Vies brisées - Arte

Des prétextes pour une utilisation illégale des armes
Les alliances improbables que les Etats-Unis ont forgées sous le gouvernement du
président George W. Bush sont basées sur le raisonnement erroné selon lequel
‘l’ennemi de mon ennemi est mon ami’ Cette politique simpliste n’envisage même
pas le long cycle de vie de la plupart des systèmes d’armement. De même, cette
politique n’admet pas le besoin d’évaluer très scrupuleusement le respect probable
du droit par les forces armées. Pourtant, c’est sur ces bases que les ventes d’armes
américaines aux pays voisins de l’Irak ont été accrues dans les mois précédents la
guerre en Irak. A cette occasion, des contrats juteux, dont certains étaient bloqués
depuis plusieurs années, ont été négociés. 165
Les grands producteurs d’armes et les pays exportateurs du G8, ainsi que la Chine,
ont directement ou indirectement joué un rôle déterminant dans les livraisons
d’armes à des régimes qui ne respectent que du bout des lèvres le droit international
humanitaire et le droit international relatif aux droits humains. En 1990, l’Irak a
envahi le Koweït avec des armes achetées auprès des grandes puissances
exportatrices d’armes. 166 Dans les années 80, au cours de la guerre Iran-Irak, le
gouvernement américain a fourni au gouvernement irakien des renseignements et
des conseils militaires; d’autre part, il s’est assuré que l’Irak possédait bien du
matériel de guerre et dans un cas, a même eu recours à une entreprise chilienne pour
fournir à l’Irak des bombes à fragmentation. A l’époque, les relations diplomatiques
entre Washington et Bagdad avaient repris en dépit de ‘l’utilisation presque
quotidienne d’armes chimiques’. 167
Forger et financer des allégeances militaires sur la seule base d’un ennemi commun
et sans respect pour les droits humains, peuvent donner le résultat opposé à celui
recherché. Depuis les années 80, l’administration américaine a fourni de grande
quantité d’armes et d’assistance militaire aux gouvernements et aux groupes
d’opposition armés en Afghanistan, en Angola, en Irak, en RDC et en Somalie. Dans
tous ces pays, les forces armés commettaient de graves violations des droits humains
alors qu’elles recevaient l'aide militaire américaine. Tous ces pays furent plus tard
accusés par les Etats-Unis ‘d’abriter des terroristes’. De même les Etats-Unis
accusèrent les membres des forces armées de ces pays d’être des ‘terroristes’. Des
années plus tard, en Afghanistan et en Somalie, les armes et les formations reçues
seront utilisées contre les forces armées américaines; un phénomène connu sous le
nom de ‘blowback’ (littéralement ‘retour de souffle’). En 2001, les forces américaines
en Afghanistan furent attaquées par des missiles Stinger. Ces missiles avaient été
auparavant fournis par l’Agence centrale de renseignements américaine (CIA) aux
moudjahiddin afghans qui, dans les années 80, luttaient contre l’armée soviétique. 168
Les livraisons d’armes dans les situations telles que décrites ci-dessus, sont des bombes
à retardement dont les risques à venir sont les suivants: création d’une course aux
armements régionale, détournement des armes vers des groupes armés, affaiblissement
des normes internationales sur les droits humains. Les fournitures d’armes doivent
être dépendantes de conditions établies et inébranlables tel que le strict respect du
droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits humains.
En outre, il faut éviter des les amalgamer à des politiques étrangères à court terme
qui ne prennent pas en considération les implications à long terme de ces questions.
‘De profonds changements
sont en train d’intervenir
dans le monde, surtout depuis
le 11 septembre. De nombreux
pays sont en train de
réévaluer l’équilibre des
pouvoirs militaires autour
d’eux et ressentent le besoin
d’améliorer leurs systèmes.’
Le général de division Avraham Rotem,
expert militaire israélien, 2003 164
43