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76 INITIATION DU MORT<br />
lation tibCto-birmane des confins du Yunnan <strong>et</strong> du Tib<strong>et</strong>, l'inceste est donnC<br />
comme cause directe du dClugel.<br />
L'histoire du dCluge connait certes une diffusion universelle, qui a suscitC<br />
dCj2 bien des Ctudes. En cherchant au-deli de l'Asie orientale, voire mCme 2<br />
l'inthieur de c<strong>et</strong>te aire de civilisation, on pourrait sans doute trouver une multitude<br />
d'autres versions prCsentant quelque trait commun avec le mythe hmong.<br />
Toutefois, si je considkre le thkme de l'inceste comme le trait pertinent du mythe,<br />
il ne me reste plus qu'un certain nombre d'histoires, formant alors un corpus<br />
homoghne. I1 se distingue n<strong>et</strong>tement des traditions altaYques2 <strong>et</strong> incliennes comme<br />
des mythes thai3. Enfin il englobe un ensemble d'<strong>et</strong>hnies cohCrent, correspondant<br />
dans l'espace Q l'axe de l'e'change ge'?z&~alis& d6gagC par C1. LCvi-Strauss dans<br />
Les Structures Lle'mentaires de la Parent6 (Paris, 1949). (Cf. carte ci-contre.) En<br />
eff<strong>et</strong>, les populations Miao-Yao, tib6to-birmanes <strong>et</strong> chinoise considCrCes ont en<br />
commun une organisation clanique patrilindaire basde sur I'exogamie de clan<br />
I. Le mythe du dCluge chez les hTahsi a CtC recueilli sons forme de tradition orale par<br />
J. F. ROCK, dans Journ. West China Border Res. Soc., 1935, VII ; <strong>et</strong> par LI LIN TS'AN, eMo-SO<br />
tsou ti hong chouei kou che I) (Histoire du deluge chez Ies Mo-So), en chinois avec synopsis en<br />
anglais dans Bull<strong>et</strong>in de l'lnstitut d'Ethnologie de YAccademia Sinica, Taiwan, 1957 (3), pour<br />
la tradition Ccrite. Les Nahsi ont en eff<strong>et</strong> une Ccriture hieroglyptique abondamment CtudiCe<br />
par Li Lin Ts'an. Cf. aussi J. I?. ROCK, e Studies in Nakhi Literature a, BEFEO, 1947.<br />
2. Si j'en crois Uno HARVA (Les Repre'sentations religieuses des peuples altaiques, Paris,<br />
1959). les populations de 1'Asie centrale ont kt6 largement influencCes par la Bible <strong>et</strong> le Coran,<br />
<strong>et</strong> les legendes du deluge tournent toutes plus ou moins autour de 1'Arche de NoC. I1 faut<br />
aller chez les Samoybdes <strong>et</strong> les Toungouses transbalkaliens pour r<strong>et</strong>rouver trace d'un garqon<br />
<strong>et</strong> d'une fille, seuls rescapks du dksastre.<br />
3. Dans les lCgendes thai, il n'est point question de couple ni d'inceste. Or, on r<strong>et</strong>rouve<br />
Ie coupIe incestueux dans une lCgende des Khmou (population Mon-khmkre du Kord-Laos)<br />
de Muong Sing. Cf. H. Roux, cc Quelques minoritCs <strong>et</strong>hniques du Nord-Indochine r, France-<br />
Asie, Saigon, 1954, X, 92-93. Un jeune homme <strong>et</strong> sa smur marchant dans la for&t sont prkvenus<br />
par un rat de l'imminence du deluge, il leur conseille en outre de s'installer Q 1'intCrieur d'un<br />
tronc d'arbre pour Cchapper B la catastrophe. e Aprits quelques jours l'eau se r<strong>et</strong>ira. Les jeunes<br />
gens sortirent de leur boite. Plus rien ne vivait autour d'eux. Le jeune homme dit alors Q sa<br />
seur : ' Nous sommes dksormais seuls au monde. Je vais partir d'un c6tC. Tu partiras de<br />
l'autre. Je prendrai comme 6pouse la premibre femme que je rencontrerai. Tu prendras pour<br />
mari le premier homme que tu verras. ' r Mais les deux jeunes gens ont beau chercher, ils<br />
ne trouvent personne. Comme ils se livrent au dbsespoir, l'oiseau t6 go leur confirme qu'il<br />
ne reste personne d'autre qu'eux <strong>et</strong> leur conseille de s'unir l'un Q l'autre. La jeune femme<br />
fut enceinte pendant trois ans <strong>et</strong> mit au monde deux ple^ rmung, grosses courges. a Le mari<br />
<strong>et</strong> la femme ne comprenant rien, laisskrent 1% ces legumes qui demeurbrent longtemps B<br />
c6tB d'un mortier Q piler le riz. Un jour, la femme ayant fini de dkcortiquer son riz, laissa,<br />
de fatigue, tomber son pilon qui vint crever une des deux citrouilles. I1 en sortit aussit8t une<br />
foule de gens : des Thai, des Lii, des Lao, des Nhucin. I1 restait encore une citrouille intacte.<br />
La femme, instruite par l'expCrience, se garda bien de la briser de crainte d'en blesser les<br />
occupants. Mais elle fit rougir au feu un poin~on <strong>et</strong> l'introduisit doucement dans la citrouille.<br />
Les Khmou se prCcipit6rent aussitBt au dehors, emportant aprbs leur peau le charbon qui<br />
recouvrait les parois. ' C'est pour cela - disent les Khmou - que nous sommes les plus<br />
noirs de tous les habitants du pays. ' r<br />
Bien que la fin du conte ait Ct6 dCmarquCe des mythes thai, le dCbut en diffbre radicalement.<br />
I1 est vrai que la sociCt6 khmou est diviske en lignages patrilinkaires exogames ...