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Un Adolescent Tome 1

Auteur: Fédor Mikhaïlovitch Dostoievski. Roman traduit du Russe par J. W. Bienstock et Félix Fénéon. Langue: Français. Editeur: Eugène Fasquelle, 321 pages, 1923.

Auteur: Fédor Mikhaïlovitch Dostoievski. Roman traduit du Russe par J. W. Bienstock et Félix Fénéon. Langue: Français. Editeur: Eugène Fasquelle, 321 pages, 1923.

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dépit de voir ses avances dédaignées, elle s’était mise à le<br />

haïr. Le pis est qu’il aurait fait « allusion » à ces choses<br />

devant le général, c’est-à-dire devant le mari de la « femme<br />

infidèle », insinuant que l’intrigue avec le jeune prince<br />

n’avait pour but que de donner le change à sa perspicacité.<br />

Cette famille était devenue un enfer… Selon une autre<br />

version, Catherine Nicolaïevna aimait beaucoup sa belle-fille<br />

et, d’être calomniée devant elle, avait ressenti un désespoir<br />

sans bornes… Ce n’est pas tout encore : il existait une<br />

troisième version, à laquelle croyait Kraft, comme j’y crus<br />

moi-même. Avant que se fussent manifestés les sentiments<br />

de la jeune fille, Versilov aurait offert son vieux cœur à<br />

Catherine Nicolaïevna, aurait même visé avec une clarté<br />

suffisante l’éventualité d’une seconde attaque d’apoplexie<br />

qui emportât le mari. Indignée, Catherine, qui pourtant ne<br />

laissait pas d’avoir été, à son heure, entichée de Versilov, le<br />

repoussa injurieusement. Elle le détestait donc déjà quand<br />

elle avait appris qu’il convoitait la main de la jeune fille.<br />

Naguère, Maria Ivanovna, la nièce d’Andronikov,<br />

m’avait raconté tout cela à Moscou. Quant à elle, elle<br />

admettait que ces versions si disparates pouvaient fort bien<br />

se concilier : elle voyait là la haine dans l’amour et un jeu<br />

alterné d’orgueils déçus ; mais, depuis son enfance, nuit et<br />

jour, elle se farcissait la tête de romans…<br />

À tous les points de vue, le rôle de Versilov apparaissait<br />

fâcheux, dans cette intrigue assez noire et qui avait eu un<br />

dénouement tragique : la jeune fille s’était empoisonnée avec<br />

le phosphore d’un paquet d’allumettes. S’était-elle<br />

empoisonnée ? Kraft le croyait. Quoi qu’il en soit, elle resta<br />

au lit quinze jours, et mourut. Mourut aussi son père : la<br />

douleur avait préparé les voies à une deuxième attaque<br />

d’apoplexie, qui survint trois mois plus tard.<br />

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