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Poirot quitte la sce.. - Index of

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le meurtre ; et ce<strong>la</strong>, je ne pouvais le faire que d’une seule manière. Car – ne vous y trompez<br />

pas – X ne pouvait être appréhendé par <strong>la</strong> loi. Il était à l’abri. Je n’ai pu imaginer aucune<br />

autre façon d’assurer sa défaite et de le mettre définitivement hors d’état de nuire.<br />

Et pourtant, j’ai hésité. Je voyais c<strong>la</strong>irement ce qu’il fal<strong>la</strong>it faire, mais je ne pouvais m’y<br />

résoudre. J’étais semb<strong>la</strong>ble à Hamlet : je différais toujours l’heure du châtiment. Et puis a eu<br />

lieu une autre tentative : sur <strong>la</strong> personne de Mrs. Luttrell.<br />

J’étais curieux, Hastings, de voir si votre f<strong>la</strong>ir bien connu pour ce qui est évident se<br />

manifesterait encore cette fois. Et ça a marché : votre première réaction a été de soupçonner<br />

vaguement Norton. Vous aviez vu c<strong>la</strong>ir : Norton était bien notre homme. Vous n’aviez aucune<br />

preuve pour étayer votre hypothèse, hormis votre remarque – sensée mais un peu timide –<br />

que l’homme était insignifiant. Pourtant, vous étiez, à cet instant, fort proche de <strong>la</strong> vérité.<br />

J’ai étudié avec soin l’histoire de sa vie. Il était l’unique enfant d’une femme autoritaire et<br />

dominatrice, et il semble qu’à aucun moment, il n’ait eu <strong>la</strong> possibilité de s’affirmer, d’imposer<br />

sa personnalité à quiconque. Il était affecté d’une légère c<strong>la</strong>udication, et déjà à l’école, il<br />

était trop handicapé pour prendre part aux jeux de ses camarades.<br />

Une des choses les plus significatives que vous m’ayez rapportées, c’est le fait qu’on<br />

s’était moqué de lui au lycée parce qu’il avait eu <strong>la</strong> nausée à <strong>la</strong> vue d’un <strong>la</strong>pin écorché. Je<br />

crois que cet incident a <strong>la</strong>issé en lui une impression pr<strong>of</strong>onde. Il détestait le sang et <strong>la</strong><br />

violence, et son prestige en souffrait. Inconsciemment, il attendait de pouvoir s’affirmer, se<br />

venger en faisant preuve de hardiesse et même de cruauté.<br />

J’imagine qu’il a commencé très jeune à découvrir sa faculté d’influencer les autres. Il<br />

savait écouter calmement, attirait <strong>la</strong> sympathie, et les gens l’appréciaient sans toutefois<br />

prêter grande attention à lui. Ce<strong>la</strong> le vexait, mais il en tirait avantage. Il se rendait compte<br />

qu’il était ridiculement facile, en employant les mots adéquats et en donnant les impulsions<br />

correctes, d’influencer ses semb<strong>la</strong>bles. La seule chose nécessaire, c’était de les comprendre,<br />

de pénétrer leurs pensées, de prévoir leurs réactions secrètes et leurs désirs inavoués.<br />

Vous rendez-vous compte, Hastings, à quel point une telle découverte pouvait lui procurer<br />

une sensation de puissance ? Lui, Stephen Norton, que tout le monde aimait et méprisait en<br />

même temps, était capable de faire accomplir aux autres des actes qu’ils ne vou<strong>la</strong>ient pas<br />

faire ou – remarquez bien <strong>la</strong> nuance – qu’ils croyaient ne pas vouloir faire.<br />

Je puis me le représenter en train de pratiquer sa marotte, puis acquérant peu à peu le<br />

goût morbide de <strong>la</strong> violence par personne interposée ; cette violence pour <strong>la</strong>quelle il<br />

manquait de force physique, ce qui lui avait valu autrefois d’être tourné en dérision.<br />

Et cette marotte grandit sans cesse jusqu’à devenir une passion, une nécessité. C’était<br />

une véritable drogue dont il avait un besoin irrésistible, exactement comme s’il se fût agi de<br />

morphine ou d’héroïne. Norton, cet homme au tempérament doux, était un sadique caché, un<br />

passionné de <strong>la</strong> douleur, de <strong>la</strong> torture mentale. Et l’appétit vient en mangeant [17] .<br />

Lui, Norton, détenait les clefs de <strong>la</strong> vie et de <strong>la</strong> mort. De même qu’un toxicomane, il<br />

devait se procurer sa ration de drogue, trouver une victime après l’autre. Je suis convaincu<br />

qu’il y a eu bien d’autres cas, en plus des cinq que je suis parvenu à connaître. Et dans<br />

chaque affaire, il a joué le même rôle. Il connaissait Etherington. Il a passé tout l’été dans le<br />

vil<strong>la</strong>ge où habitait Riggs, avec qui il buvait parfois un verre au pub. Au cours d’une croisière, il<br />

a fait <strong>la</strong> connaissance de Freda C<strong>la</strong>y et, sans en avoir l’air, l’a persuadée que si sa tante<br />

venait à mourir, ce serait une bonne chose : une délivrance pour <strong>la</strong> vieille dame et une vie

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