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Je souffrais d’un violent mal <strong>de</strong> tête. Enragé, je vidai par<br />
terre tout le contenu <strong>de</strong> la pharmacie – pas trace <strong>de</strong> cachets<br />
antinévralgiques ! Je n’avais pas envie <strong>de</strong> retourner dans la salle<br />
d’opération. Je n’avais envie <strong>de</strong> rien. Jamais, je n’avais été <strong>de</strong><br />
plus mauvaise humeur. Harey glissait comme une ombre à<br />
travers la chambre ; <strong>de</strong> temps en temps, elle se retirait quelque<br />
part – je ne sais où, je ne lui prêtais aucune attention – puis elle<br />
revenait.<br />
L’après-midi, dans la cuisine (nous venions <strong>de</strong> déjeuner,<br />
mais Harey n’avait, en fait, rien avalé du tout ; affligé <strong>de</strong> mon<br />
mal <strong>de</strong> tête, sans appétit moi-même, je n’avais pas tenté <strong>de</strong><br />
l’encourager à manger), Harey quitta sa place et vint s’asseoir à<br />
côté <strong>de</strong> moi ; elle pinça la manche <strong>de</strong> ma blouse.<br />
Je grognai :<br />
— Qu’est-ce qu’il y a ?<br />
J’avais l’intention <strong>de</strong> monter, car les tuyaux résonnaient<br />
d’échos crépitants – Sartorius, semblait-il, tripatouillait un<br />
appareil à haut voltage. Mais j’aurais dû emmener Harey avec<br />
moi. Déjà difficile à justifier dans la bibliothèque, sa présence<br />
risquait <strong>de</strong> provoquer ailleurs, à proximité <strong>de</strong>s machines,<br />
quelque remarque malencontreuse <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> Snaut. Je<br />
renonçai à sortir.<br />
— Kris, murmura-t-elle, où est-ce que nous en sommes, tous<br />
les <strong>de</strong>ux ?<br />
Je soupirai malgré moi ; décidément, je n’étais pas en veine<br />
ce jour-là.<br />
— Tout va très bien. Pourquoi ?<br />
— Je voudrais te parler.<br />
— Bon, j’écoute.<br />
— Pas comme ça.<br />
— Comment ? J’ai mal à la tête, tu le sais, j’ai un tas <strong>de</strong><br />
soucis…<br />
— Un peu <strong>de</strong> bonne volonté, Kris !<br />
Je me forçai à sourire ; ce fut sûrement un sourire misérable.<br />
— Parle, ma chérie, je t’en prie.<br />
— Tu me diras la vérité ?<br />
Je fronçai les sourcils ; ce préambule ne me plaisait pas.<br />
— Pourquoi mentirais-je ?<br />
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