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d’ailleurs, que ces films-là n’aient pas été programmés.) Car le <strong>cinéma</strong>, impudique ou non,<br />

est une affaire de corps. Sur l’écran, il faut voir, je dis voir, <strong>la</strong> peau, et imaginer le sang qui<br />

brûle, cou<strong>la</strong>nt en dessous. Dans <strong>la</strong> salle, il faut entendre, pourquoi pas ?, les corps vibrer, se<br />

tordre. Je n’ai pas trouvé jusqu’ici de meilleur pont que <strong>la</strong> chair entre les images d’un film,<br />

et <strong>la</strong> vie, celle <strong>du</strong> spectateur.<br />

Pour conclure, il se dit très triste que notre époque à nous, « jeunes gens », le soit<br />

tellement, triste. Et ennuyeuse. Il nous demande de lui citer un film français de ces trois<br />

dernières années. Une réponse, timide : La graine et le mulet. Lui, un peu obscur : « Oui…<br />

c’est vrai… c’est bien… mais c’est difficile… non pas à comprendre, mais c’est difficile… » Pour<br />

lui, le <strong>cinéma</strong> d’auteur français est « à pleurer ». Mais il l’était déjà de son temps : il y a<br />

cette scène magnifique au début de Le Désirable et le Sublime où l’un des personnages<br />

– nous sommes en 1969 – s’emporte contre « <strong>la</strong> léthargie <strong>du</strong> <strong>cinéma</strong> petit-bourgeois »,<br />

contre tous ces petits Français qui « <strong>du</strong> temps de <strong>la</strong> Russie d’Eisenstein et <strong>du</strong> Cuirassée<br />

Potemkine, se seraient fait pendre haut et court. » Ce pauvre <strong>cinéma</strong> français dit-il, excepté<br />

« bien enten<strong>du</strong> » (nous sommes toujours en 69) celui de Godard. Alors je lève <strong>la</strong> main<br />

timidement, lui demandant de l’évoquer, Jean-Luc. « J’ai déjeuné deux ou trois fois avec<br />

lui. Je lui avais prêté ma voiture pour À bout de souffle. Mais il manque de charme, de<br />

charisme. Je n’aimais pas sa voix, qu’on entend trop dans quelques-uns de ses derniers films.<br />

Du reste, même si j’aimais beaucoup ses films, il n’était pas si engagé que ça politiquement… »<br />

Personne n’ose lui demander d’approfondir cette nouvelle affirmation très curieuse. Le<br />

mystère reste là, dans <strong>la</strong> salle, sublime, comme ses films.<br />

84 <strong>Spectres</strong> <strong>du</strong> Cinéma #3 Été 2009<br />

L’éternité pour nous, le cri de <strong>la</strong> chair, 1963, Monique Just.<br />

Leurtillois

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