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http://www.jeuverbal.fr Spitzer, L'effet de sourdine ... - le jeu verbal

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III, 5 - Céphise à Andromaque :<br />

Je croirais ses conseils et je verrais Pyrrhus.<br />

Un regard confondrait Hermione et la Grèce.<br />

III, 7 - Pyrrhus à Andromaque:<br />

Mais, Madame, du moins, tournez vers moi <strong>le</strong>s yeux<br />

Voyez si mes regards sont d'un juge sévère.<br />

IV, 2 - Cléone à Hermione:<br />

Vos yeux ne sont que trop assurés <strong>de</strong> lui plaire.<br />

IV, 3 - Oreste :<br />

Croirai-je que vos yeux, à la fin désarmés,<br />

Veu<strong>le</strong>nt ...<br />

IV, 5 - Pyrrhus à Hermione :<br />

Et quoique d'un autre oeil l'éclat victorieux<br />

Eût déjà prévenu <strong>le</strong> pouvoir <strong>de</strong> vos yeux ...<br />

Hermione :<br />

... si <strong>le</strong> ciel en colère<br />

Réserve à d'autres yeux la gloire <strong>de</strong> vous plaire,<br />

Achevez votre hymen, j'y consens, mais du moins<br />

Ne forcez pas mes yeux d'en être <strong>le</strong>s témoins.<br />

V, 2 - Cléone à Hermione :<br />

Je l'ai vu ...<br />

Et d'un oeil où brillaient sa joie et son espoir<br />

S'enivrer en marchant du plaisir <strong>de</strong> la voir.<br />

<strong>http</strong>://<strong>www</strong>.<strong><strong>jeu</strong><strong>verbal</strong></strong>.<strong>fr</strong><br />

Les yeux, <strong>le</strong> regard, sont parfois vus tout concrètement, dans <strong>le</strong>s gestes (ouvrez<br />

vos yeux, tournez vers moi <strong>le</strong>s yeux); mais ils sont aussi <strong>le</strong> miroir <strong>de</strong> l'âme (d'un oeil où<br />

brillaient sa joie et son espoir, si mes regards sont d'un juge sévère), parfois aussi <strong>de</strong>s<br />

êtres indépendants qui règnent (mes yeux ... sur votre âme ... absolus,. vos yeux ... ont<br />

régné sur mon âme), par<strong>le</strong>nt (ils n'ont qu'à me dire ... , dans tous <strong>le</strong>s coeurs faire par<strong>le</strong>r<br />

vos yeux), enfin <strong>de</strong> simp<strong>le</strong>s formu<strong>le</strong>s remplaçant « je, tu, il » etc. (quoique d'un autre œil<br />

l'éclat victorieux eût ... prévenu <strong>le</strong> pouvoir <strong>de</strong> vos yeux). Cette toute-puissance <strong>de</strong>s yeux,<br />

proclamée tout au long <strong>de</strong> la pièce, élève l'amour au niveau d'une essence purement<br />

spirituel<strong>le</strong>, qui ne fait que transparaître mystérieusement par <strong>le</strong>ur truchement.<br />

Rien, <strong>de</strong>puis Corneil<strong>le</strong>, voire <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> pétrarquisme <strong>de</strong> la Renaissance et <strong>le</strong>s<br />

troubadours, n'est plus courant que l'image <strong>de</strong> la flamme d’amour. Mais dans Phèdre,<br />

Racine, peut-être inspiré par <strong>le</strong> sens étymologique du nom <strong>de</strong> son héroïne (« la<br />

Rayonnante, la Brillante »), a fait du feu <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong> du sentiment <strong>de</strong> Phèdre : <strong>le</strong> feu 1.<br />

éclaire et 2. réchauffe, et Phèdre, fil<strong>le</strong> du dieu <strong>de</strong>s Enfers, tourmentée par <strong>de</strong> sombres<br />

puissances, recherche la lumière, <strong>le</strong> So<strong>le</strong>il son ancêtre; el<strong>le</strong> voudra donc premièrement<br />

voir <strong>le</strong> jour, la lumière, quoiqu'el<strong>le</strong> soit condamnée à la nuit, à la mort, et <strong>de</strong>uxièmement<br />

el<strong>le</strong> brû<strong>le</strong>ra d'amour, dans <strong>le</strong> temps même qu'el<strong>le</strong> sent se figer sa cha<strong>le</strong>ur vita<strong>le</strong>. Toujours<br />

s'opposeront en el<strong>le</strong> <strong>le</strong>s ténèbres et la lumière, la cha<strong>le</strong>ur et <strong>le</strong> <strong>fr</strong>oid; el<strong>le</strong> sera un<br />

oxymoron (v. plus haut) incarné, une sombre lumière déclinante, une flamme qui se<br />

re<strong>fr</strong>oidit (mourante); une « flamme noire », une torche brièvement embrasée : voilà ce<br />

qu'est cette brillante Phèdre, qui, enfant d'une « triste » et « brillante » famil<strong>le</strong>, tient<br />

autant <strong>de</strong> Minos que d'Hélios. Et « noir et brillant » ne sont que <strong>de</strong>s expressions<br />

symboliques <strong>de</strong> « mal » et « bien » d'une part, « inconscient » et « conscient » <strong>de</strong><br />

l'autre. Comme personne à ma connaissance n'a encore mis en lumière ce <strong>jeu</strong> <strong>de</strong><br />

symbo<strong>le</strong>s, je fais suivre un choix <strong>de</strong> passages :<br />

Chargés d'un feu secret, vos yeux s'appesantissent.<br />

<strong>Spitzer</strong>, L’effet <strong>de</strong> <strong>sourdine</strong> dans <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> classique : Racine. 69

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