Documents Autentiques VOL 2 Stern

11 juin 1848 Doc. 427
qu’ils disent va si loin, que quand il leur arrive de faire
quelqu’une de ces réponses véritablement étonnantes, parfaitement
inattendues, qui confondent les interrogateurs, coupent court à
toutes les questions indiscrètes, résolvent simplement, profondément,
absolument, les plus graves difficultés, ils n’en triomphent
en rien. On est quelquefois stupéfait ; pour eux ils demeurent
impassibles. Le plus léger sourire ne vient pas seulement errer sur
leurs lèvres.
Du reste ils ne répondent jamais aux questions qu’on leur
adresse que de la manière la plus simple et la plus brève. La
simplicité est quelquefois rustique, mais la justesse et la précision
sont toujours extraordinaires. Dès qu’il s’agit du grand événement,
ils ne paraissent plus avoir aucun des défauts ordinaires de leur
âge : surtout ils ne sont en rien conteurs et bavards. Maximin
cause beaucoup d ’ailleurs : quand il est à l’aise, c’est un véritable
petit babillard : pendant les quatorze heures que nous avons
passées ensemble, il m’a donné de ce défaut toutes les preuves
possibles ; il m’a parlé de toutes choses et avec une grande
abondance de paroles, m ’interrogeant sans aucune retenue, me
disant le premier son avis, contredisant le mien. Mais sur
l’événement qu’il raconte, sur ses impressions, sur ses craintes ou
ses espérances pour l’avenir, sur tout ce qui se rattache à l’apparition
ce n ’est plus le même enfant. Sur ce point il ne prend jamais
l’initiative, il n ’a jamais une indiscrétion, jamais une inconvenance.
Il ne donne jamais un détail au-delà de ce qu’on lui demande
précisément. Quand il a dit le fait qu’il est chargé de dire, quand
il a répondu à la question qu’on lui adresse, il se tait. On est
avide, on voudrait qu’il parlât toujours, qu’il ajoutât des détails,
qu’il racontât ce qu’il a éprouvé, et ce qu’il éprouve encore ; mais
non ; il n ’ajoute pas un mot à la réponse nécessaire. Puis
bientôt il reprend le fil interrompu de sa conversation, parle fort
abondamment d ’autre chose, s’il y a lieu, ou s’en va.
Le fait certain est qu’ils n’ont ni l’un ni l’autre absolument
aucune envie de causer de l’événement qui les rend cependant si
célèbres.
D ’après tous les renseignements que j’ai recueillis sur les
lieux, ils n’en causent jamais inutilement avec personne, ni avec
leurs petits camarades, ni avec les religieuses qui les élèvent, ni
avec les étrangers. Quand on les interroge, ils répondent : ils
disent le fait simplement, si c’est le fait qu’on leur demande ;
donnent simplement la solution, si c'est une difficulté qu’on leur
propose ; n’ajoutent rien à ce qui est nécessaire, et ne retranchent
rien non plus. Ils ne refusent, du reste, jamais de répondre aux
questions qu’on leur adresse, mais on ne peut venir à bout de les
faire parler au-delà d ’une certaine mesure. Vous aurez beau
multiplier les questions indiscrètes : leur ré-[p. 50]ponse ne l’est
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