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La Déesse de Grattavache - Margelle

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lu en lui ce que je te décris. Je lui ai directement posé la question : oui, il traversait<br />

la même difficulté que moi, oui, il ne savait pas s’il survivrait à son épreuve<br />

et il était jeune ! Cette conversation m’a permis, par une sorte <strong>de</strong> miracle réactif,<br />

<strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> ma prison. Je suis <strong>de</strong>venu plus luci<strong>de</strong> qu’avant et c’était une chance<br />

car les charognards s’étaient regroupés et s’approchaient <strong>de</strong> moi. Je crois qu’à ce<br />

moment je t’aimais beaucoup, toi ma colère venimeuse, je crois que je n’avais<br />

pas encore compris que tu étais l’alliée <strong>de</strong> mes ennemis. Tu me brûlais à petit<br />

feu, je pensais souvent que tu étais ma force. C’était faux, maintenant je le sais.<br />

Il m’est venu une claire conscience <strong>de</strong>s mécaniques du mon<strong>de</strong> où nous vivons.<br />

J’ai progressivement compris qu’il n’y avait ni Dieu, ni compassion, pas d’amour,<br />

que le système sous ses formes diverses, que les légions du Mal qui se résument<br />

toutes à l’argent. Je reconnais que j’ai admiré la complexité <strong>de</strong> la machine qui<br />

nous étouffe tous. Rien ni personne ne lui échappe. Dieu ? Il fallait s’en méfier<br />

comme <strong>de</strong> la peste. Il n’apparaissait que sous <strong>de</strong>ux formes réellement divines : la<br />

nature, et l’image que nous pouvons nous faire <strong>de</strong> lui. J’ai pris à mon compte une<br />

pensée connue, j’ai décidé <strong>de</strong> l’aimer et <strong>de</strong> ne surtout pas lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r son ai<strong>de</strong><br />

dans mes problèmes d’argent. C’est hélas ce que tout le mon<strong>de</strong> fait… j’en éprouvais<br />

<strong>de</strong> la honte. C’était horriblement difficile <strong>de</strong> ne pas lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> me<br />

soutenir, c’était aller contre la nature humaine qui est lâche et veule dans le danger.<br />

Peu à peu, avec beaucoup <strong>de</strong> rechutes, je me suis forgé un mental <strong>de</strong> guerrier.<br />

Castaneda et ses récits m’ont aidé. Mais je me rendais compte <strong>de</strong> ma paranoïa.<br />

Totale. Toutes ces années je scannais le mon<strong>de</strong>. C’est ma façon <strong>de</strong> penser,<br />

je scanne et je vois <strong>de</strong>s possibles. Dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’argent, ma paranoïa est<br />

<strong>de</strong>venue constante et aiguë. J’apprenais, j’écoutais, je lisais, j’enregistrais toutes<br />

mes conversations et j’avais accès à beaucoup <strong>de</strong> documents. Un jour je suis allé<br />

chez l’un <strong>de</strong>s avocats qui me défendait, j’avais la certitu<strong>de</strong> qu’il travaillait contre<br />

moi, en sous-marin, en taupe. Il m’a été très facile <strong>de</strong> lui dérober les documents<br />

qui l’accablaient. Il m’a suffi <strong>de</strong> lui réclamer un texte qui n’était pas dans la salle<br />

<strong>de</strong> conférence et, dans les trente secon<strong>de</strong>s dont je disposais, <strong>de</strong> déposer une<br />

fourre sur la table et d’y glisser les feuillets qu’ils consultait l’instant d’avant. Il<br />

fallait le faire ostensiblement, avec calme, évi<strong>de</strong>nce. Être insoupçonnable. C’était<br />

facile. Je lui ai même proposé que nous rouvrions mon dossier pour le feuilleter<br />

mais, surpris, il a refusé. Revenu chez moi, j’y ai trouvé <strong>de</strong> l’explosif, mais pas<br />

toutes les informations sur son double jeu avec moi. Il se préparait à faire transiter<br />

<strong>de</strong>s fonds certainement douteux pour financer <strong>de</strong>s casinos. Pour lui rendre<br />

ses documents compromettants j’ai utilisé une technique féminine, je l’ai appelé<br />

et je lui ai fait une vraie scène : « Qu’est-ce que c’est que ces feuillets <strong>de</strong> mer<strong>de</strong><br />

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