103/104 : Colloque 2003, etc. - Société des Amis d'Alfred Jarry
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Actes<br />
du colloque <strong>2003</strong><br />
On peut dès lors estimer que la séparation entre <strong>Jarry</strong> et Fargue ne fut<br />
pas placée sous le signe de la haine, malgré une scène de rupture houleuse<br />
rapportée par Rachilde, et qu'ils furent très vite amenés à se rencontrer, par<br />
nécessité, probablement en s'ignorant... superbement !<br />
Pour un art vraiment nouveau<br />
ATRAVERS ces témoignages de la passion commune de Fargue et <strong>Jarry</strong><br />
pour la peinture, et surtout de leurs goûts communs, il nous a semblé<br />
que nous nous retrouvons là au cœur de ce qui a réuni ces deux « qui se<br />
disaient poètes », au jeune âge où tout est à découvrir et où les sensations<br />
sont à partager. Et c'est sûrement là, la peinture, le domaine de la sensation<br />
vraie qui a marqué réellement l'amitié entre les deux jeunes hommes. Fargue<br />
a été le précurseur dans ce domaine, par ses amitiés et par sa connaissance<br />
de Paris. Mais <strong>Jarry</strong> n'a pas dû être long à s'imposer. Puis les deux amis inséparables<br />
se sont mis à jouer un rôle qui les ferait remarquer. D'autres domaines,<br />
la littérature, la reconnaissance par le monde littéraire, ont sûrement<br />
dû donner lieu à <strong>des</strong> faux-semblants et <strong>des</strong> fausses situations, <strong>des</strong> poses, et<br />
notamment l'adelphisme sur lequel on a beaucoup écrit. C'était là le lieu <strong>des</strong><br />
représentations volontaires de « La Tête de Mort et de l'Androgyne » comme<br />
les a épingles L. Lormel dans un texte satirique publié en 189738. Hubert Juin<br />
rapporte que Rachilde laissait entendre qyC Haldernablou était la projection<br />
d'une entente fort vive qui s'était nouée, à Paris, entre <strong>Jarry</strong> et Fargue, au<br />
grand déplaisir, paraît-il, <strong>des</strong> parents de ce dernier, lesquels accusaient <strong>Jarry</strong><br />
d'exercer sur leur fils la plus détestable <strong>des</strong> influences. « Ces frères trop jumeaux<br />
», disait Rachilde59. La peinture au contraire a été le domaine d'une vraie passion, pour les<br />
Nabis, pour Gauguin, et a représenté l'exemple de ce qu'était pour eux une<br />
révolution en art. <strong>Jarry</strong> et Fargue ont alors ressenti, chacun à sa manière,<br />
qu'il était nécessaire pour exister de marquer leur différence, à travers leur<br />
empreinte propre à apposer sur la langue. Dans un premier temps, ce qui<br />
prime c'est la forme, le style. Poétique résumée par <strong>Jarry</strong> au linteau <strong>des</strong><br />
Minutes de sable mémorial :<br />
38. Louis Lormel, « Entre soi », La Plume, 1 er<br />
oct. 1897; repris dans L'Étoile-Absinthe,<br />
39-40 es<br />
tournées, 1988. Récit qui, lui aussi, présentait l'adelphisme <strong>Jarry</strong>-Fargue<br />
comme une pose de circonstance, cherchant à choquer, suivant en cela le précepte<br />
de Gourmont dans ses Conseils familiers à un jeune écrivain : « Cela doublera votre<br />
réputation, si vous en avez déjà, et si vous êtes encore inconnu, suffira à vous mettre<br />
en bon rang parmi les curiosités littéraires. »<br />
39. Hubert Juin, « Alfred <strong>Jarry</strong> et la littérature de son temps», op. cit.<br />
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