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Book reviews – Comptes rendus – Buchbesprechungen 125
demandé pour affiner la marche ultime vers le complet respect des critères de convergence
en 1999-2002 est en fait bien moindre que celui effectué pour redresser la situation entre
1993 et 1998 (quand le déficit global des quinze pays a reculé de 6,1% en 1993 à 1,8% en
1998; l'Italie et l'Allemagne parvenant à 2,6% et la France à 2,9%) – d'autant plus que la
baisse des taux d'intérêt facilite le mouvement. Certes, avec lucidité, les économistes
relèvent que la perception 'politique' est différente de la leur, puisque contraindre les économies
et les citoyens aux efforts de la dernière étape est précisément l'enjeu des luttes
démocratiques de la fin des années 1990 et du tournant du siècle. Mais ils insistent sur la
souplesse prévue en réalité par le projet d'eurolande puisque la marge de fluctuation tolérée
pour le déficit budgétaire en cas de récession (2% du PNB) laisse une marge de manœuvre
aux autorités nationales pour enclencher une politique autonome.
Cela dit, le débat s'intensifie entre les experts: peut-on véritablement continuer à tolérer
une telle autonomie et de telles différences dans la gestion des pays? En effet, si les politiques
budgétaires tendent à respecter les fameux critères de convergence, le besoin semble
se faire de plus en plus sentir d'une coordination des politiques fiscales, dans la mesure où
des écarts trop sensibles pourraient influer sur les taux d'intérêt de la BCE voire sur le niveau
du change de l'euro. Naturellement, les experts recommandent la création d'un comité
d'experts, d'un conseil des politiques économiques qui émettrait des recommandations quant
aux politiques fiscales, ou tout au moins le renforcement de la capacité d'intervention de la
Commission et du Comité économique & financier dans ce domaine, afin de mieux expliciter
les objectifs de stabilité économique des gouvernements et d'une confrontation des
effets des politiques budgétaires sur l'évolution globale de l'eurolande.
Un troisième débat concerne le rythme de l'intégration des PECO à l'eurolande et à
l'Union européenne. Un rappel chronologique et une appréciation de l'évolution de chacun
des candidats en fonction des critères de convergence souhaités apparaissent alors. La multiplicité
des démarches d'intégration est évaluée; les experts évoquent la possibilité d'appliquer
aux nouveaux membres ou aux candidats à l'adhésion les méthodes du Système
monétaire européen qui avait fonctionné depuis 1979 – et qui a été maintenu de facto pour le
Royaume-Uni, la Suède et le Danemark (et la Grèce jusqu'à la fin de 2000). Comment alors
favoriser la stabilisation monétaire dans les PECO en vue de leur intégration? Il eût été utile,
nous semble-t-il, d'effectuer un rappel de l'illustre stabilisation monétaire des PECO dans les
années 1926-1932 pour bien marquer les différences certes, mais aussi pour scruter les
enjeux politiques et diplomatiques. Quoi qu'il en soit, les experts insistent sur le rôle de la
coopération entre la BCE et les banques centrales des PECO, sur le rôle clé de ces dernières:
constitution de réserves; gestion fine du niveau de stabilisation de chaque monnaie, pour ne
pas compromettre les exportations; animation de la gestion du taux de change flexible
(comme en Hongrie depuis 1990.
La réussite, potentielle à l'époque de la table ronde, mais vérifiée par les faits, de la mise
en oeuvre de l'eurolande conduit à s'interroger sur ses rapports avec le système monétaire
international : une nouvelle architecture monétaire doit-elle en être la conséquence ? L'euro
peut-il devenir une monnaie de réserve? quel doit être le poids de l'euro au sein des 'droits de
tirage spéciaux' du FMI? les banques centrales et la BCE peuvent-elles accéder à une
autorité quelconque au sein du FMI? Toutes ces questions restent d'actualité.
La richesse de ce livre est à la fois factuelle (tableaux, séries) et intellectuelle (débats,
interrogations, remise à plat de fausses évidences) et il est clair que de telles tables rondes
entre experts jouent bien leur rôle d'éclairage des décideurs et d'information de la communauté
universitaire.
Hubert Bonin
Professeur d'histoire économique contemporaine
à l'Institut d'études politiques de Bordeaux