http://www.jeuverbal.fr Spitzer, L'effet de sourdine ... - le jeu verbal
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<strong>http</strong>://<strong>www</strong>.<strong><strong>jeu</strong><strong>verbal</strong></strong>.<strong>fr</strong><br />
Andr., I, 4 :<br />
Le sort vous [Andromaque et Hermione] y voulut l'une et l'autre amener<br />
Vous, pour porter <strong>de</strong>s fers, el<strong>le</strong>, pour en donner…<br />
Et ne dirait-on pas, en voyant, au contraire,<br />
Vos charmes tout-puissants, et <strong>le</strong>s siens dédaignés,<br />
Qu'el<strong>le</strong> est ici captive, et que vous y régnez?<br />
Ath., IV, 3 :<br />
Roi, voilà vos vengeurs contre vos ennemis,<br />
Prêtres, voilà <strong>le</strong> roi que je vous ai promis.<br />
L'absence <strong>de</strong> liens entre <strong>le</strong>s groupes con<strong>fr</strong>ontés est d'autant plus tranchante que<br />
l'association syntaxique <strong>de</strong>s membres antithétiques est plus étroite :<br />
Andr., III, 6 :<br />
Finissant là sa haine et nos misères.<br />
IV, 3 :<br />
Prenons, en signalant mon bras et votre nom,<br />
Vous, la place d'Hélène, et moi, d'Agamemnon.<br />
Baj., II, 1 :<br />
Croiront-ils mes périls et vos larmes sincères?<br />
II, 5<br />
Le ciel punit ma feinte, et confond votre adresse;<br />
V, 12 :<br />
[Il faut]<br />
Que ma fidè<strong>le</strong> main te venge et me punisse.<br />
Phèdre, IV, 1 :<br />
Et plaignant à la fois son troub<strong>le</strong> et vos alarmes.<br />
La rapi<strong>de</strong> opération menta<strong>le</strong> que ces pronoms et ces possessifs exigent <strong>de</strong> nous<br />
réduit d'autant notre participation affective. Dans <strong>le</strong> passage d'Iphigénie:<br />
Mettons en liberté ma tristesse et <strong>le</strong>ur joie.<br />
Mesnard admire (op. cit., p. XLI) « ces beautés <strong>de</strong> diction, ces expressions aussi<br />
origina<strong>le</strong>s que justes » - disons plutôt trop justes, trop origina<strong>le</strong>s, pour être entièrement<br />
poétiques! Le travail mental nécessaire à la dissociation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux expressions soudées par<br />
Racine :<br />
... une loi moins sévère<br />
Mit Clau<strong>de</strong> dans mon lit et Rome à mes genoux<br />
ce travail mental vient troub<strong>le</strong>r <strong>le</strong> plaisir poétique.<br />
Racine a conçu une variante toute particulière <strong>de</strong> l'antithèse: cel<strong>le</strong> qui nous ouvre<br />
une perspective insoupçonnée : l'écou<strong>le</strong>ment du discours nous amène soudain au<br />
bord d'un gouf<strong>fr</strong>e où nous pouvons jeter <strong>de</strong>s regards d'horreur. Toute l'amplitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />
passion vibrant en tous sens s'ouvre à nous dans un éclair :<br />
Andr., 1, 4 - Pyrrhus :<br />
Eh bien, Madame, eh bien, il faut vous obéir<br />
Il faut vous oublier, ou plutôt vous haïr.<br />
Oui, mes voeux ont trop loin poussé <strong>le</strong>ur vio<strong>le</strong>nce<br />
<strong>Spitzer</strong>, L’effet <strong>de</strong> <strong>sourdine</strong> dans <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> classique : Racine. 38