29.06.2013 Views

Réponse de Berton

Réponse de Berton

Réponse de Berton

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

— Tu as fait un mauvais rêve ?<br />

Je l’attirai <strong>de</strong> l’autre main :<br />

— Un rêve ? Oui, je rêvais. Et toi, tu n’as pas dormi ?<br />

— Je ne sais pas. Je ne crois pas. Je n’ai pas sommeil. Il ne<br />

faut pas que cela t’empêche <strong>de</strong> dormir… Pourquoi me regar<strong>de</strong>stu<br />

comme ça ?<br />

Je fermai les yeux. Son cœur battait contre mon cœur. Son<br />

cœur ? Simple accessoire ! me dis-je. Mais rien ne m’étonnait<br />

plus, pas même ma propre indifférence. J’avais franchi les<br />

frontières <strong>de</strong> la peur et du désespoir. J’étais parvenu très loin –<br />

personne, jamais, n’était arrivé aussi loin ! Mes lèvres<br />

effleuraient son cou ; je <strong>de</strong>scendis plus bas, jusqu’à la cavité<br />

entre les tendons ; le sang frappait la paroi <strong>de</strong> la coquille <strong>de</strong><br />

chair soyeuse.<br />

Je m’appuyai sur le cou<strong>de</strong>. Aurore, douceur <strong>de</strong> l’aube ? Un<br />

orage silencieux embrasait l’horizon sans nuages. Un éclair, le<br />

premier rayon du soleil bleu, traversa la chambre et se brisa en<br />

reflets acérés ; il y eut un feu croisé d’étincelles, jaillies du<br />

miroir, <strong>de</strong>s poignées <strong>de</strong> portes, <strong>de</strong>s tuyaux nickelés ; la lumière<br />

s’éparpillait, se jetait sur toute surface lisse et semblait vouloir<br />

conquérir un espace plus vaste, faire éclater la chambre. Je<br />

regardai Harey ; la pupille <strong>de</strong> ses yeux gris s’était contractée.<br />

Elle <strong>de</strong>manda d’une voix mate :<br />

— La nuit est déjà finie ?<br />

— Ici, la nuit ne dure jamais longtemps.<br />

— Et nous ?<br />

— Quoi nous ?<br />

— Nous resterons longtemps ici ?<br />

Venant <strong>de</strong> sa part, la question ne manquait pas <strong>de</strong> saveur<br />

comique ; mais, quand je parlai, ma voix ne révéla aucune trace<br />

<strong>de</strong> gaieté :<br />

— Assez longtemps, probablement. Tu n’as pas envie <strong>de</strong><br />

rester ?<br />

Elle ne cilla pas. Elle me regardait attentivement. Avait-elle<br />

cillé, maintenant ? Je n’en étais pas sûr. Elle tira la couverture<br />

et j’aperçus le petit triangle rose sur son bras.<br />

— Pourquoi me regar<strong>de</strong>s-tu comme ça ?<br />

— Parce que tu es très belle.<br />

- 100 -

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!