Documents Autentiques VOL 2 Stern

15 octobre 1847 Doc. 309
que par quelques mots que l’on surprend à la dérobée, et dont il
ne s’aperçoit pas lui-même. Il est si pur, qu’il n’a pas même
l’idée du vice, et qu’il ne comprendrait pas le langage qui pourrait
l’indiquer. Il va à la prière avec le même bonheur et le même
empressement qu’il se porte aux jeux de l’enfance. Son attrait
[p. 51] est de servir la messe. Son naturel léger et remuant ne
l’abandonne pas toujours alors ; mais on a remarqué avec raison
que cette disposition était inhérente à son caractère et à son
organisation physique (Pèlerinage de la Salette par M. l'abbéBez,
p. 24). Son humilité est sincère, elle perce à l’instant même,
quand vous lui donnez quelque marque d ’affection : il trouve
alors aussitôt des expressions qui n ’appartiennent qu’à lui pour se
remettre à sa place de pauvre berger. On conçoit à peine qu’un
enfant qui se montre avec un caractère naturellement volage, soit
si ferme et si constant à garder le secret de ce qu’il ne doit pas
dire. Toutes les tentatives à cet égard, de quelque part qu’elles
vinssent, ont toujours été inutiles.
Portrait de Mélanie.
Réunissez dans votre imagination tous les traits qui vous
semblent devoir peindre la modestie la plus parfaite et la plus
[p. 52] saisissante, et vous aurez à peine une idée de celle de
Mélanie. Elle a un visage régulier et délicat ; ses yeux sont pleins
de douceur, et sa voix est d’une aménité angélique qui vous
pénètre, à l’instant, d ’estime et d ’une certaine considération. Rien
qui annonce la rusticité des bergères de la montagne. Changez ses
vêtements, et vous ne soupçonnerez plus qu’elle est née dans le
plus misérable des réduits, et que ses parents, ses frères et sœurs
attendent l’aumône qui doit secourir leur profonde indigence.
Mélanie a près de seize ans : à peine croirait-on qu’elle en a
douze. Elle parle peu, et seulement quand on l’interroge. Alors
elle le fait avec une grâce qui emprunte du ton délicieux de sa
voix et de sa retenue un charme inexprimable. Ce qu’elle dit est
d ’une justesse qui ravit ; mais elle ne s’en doute pas : un enfant
de six ans ne s’exprimerait pas avec plus de simplicité et moins de
prétention. Elle paraît attacher beaucoup d’intérêt à l’explication
de la doctrine chrétienne. Elle dit sans [p. 53] façon ce qu’elle
pense sur les points susceptibles de recevoir des interprétations
diverses ; mais si un autre développement leur est donné, elle
laisse apercevoir, par un modeste sourire, qu’elle l’accueille avec
satisfaction. Elle n ’est pas sans vivacité, mais on voit qu’elle sait
la contenir par une disposition naturelle de convenance ; elle est
ingénue et sans détour. Elle ne partage pas toujours l’avis de
Maximin, qui ne s’en fâche pas ; mais si elle émet une opinion
différente, elle n’y donne pas, pour cela, de la valeur et de
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