Journal asmac No 2 - avril 2024

Formation postgraduée / Conditions de travail
La communication:
une compétence négligée
«Je repasserai plus tard.» Cette phrase que nous,
médecins hospitaliers, utilisons régulièrement
fait partie du répertoire standard, que ce soit
pendant les visites ou l’admission des patients.
Est-ce que nous repasserons vraiment plus tard? Généralement,
les heures passent et le prochain contact personnel n’aura lieu
que lors de la visite du lendemain.
Le fait de retarder les entretiens peut avoir différentes
raisons. D’une part, les entretiens avec les
patients peuvent être longs, délicats et parfois
pénibles. De plus, nous n’avons souvent
pas le temps à cause d’un agenda
surchargé. D’autre part, nous aimerions
peut-être simplement nous dégager
d’une situation délicate ou reporter
une décision complexe. Quoi
de plus naturel donc que de faire
patienter la personne concernée?
Le prochain service s’annonce déjà
et l’entretien promis tombe de plus
en plus bas dans la liste de nos priorités.
Il n’est donc pas rare de nous retrouver
dans exactement la même situation
le jour suivant lors de la visite.
Pendant les six ans que durent les
études de médecine, nous disséquons le corps
humain jusque dans les moindres détails, faisons
connaissance de processus biochimiques étonnants et
abordons les pathologies les plus rares. Mais comment communiquons-nous
correctement des informations médicales
complexes et surtout de manière à ce que le profane les comprenne
et soit, si possible, en mesure de prendre lui-même une
décision? C’est une question qui n’est actuellement abordée de
manière appropriée ni pendant les études ni ensuite, au cours
de la longue formation de spécialiste.
L’essentiel
en bref
Dans une profession comme la nôtre, la capacité de communiquer
est une compétence-clé. Pourtant, cette compétence-clé
n’est pas suffisamment enseignée, ni pendant les études de
médecine, ni pendant la formation médicale postgraduée.
Comme nous passons de moins en moins de temps avec les
patientes et les patients en raison de la numérisation et bureaucratisation
croissantes 1 , le peu de temps disponible gagne
encore en importance.
La bonne conduite d’entretiens peut
s’apprendre. Elle est essentielle pour établir
une relation de confiance avec les
patientes et les patients. 2 Les compétences
que cela implique, par
exemple en matière de négociation,
et les techniques d’entretien et de
communication devraient être
abordées le plus tôt possible dans
le cadre de la formation médicale,
afin que nous soyons en mesure de
répondre de façon appropriée aux
attentes des patientes et patients,
particulièrement dans les situations
difficiles sur le plan éthique. Dans ce
contexte, il faudrait également enseigner
des compétences sociales et émotionnelles
comme cela se fait déjà à l’école dans
de nombreux pays.
Seule une communication irréprochable permet de
mettre en œuvre, dans l’intérêt de nos patientes et patients, une
médecine de pointe impliquant une approche globale. Il est
donc urgent d’intégrer davantage ces compétences dans notre
formation médicale pré- et postgraduée. L’élaboration et
l’introduction des EPA (Entrustable Professional Activities)
dans les années à venir sont, à mon avis, une opportunité à
saisir pour offrir la place qui lui revient à la compétence en
matière de communication.
1
Butler R., Monsalve M., Thomas G. W., Herman T., Segre A. M., Polgreen P. M.,
Suneja M. Estimating Time Physicians and Other Health Care Workers Spend
with Patients in an Intensive Care Unit Using a Sensor Network.
Am J Med. 2018 Aug; 131(8): 972.e9-972.e15. doi: 10.1016/j.amjmed.2018.03.015.
Epub 2018 Apr 9. PMID: 29649458.
Photo: màd
2
Gu L., Tian B., Xin Y., Zhang S., Li J., Sun Z. Patient perception of doctor
communication skills and patient trust in rural primary health care: the
mediating role of health service quality. BMC Prim Care. 2022 Sep 29; 23(1):
255. doi: 10.1186/s12875-022-01826-4. PMID: 36175839; PMCID: PMC9520094.
Richard Mansky,
responsable du ressort formation
postgraduée et continue, asmac
vsao /asmac Journal 2/24 17