http://www.jeuverbal.fr Spitzer, L'effet de sourdine ... - le jeu verbal
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II, 5<br />
Mais je sens que bientôt ma douceur est à bout.<br />
Que Joad mette un <strong>fr</strong>ein à son zè<strong>le</strong> sauvage,<br />
Et ne m'irrite point par un second outrage.<br />
Al<strong>le</strong>z.<br />
<strong>http</strong>://<strong>www</strong>.<strong><strong>jeu</strong><strong>verbal</strong></strong>.<strong>fr</strong><br />
Souvent un mot prend d'abord la forme d'une ou plusieurs périphrases<br />
rhétoriques, avant d'être simp<strong>le</strong>ment énoncé lui-même :<br />
Phèdre, III, 1 :<br />
Moi, régner! Moi, ranger un État sous ma loi,<br />
Quand ma faib<strong>le</strong> raison ne règne plus sur moi!<br />
Lorsque j'ai <strong>de</strong> mes sens abandonné l'empire!<br />
Quand sous un joug honteux à pei1'te je respire!<br />
Quand je me meurs!<br />
Quand je me meurs éclate comme la foudre; pour reprendre une formu<strong>le</strong><br />
<strong>fr</strong>équente dans <strong>le</strong>s histoires littéraires <strong>fr</strong>ançaises : « Racine a enseigné la force du mot<br />
propre. » De même Andr., l, 1 :<br />
Car enfin n'attends pas que mes feux redoublés<br />
Des périls <strong>le</strong>s plus grands puissent être troublés.<br />
Je me livre en aveug<strong>le</strong> au transport qui m'entraîne.<br />
J'aime.<br />
Baj., I, 1 :<br />
Mais si dans <strong>le</strong> combat <strong>le</strong> <strong>de</strong>stin plus puissant<br />
Marque <strong>de</strong> quelque af<strong>fr</strong>ont son empire naissant,<br />
S'il fuit, ne doutez point que ...<br />
Dans tous ces exemp<strong>le</strong>s on trouve l'expression naturel<strong>le</strong> d'un sentiment vrai, venu<br />
du fond du coeur, mais el<strong>le</strong> jette seu<strong>le</strong>ment ses feux sous un écrin <strong>de</strong> mots souvent «<br />
précieux ». Le ton spontané n'est qu'une variante, tout au plus une gradation du sty<strong>le</strong><br />
orné.<br />
À l'aposiopèse s'oppose, d'une autre manière, l’amplification a posteriori du<br />
discours, aboutissant à une structure asymétrique. Là encore, nous pourrions avoir<br />
l'impression spontanée d'un discours dont <strong>le</strong>s vagues submergent <strong>le</strong>s rives naturel<strong>le</strong>s, si<br />
ce mo<strong>de</strong> d'expression n'était <strong>de</strong>venu lui aussi une recette typique <strong>de</strong> Racine: voir <strong>le</strong>s<br />
exemp<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Marty-Laveaux, p. cxv, p. ex. <strong>le</strong>s quatre vers raccrochés, parallè<strong>le</strong>s à tant<br />
d'alarmes:<br />
Bérénice, Seigneur, ne vaut point tant d'alarmes,<br />
Ni que par votre amour l'univers malheureux,<br />
Dans <strong>le</strong> temps que Titus attire tous ses voeux<br />
Et que <strong>de</strong> vos vertus il goûte <strong>le</strong>s prémices,<br />
Se voie en un moment en<strong>le</strong>ver ses délices.<br />
Cf. Phèdre, I, 1 :<br />
Il veut avec <strong>le</strong>ur soeur ensevelir <strong>le</strong>ur nom;<br />
Et que…<br />
Jamais <strong>le</strong>s feux d'hymen ne s'allument pour el<strong>le</strong>.<br />
(qu'on rapprochera <strong>de</strong> Térence: missast ancilla arcessitum et ut adferret; Stolz-<br />
Schmalz, p. 679). On trouve un autre type d'asymétrie dans :<br />
Ath., l, 4:<br />
Vous vou<strong>le</strong>z que ce Dieu vous comb<strong>le</strong> <strong>de</strong> bienfaits,<br />
Et ne l’aimer jamais!<br />
<strong>Spitzer</strong>, L’effet <strong>de</strong> <strong>sourdine</strong> dans <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> classique : Racine. 60