103/104 : Colloque 2003, etc. - Société des Amis d'Alfred Jarry

Actes
du colloque 2003
de peine et j'ai eu bien tort de m'arrêter à lui. Je ne sais tous les tours
qu'ils ont fait — lui et son ami — à Pont-Aven. Il paraît qu'on les retient
pour cause que vous pensez. J'ai écrit d'une manière très dure au petit
l'invitant à me laisser la paix, une dernière fois, et à me rendre le plus
prestement possible les études que je lui ai confiées.
Si je vous conte la petite histoire, c'est pour vous prévenir du petit
bonhomme, car il serait fâcheux qu'il aille vous importuner à son retour à
Paris. »
Le deuxième passage donne d'autres détails :
«Je n'ai pas encore eu de nouvelles des jeunes gens de la + [Rose Croix].
Je ne veux pas vous parler de l'argent qu'ils m'ont extorqué mais j'ai grand
peur pour les études que j'ai confiées au petit. Enfin je vais attendre encore.
Savez-vous qu'ils ont poussé la malhonnêteté, étant encore à Pont-
Aven, de publier à qui voulait les entendre qu'ils étaient autorisés par moi
à prendre tout ce qu'ils voudraient de mes choses chez Le Barc. La chose
m'a été rapportée de suite. Comme vous pensez et c'est ce qui m'a fait
écrire sévèrement une première fois au petit. Et vous ignorez sans doute
qu'ils ont pris la fuite de Pont-Aven nuitamment, mais peu heureux dans
leur aventure. La gendarmerie les a cueillis à la gare de Quimperlé au
moment où l'un d'eux allait monter dans un train. Vous voilà bien édifié
n'est-ce pas, mon cher ami, au sujet de cette belle jeunesse que vous avez
cru simplement égarée. Je vous demande pardon de vous ennuyer avec
de tels racontars, mais je crois bien faire de vous prévenir encore une fois
vis-à-vis des gens de petite valeur mais d'une audace sans nom. »
Ces lettres attestent d'une part de l'implication, probablement passagère,
de Fargue durant cette époque au mouvement de la Rose + Croix (il en fallait
peu pour être admis), et aux événements autour du sâr Peladan, tel le fameux
Salon Rose + Croix chez Durand-Ruel en mars-avril 1892 et 1893. D'ailleurs,
la correspondance de Fargue à Alfred Jarry de Cobourg le montre lorsqu'il
enjoint ce dernier à aller visiter les expositions Rose + Croix dont il ne semble
rien ignorer. De même, la première lettre de Filiger à Fargue souligne cela par
le dessin en en-tête. D'autre part, cette correspondance Filiger-Bois montre le
réel courroux de Filiger vis-à-vis de Fargue, et donne quelques précisions sur la
mésaventure des « petits Parisiens », qui vont finir entre deux gendarmes...
En allant plus loin, on peut émettre l'hypothèse que tout cela donne l'une
des clés de la future brouille avec Jarry, à cause de Maurice Thomas et de
Cremnitz qui supplanteraient Jarry comme « meilleur ami », et de l'attitude de
Fargue vis-à-vis des œuvres de Filiger. C'est probablement aussi, on le verra
dans la troisième lettre de Filiger à Fargue, de juin 1894, la raison de l'aban-
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