plus on fait attendre plus on est important) se pointe M. Arnamphle
avec son équipage. Il se situe assez vite : nerveux, aucune éducation, un parler
condensé presque onomatopoétique, il ressemble à un mini Bernard Tapie,
se posant ça et là avec son hélico biturbine pour brasser énormément d’air et
d’affaires. Actuellement il vole en Falcon 500 mais a de la peine à payer son
partagiciel… C’est un rapide et en deux ou trois entrevues nous faisons affaires.
1 Dialecte suisse : oui mais non…
2 Nous imaginons un jeu de mots sur cathode et anode. NdT
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