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Anatomie d'un "quartier de gares" : recompositions ... - Urbamet

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ambiguïté : comment à la fois éviter les con<strong>de</strong>nsations, symbolisées par les « ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

jeunes » <strong>de</strong>s <strong>quartier</strong>s périphériques, et améliorer les qualités d’accueil <strong>de</strong>s espaces ? Sans<br />

doute faut-il y voir l’empreinte <strong>de</strong> la géographie <strong>de</strong>s territoires disqualifiés dont la menace<br />

est réactualisée par l’offre <strong>de</strong> transport et l’attractivité renouvelée du centre-ville. Mais<br />

plus largement, le triangle <strong>de</strong>s gares participe à un processus <strong>de</strong><br />

décomposition/recomposition <strong>de</strong>s rapports entre les lieux <strong>de</strong> la centralité et les espaces<br />

périphériques, la dynamique urbaine trouvant dans cet écart un <strong>de</strong> ses catalyseurs.<br />

Cette recherche visait à interroger les contours et représentations du “<strong>quartier</strong>“ au<strong>de</strong>là<br />

<strong>de</strong>s zones <strong>de</strong> proximité <strong>de</strong> la gare. Or, du côté <strong>de</strong> ceux que nous avons appelé les<br />

déci<strong>de</strong>urs, les représentations du “<strong>quartier</strong>“ sont pour le moins hétérogènes ; il apparaît<br />

dans sa réalité sociologique, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s banalité <strong>de</strong> base, comme un impensé, une tache<br />

aveugle. Du côté <strong>de</strong>s commerçants et habitants, la séparation entre la gare et le <strong>quartier</strong><br />

d’habitation est caractéristique ; « lieu <strong>de</strong> pauvreté », « zone <strong>de</strong> populations à risques »,<br />

« <strong>quartier</strong> coupe gorge », sont les qualificatifs le plus souvent employés pour désigner la<br />

première ; alors que le second est décrit comme un « village dans la ville », où prévalent<br />

<strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> proximité impropres aux centres-villes et où les flux ne pénètrent pas. Par<br />

définition ambivalentes, les représentations mises à jour renvoient aux métamorphoses<br />

d’un territoire urbain, passé du charme désuet d’un <strong>quartier</strong> populaire au chantier<br />

permanent, avant qu’une gestion rationnelle <strong>de</strong> l’espace ne lui ôte ses qualités. Cela étant,<br />

bien que traduisant <strong>de</strong>s distinctions territoriales extrêmement fines, ces représentations sont<br />

à considérer comme une construit social. D’ailleurs, quitte à forcer le trait, elles sont<br />

congruentes avec une forme <strong>de</strong> marketing urbain : re-créer un petit village au coeur <strong>de</strong> la<br />

ville pour mieux attirer les flux et redynamiser les commerces qui <strong>de</strong>meurent, sans pour<br />

autant se dissoudre dans l’hyper-centre, telle est la stratégie poursuivie par les acteurs.<br />

On retrouve d’une certaine manière ce clivage au sein même <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong><br />

l’espace que nous avons observé. Ainsi, le déni <strong>de</strong> présence peut se comprendre en ce que<br />

la gare et ses alentours font figure d’indicateur <strong>de</strong> position ; ils sont la traduction d’une<br />

trajectoire <strong>de</strong> déclassement. De même, si ces territoires constituent <strong>de</strong>s lieux traditionnels<br />

<strong>de</strong> déviance, ce sont les pratiques les plus vulnérables que l’on y retrouve, comme la<br />

constitution d’un marché illicite <strong>de</strong> la “défonce à bas prix“ (héroïne <strong>de</strong> mauvaise qualité,<br />

produits <strong>de</strong> substitution, arnaques, etc.) en atteste. A l’inverse, les observations réalisées à<br />

propos <strong>de</strong> la prostitution <strong>de</strong> <strong>quartier</strong> soulignent une forte intégration urbaine, par contraste<br />

avec l’anomie qui semble régner dans les territoires prostitutionnels plus mouvants dans la<br />

ville. Reste que le stigmate <strong>de</strong>meure.<br />

Mais ces pratiques attestent aussi <strong>de</strong> la spécificité <strong>de</strong> l’espace-gare comme espace<br />

<strong>de</strong> visibilité. Cette propriété conduit à relever les compétences tant ordinaires que<br />

professionnelles qui sont déployées pour cadrer et sélectionner ce qui se joue dans un<br />

mon<strong>de</strong> régi par l’observabilité et le maintien <strong>de</strong>s apparences. La gare, dont l’histoire peut<br />

se lire comme une lente incorporation par la ville, est un lieu <strong>de</strong> foisonnement. Le<br />

développement <strong>de</strong>s activités commerciales et les aménagements récents en témoignent :<br />

elle n’est pas seulement une plate forme multi-modale <strong>de</strong> transports collectifs, mais<br />

l’espace du transitoire qui s’insère dans le cours <strong>de</strong>s cheminements ordinaires. Les<br />

logiques d’usages du lieu se traduisant par la variété <strong>de</strong>s espaces accessibles, les ressources<br />

(retrait, exposition, relais) qui en fon<strong>de</strong>nt l’attrait, entre lieu d’anonymat et lieu<br />

d’interconnaissance, tantôt se superposent tantôt se concurrencent, définissent l’urbanité<br />

paradoxale <strong>de</strong> la gare.<br />

On voit donc se constituer un certain nombre <strong>de</strong> tensions. Tensions entre la<br />

symbolique <strong>de</strong> la métropole et l’imaginaire <strong>de</strong> la gare, la ville-radieuse et sa part d’ombre,<br />

l’accessibilité urbaine et la sécurisation <strong>de</strong>s lieux, une logique <strong>de</strong>s flux et une logique <strong>de</strong><br />

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