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la catastrophe - Manioc

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CEUX QUI ONT VU<br />

sons, cherchant un abri, n'importe lequel. Ce fut un exode<br />

inoubliable vers <strong>la</strong> campagne. Chacun emportait ce qu'il<br />

avait de plus précieux. Les femmes portant leurs enfants,<br />

les hommes soutenant leurs femmes, en d'indescriptibles<br />

théories, se dirigeaient vers l'intérieur des terres. Là, sur<br />

les hauteurs, on n'aurait pas du moins à craindre l'envahissement<br />

brusque des maisons par les eaux, <strong>la</strong> noyade<br />

finale sans perpective de fuite. On se trouverait encore à<br />

couvert d'un tremblement de terre, tous événements que<br />

l'on appréhendait par-dessus tout.<br />

Ce fut, durant toute <strong>la</strong> matinée, une procession fantastique,<br />

sous <strong>la</strong> cendre aveug<strong>la</strong>nte et salissante, de toute une<br />

popu<strong>la</strong>tion affolée, pareille à un troupeau de moulons surpris<br />

dans <strong>la</strong> vallée, dans <strong>la</strong> première tourmente d'une tempête<br />

effroyable.<br />

Vers midi, <strong>la</strong> nouvelle de <strong>la</strong> disparition de Saint-Pierre<br />

commença à circuler. La ville avait été détruite, disait-on,<br />

par le feu, et les conjectures d'aller leur train. Comment<br />

faire pour avoir des renseignements précis ? Plus de communication<br />

téléphonique. Le poste de Saint-Pierre, après<br />

un cri d'ultime souffrance du préposé alors au cornet,<br />

s'était tu. Le « Marin », de <strong>la</strong> compagnie Girard, qui rentrait<br />

à Saint-Pierre, n'avait pu s'en approcher. Du bord on<br />

avait bien vu les maisons du littoral ou plutôt ce qui en<br />

restait en proie aux f<strong>la</strong>mmes ; quant aux autres, il avait été<br />

impossible de les distinguer, enveloppées qu'elles étaient<br />

d'un brouil<strong>la</strong>rd impénétrable de cendre et de fumée. Le<br />

bateau était revenu à Fort-de-France.<br />

Ce fut alors une heure d'angoisse indicible. Tous ceux<br />

qui étaient restés ou qui étaient revenus en ville, se portant<br />

sur le rivage, s'interrogeaient les uns les autres, <strong>la</strong> mort<br />

dans l'âme, avec l'idée d'obtenir un renseignement quelconque<br />

de <strong>la</strong> ville-sœur. Chacun y comptait un parent, un<br />

ami ou une connaissance. Durant de longues heures, tandis<br />

que <strong>la</strong> troupe postée aux abords des quais et le long des<br />

magasins du bord-de-mer, où l'on venait d'apposer les

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